Le chouchou du mois de janvier 2015

Bon, allez, on réattaque une nouvelle année, après une année 2014 qui fut, à mon gout, exceptionnelle. Comme tous les ans, les chroniques de ce mois de janvier sont un mélange entre des nouveautés tout juste sorties et des séances de rattrapage de l’année dernière. Mais commençons par la rubrique Oldies, et un petit joyau noir insuffisamment connu. Il s’agit de Montana 1948 de Larry Watson (Gallmeister), qui avec une intrigue simple, se permet de creuser des thèmes importants de fort belle façon.

Ce fut aussi un beau hasard, celui de lire le diptyque de Marin Ledun, L’homme qui a vu l’homme et Au fer rouge (Ombres Noires). Je m’étais mis le premier de coté, ne trouvant pas le temps de l’insérer entre deux autres livres. Et quelques jours plus tard, j’enchainais avec le deuxième, qui en est plus ou moins la suite. Bref, avec ce diptyque, Marin Ledun trouve son rythme, ses sujets, sa construction ; pour moi, ce sont des romans d’action, ceux de la maturité, tout en parlant de sujets graves. J’adore, je suis fan.

A propos d’auteurs dont je suis fan, j’ai lu Le bazar et la nécessité de Samuel Sutra (Flamant noir), le dernier Tonton en date, avant le prochain, bien sur ! Dans celui-ci, Tonton se découvre un fils. Et finalement, si c’est un épisode un peu moins drôle que les autres, il n’en est que plus touchant par moments. Ceci dit, cela reste tout de même du divertissement comique de haut de gamme.

En parlant d’auteurs fétiches, le dernier Sam Millar est sorti. Ça s’appelle Le cannibale de Crumlin Road de Sam Millar (Seuil), c’est la suite des Chiens de Belfast. Et on se retrouve avec une enquête avec des scènes incroyablement visuelles comme seul Sam Millar est capable de les écrire aujourd’hui. C’est noir, c’est fort, c’est bon.

En parlant de roman noir, du coté violent, A mains nues de Paola Barbato (Denoël Sueurs froides) est un premier roman impressionnant, à la fois un roman d’initiation et un roman de survie. Psychologiquement impeccable, visuellement très réussi, On s’attache au personnage principal et on est surpris par le dénouement … jusqu’à la dernière ligne.

En proie au labyrinthe : La lutte de Marek Corbel (l@ liseuse) est le premier tome d’une trilogie. Si ce n’est pas à proprement parler un polar, on a affaire à un vrai roman politique d’anticipation qui met à la bouche pour la suite, une sorte d’entrée dans un menu dont on attend avec impatience le plat de résistance.

Le titre de chouchou du mois revient donc ce mois ci à un roman exceptionnel à la fois par son intrigue simple mais aussi à son ambiance des campagnes, qui le sort du lot par ses qualités d’écriture véritablement hors du commun. Il s’agit, bien sur, de Grossir le ciel de Franck Bouysse (manufacture de livres), l’un des romans noirs qui littérairement m’a le plus impressionné récemment. Et, bien entendu, je suis d’ors-et-déjà parti à la recherche des précédents livres de l’auteur. Comme quoi …

Je vous donne donc rendez vous le mois prochain et, en attendant, n’oubliez pas le principal, lisez !

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Au fer rouge de Marin Ledun (Ombres noires)

Après L’homme qui a vu l’homme, Marin Ledun nous offre à nouveau avec ce roman une histoire speedée, qui se passe dans le pays basque. Même si ce n’en est pas réellement la suite, Au fer rouge fait référence à ce qui se passe dans le précédent roman. Et cela tombe bien, L’homme qui a vu l’homme vient de sortir en format poche. Donc, un conseil : Achetez les deux romans … et lisez les l’un à la suite de l’autre.

Le type est jeune ; c’est son anniversaire aujourd’hui. Alors, avec cette affaire, il va se faire du pognon et pouvoir fêter ça en grandes pompes à Madrid. Le type est espagnol, et, avec ses deux potes, roule en direction de la France, avec à bord de la Mondeo une centaine de kilos de cocaïne. Sauf qu’à l’arrivée, ils sont accueillis par quatre types cagoulés, qui vont récupérer la drogue et garder le fric pour eux. Lui finira dans une valise comme ses potes, jetés en pleine mer.

