Dernière conversation avec Lola Faye de Thomas H.Cook (Points)

Coup de cœur ! Je ne vais pas vous le cacher, Thomas H.Cook est une de mes plus belles découvertes du petit monde du polar. Et plus je lis ses romans, plus je suis époustouflé de sa finesse et de son art pour présenter des situations qui nous font nous poser bien des questions sur notre vie en général. Et plus je lis ses romans, plus j’y trouve des points communs et en particulier les relations entre les faits du passé et les souvenirs qu’on en garde.

Prenez Mémoire assassine où le narrateur était forcé de regarder la réputation de tueur de son père et comment les questions de la journaliste remettait à plat ses croyances. Ce roman ci est finalement très proche de Mémoire assassine, mais l’auteur arrive encore à me surprendre, à faire le pied de nez et nous mener vers de nouvelles interrogations. Et ce roman, une nouvelle fois remarquable, est un inédit et est proposé directement en format poche par les éditions Points. Difficile donc d’y résister.

Luke Paige est un écrivain raté, qui va bientôt sortir son nouveau livre, une étude historique sur les grandes décisions des armées américaines lors de grandes batailles passées. Etant professeur de profession, il est divorcé de sa femme Julia Bates. Et c’est sur un auteur prêt à faire une conférence avant les habituelles dédicaces que s’ouvre ce livre. Et on s’aperçoit que Luke Paige est quelqu’un d’amer …

Amer envers ce qui lui est arrivé … vingt ans plus tôt … un drame familial qui a entrainé son départ de Grenville, petit village d’Alabama, où il n’aurait jamais voulu finir sa vie. Il se voyait plutôt un grand écrivain, jusqu’à ce que son père Doug se fasse tuer par Woody Gilroy. Ce dernier pensait en effet que sa femme, Lola Faye Gilroy, le trompait avec le père de Luke. Puis Woody se donna la mort. D’ailleurs, la présence de Lola Faye dans la salle de conférence va faire remonter des souvenirs douloureux.

Après la conférence, Lola insiste pour lui parler, alors ils s’installent dans un bar, et parlent du passé, de ce que Luke croit, de ses certitudes, et elle lui répond en menant en quelque sorte un interrogatoire. S’engage alors entre les deux une sorte de duel, où petit à petit, les éléments vont s’emboiter jusqu’à arriver à un aveu effrayant.

Et une fois de plus, on avale les pages, et une fois de plus, on ne sait pas comment cela va se terminer dix pages avant la fin. Je ne vais pas insister sur le style de l’auteur, sur sa subtilité à mettre en place les psychologies des personnages, à faire des allers retour entre le passé et le présent, à décrire des situations tout en faisant naître en nous toujours plus d’interrogations.

Là où ce roman est remarquable, c’est cette façon de nous mener par le bout du nez, nous présentant Luke comme une victime, dans un premier temps, avant d’inverser la tendance, jusqu’à finalement nous laisser avec plein d’interrogations. Sans vouloir tout vous dire, Thomas H.Cook nous présente un personnage de Luke qui a cru en ce que disait sa professeure, quand elle lui disait qu’il méritait mieux que Grenville. Il en a nourri des rancœurs envers ses habitants, ses parents, et s’est pris pour ce qu’il n’est finalement pas : un génie. Et d’un personnage au départ sympathique, Thomas H.Cook nous le transforme en personnage hideux et détestable. Quand l’ambition devient déraisonnable, l’histoire ne peut que se terminer en drame.

C’est un roman fort, c’est un roman remarquable, c’est un roman qui forcément trouvera un écho dans votre vie. Lire Thomas H.Cook, c’est très souvent avoir des leçons de vie, ou recevoir en cadeau des questionnements ou personne d’autre que vous ne trouvera les réponses. Coup de cœur !

 L’ami Claude a aussi mis un coup de coeur pour ce roman ici