Sur les 3 valises, une seule est rejetée par la mer et retrouvée par la police. L’équipe de Meyer est chargée de l’enquête. Avec la lieutenante Emma Lefebvre et le lieutenant Garnier, ils vont démêler le sac de nœuds de cette histoire fictive mais pas trop. Car Le lieutenant Garnier est un flic qui a participé à l’assassinat des trois jeunes ; il sait que la moitié de la cocaïne a disparu ; il sait qui est à la tête du gang. La lieutenante Emma Lefebvre, quant à elle, a été une victime rescapée des attentats de Madrid en 2004 et est très motivée à l’idée de découvrir des terroristes de l’ETA.

En parallèle de cette affaire, nous suivons l’itinéraire de Javier Cruz, ancien membre de la cellule anti-terroriste espagnole, et en posté en France. La distance est faible entre le bien et le mal. Il sait que l’on peut se faire beaucoup d’argent avec la drogue et par la même occasion museler les velléités d’indépendance en inondant le pays basque de cocaïne. Il va utiliser ces 50 kilos à cette fin, en même temps qu’il va investir dans l’immobilier, aidé en cela par de grands pontes français.

Si vous avez lu, si vous avez aimé L’homme qui a vu l’homme, alors vous allez adorer Au fer rouge. Car si ce roman ne se veut pas une suite, il s’inscrit tout de même dans la continuité, dans les mêmes lieux géographiques, dans la même bourbe. Et vers le milieu du livre, on reparle des deux journalistes du précédent opus en dévoilant la fin. Surtout, je trouve que Marin Ledun a trouvé un style, une façon de couper ses intrigues, de pousser ses personnages, de décrire leur psychologie qui fait que ses romans sont passionnants.

Avec ses chapitres courts, cela va vite. C’est un roman d’enquête et malgré cela, cela court à une vitesse folle. Il y a une petite dizaine de personnages et malgré cela, on suit chacun d’entre eux avec une facilité déconcertante. Et surtout, Marin Ledun n’en rajoute pas, son style est d’une efficacité prenante, et on a l’impression que chaque phrase apporte quelque chose à l’intrigue. Bref, il est impossible de lâcher ce roman !

Et puis, même si Au fer rouge semble être une suite, pour moi, c’est surtout le roman où Marin Ledun enfonce le clou. Il va plus loin dans l’intrigue, il va plus loin dans la dénonciation, il va plus loin dans l’horreur. Tous les personnages sont tous bipolaires, flirtant avec les limites, oscillant entre le bien et le mal. Avec Marin Ledun, il n’y a pas d’innocents, seulement des victimes qui, à la fin, sont perdantes. Il clame haut et fort pourquoi et comment dans un pays en guerre la ligne de démarcation entre le bien et le mal a disparu. Et il le fait d’une excellente manière !

J’écrivais sur son précédent roman : « D’ailleurs, de tous ceux que j’ai lus de cet auteur, L’homme qui a vu l’homme est incontestablement le meilleur de son auteur … jusqu’au prochain. » Avec Au fer rouge, Marin Ledun semble avoir trouvé son style, son rythme, son sujet, sa croix. S’il est plus ou moins la suite du précédent, Au fer rouge enfonce le clou de belle manière. C’est passionnant en mieux. Mais où Marin Ledun va-t-il s’arrêter ?

Je me dois de signaler un article que j’ai trouvé sur le Net qui est passionnant chez Eklektika : http://www.eklektika.fr/au-fer-rouge-entretien-avec-marin-ledun-il-suffit-dimaginer-le-pire/

A mains nues de Paola Barbato (Denoël Sueurs froides)

Conseillé par mon ami Richard, conforté par le billet de Jean Marc, j’ai donc lu ce roman, dont le sujet, bien noir, me semblait bien violent pour me convenir parfaitement. Finalement, il m’aura fallu à peine trois jours pour avaler ces 480 pages. Quel livre !

Davide est un jeune homme de 16 ans, de bonne famille, dont le père est notaire, et qui fête son anniversaire en compagnie de nombreux amis dans une grande propriété. Alors qu’il sort dans la nuit, pour pisser, on lui met une cagoule sur la tête et on l’enferme à l’arrière d’un camion. Dans le noir, il ressent une présence. Soudain, l’autre se jette sur lui, le frappant sans raison. Alors qu’il envisage de se laisser faire, son instinct de survie le fait réagir et il tue son premier adversaire. Reclus de fatigue, il s’effondre.

Il se réveille dans une pièce avec d’autres personnes. La tristesse l’emporte et il fond en larmes. Les autres, très musclés se désintéressent de lui, sauf un, qui va l’endurcir et le considérer plus comme un compagnon que comme un ami. Il va lui apprendre qu’ils sont des combattants, des gladiateurs modernes. Ils doivent tuer pour ne pas mourir. Les entrainements se déroulent dans un camion, mais les matches se déroulent en public.

Il semblerait que le responsable de ce centre de détention s’appelle Minuto. Celui-ci a la soixantaine, mais sa démarche à elle seule impressionne. Il va agir avec plus d’attention envers Davide qu’avec tous les autres. IL va apprendre à Davide comment juger les coups, comment jauger les adversaires, comment tuer à mains nues.

Ce roman est divisé en trois parties. La première raconte l’éducation de Davide et occupe les trois quarts du livre. Les deux dernières parties racontent … mais chut ! Il est bien difficile de parler de ce roman, car aussi bien la quatrième de couverture que le résumé du début que je viens de faire peuvent donner une fausse idée de ce que contient réellement ce roman. Donc, je vais plutôt vous décrire mes impressions de lecture.

Tout d’abord, si on ne m’avais pas conseillé ce livre, je ne l’aurais pas lu. Parce que, quand on entend ici ou là que c’est un roman du niveau de Fight Club, je suis du genre à préférer rester sur l’original plutôt que de lire une copie. La moindre des choses que je puisse dire, est que l’on rentre très vite dans le vif du sujet, car au bout d’une trentaine de pages, Davide a déjà tué son premier adversaire. Et là, une bonne chose, la scène de combat est suffisamment tournée vers le personnage de Davide pour ne pas être explicitement violente. Malgré cela, je vous l’avoue, c’est violent, très violent, mais surtout très bien écrit … et traduit.

Davide se réveille donc dans une sorte de cave. A partir de ce moment, le roman ressemble plus à un huis-clos. Et l’histoire avance forcément avec beaucoup de dialogues et de petites scènes. L’auteure prend son temps pour installer les psychologies des personnages. Je ne vous cache pas que je me suis demandé deux ou trois fois si je n’allais pas arrêter ma lecture, parce que je ne voyais pas où on voulait m’emmener. Mais quelque chose dans le style, dans la construction des scènes a fait que je me suis trouvé accroché, à tel point que j’enfilais les pages sans m’en rendre compte. Au bout d’une journée, j’avais lu 230 pages ! Et passé une nuit amputée de la moitié de mes heures de sommeil.

Dans cette première partie, nous allons assister à l’évolution de Davide, du désespoir initial à la construction d’un assassin, à la fois aidé par son collègue de cave Rafaelo, à la fois éduqué par Minuto son maître. Si je l’appelle maître, c’est parce que les hommes enfermés dans la cave sont appelés des chiens. Ces chiens sont devenus des gladiateurs modernes, combattant dans des arènes pour que des gens nantis puissent profiter du spectacle et parier sur son issue. Nous passons de longues heures dans la cave, sans avoir l’impression que les scènes se répètent et nous assistons à des combats (voire nous participons) à des combats sanglants, dont la force visuelle est et hallucinante et frappante et choquante.

Dans la deuxième partie, Davide sort (et en disant cela je ne dévoile rien de l’intrigue) et c’est la partie que j’ai trouvé la moins intéressante. Puis dans la troisième partie, Paola Barbato se renouvelle d’une façon particulièrement vicieuse et visuellement stressante, pour arriver à un final qui va vous surprendre … jusqu’à la dernière ligne. Et je peux vous assurer que cela n’est pas exagéré, tout se passe réellement dans la dernière phrase !

On pourrait trouver de nombreux messages dans ce roman, le lire à plusieurs niveaux. On peut y trouver une dénonciation du tout spectacle sans limites, ou bien une métaphore de la société où il faut tuer pour progresser. Ou même se demander si l’auteure n’interroge pas sur les origines du mal, sur la naissance d’un assassin. Personnellement, j’avoue que certaines phrases m’ont fait me poser des questions, mais sans plus. Je préfère voir ce roman comme un grand spectacle remarquablement construit, à l’écriture addictive, qui comporte des personnages et des scènes qu’il me sera bien difficile d’oublier. La seule mise en garde que je ferai, c’est : Attention ! Des scènes peuvent choquer des personnes sensibles. Vous êtes prévenus : ça va faire mal !

 Et un grand merci à Coco pour le prêt !

L’information du mardi : Points Policiers a 35 ans

2015 va être l’année des anniversaires. La collection Policier des éditions Points fête en cette année ses 35 ans, déjà ! Alors pour l’occasion, ils sortent en édition limitée 9 romans cultes, ou devrais-je dire 9 grands succès passés et à venir. A mon avis, un de ceux là est culte uniquement parce que c’est le premier roman sorti par Sonatine. Il y en a un que je n’ai pas encore lu. Et tous les autres sont extraordinaires. Avec leur couverture pastel aluminium remise au gout du jour (cela veut dire moderne), si vous cherchez à lire des incontournables, piochez donc dans cette liste :

 

La griffe du chien de Don Winslow :

Griffe du chien

Art Keller, le « seigneur de la frontière », est en guerre contre les narcotrafiquants qui gangrènent le Mexique. Adán et Raúl Barrera, les « seigneurs des cieux », règnent sans partage sur les sicarios, des tueurs armés recrutés dans les quartiers les plus démunis. Contre une poignée de dollars et un shoot d’héroïne, ils assassinent policiers, députés et archevêques. La guerre est sans pitié.

Né à New York en 1953, Don Winslow a été détective privé avant de devenir un auteur majeur du thriller américain. Il a reçu le Shamus Award à deux reprises et a été plusieurs fois adapté à Hollywood.

« Un roman magistral sur la guerre américaine contre les narcotrafiquants sud-américains, mêlant fiction et réalité des trafics, guerre intestines, corruptions mutuelles… » Bibliosurf.com

 

Pimp de Iceberg Slim :

Pimp

Robert Beck, jeune vaurien de Milwaukee, n’a qu’un rêve : devenir le plus grand mac des États-Unis. De 1940 à 1960, il devient Iceberg Slim, patron d’un harem et maître du pavé de Chicago. Impitoyable et accro à la cocaïne, il est toujours à la recherche d’une proie à envoyer sur le trottoir. Plein de sueur, de sexe et de violence, ce document unique sur les bas-fonds de l’Amérique, est un livre culte.

Robert Beck (1918-1992), alias Iceberg Slim, célèbre proxénète de Chicago dans les années 1940 et 1950, a publié plusieurs romans largement inspirés de sa vie, dont Pimp, Trick Baby et Mama Black Widow, qui constituent une « trilogie du ghetto » unique dans la littérature américaine.

« Fascinant. » Le Figaro Magazine

 

La femme en vert de Arnaldur Indridason :

Femme en vert

Dans un jardin sur les hauteurs de Reykjavik, un bébé mâchouille un objet étrange… Un os humain ! Enterré sur cette colline depuis un demi-siècle, le squelette mystérieux livre peu d’indices au commissaire Erlendur. L’enquête remonte jusqu’à la famille qui vivait là pendant la Seconde Guerre mondiale, mettant au jour les traces effacées par la neige, les cris étouffés sous la glace d’une Islande sombre et fantomatique…

Né en Islande en 1961, journaliste et critique de cinéma, Arnaldur Indridason est l’auteur de romans noirs, dont La Cité des Jarres, également en Points.

« Explorateur des angles morts de l’humanité, Arnaldur Indridason toque doucement à la porte de nos consciences. La douleur est cuisante. » Le Magazine littéraire

Necropolis de Herbert Lieberman :

Necropolis

New York, la « cité des morts », regorge de crimes atroces et de fous dangereux. Paul Konig, médecin légiste, règne sur une morgue où défilent cadavres, enquêteurs et familles en deuil. Autopsiant, disséquant, analysant chaque indice sur les macabres dépouilles qui lui sont confiées, il observe la terreur qui baigne la ville… Une ville dans laquelle sa fille, Lolly, a mystérieusement disparu depuis quelques mois.

Herbert Lieberman atteint le sommet du roman noir – âmes sensibles s’abstenir.

Auteur de nombreux polars publiés en Points, Herbert Lieberman obtient le Grand Prix de littérature policière en 1978, pour Nécropolis.

« Le style envoûtant d’un grand écrivain. » Télérama

La compagnie de Robert Littell :

Compagnie

Dans ce redoutable thriller politique, Robert Littell restitue un demi-siècle de notre histoire. Entre fiction et réalité, personnages fictifs et figures historiques (Kennedy, Eltsine, mais aussi Ben Laden), il dévoile les mécanismes et les dérapages de l’une des organisations les plus tristement célèbres au monde, la CIA.

Un roman d’espionnage magistralement orchestré, qui place Littell aux côtés des maîtres du genre.

« Éblouissant d’ambition, La Compagnie est à la CIA ce que Le Parrain fut à la Mafia. » Télérama

Romanzo Criminale de Giancarlo De Cataldo :

Romanzo Criminale

Le Libanais, le Froid, le Dandy, le Buffle, Patrizia : une belle brochette de malfrats a fait main basse sur Rome à la fin des années 1970. Pendant vingt ans, la « bande de la Magliana » mettra la capitale en coupe réglée. Loge P2, terrorisme noir, assassinats, corruption de politiciens, services secrets ? rien ne lui échappe. Un roman épique passionnant sur l’une des plus puissantes organisations criminelles jamais démantelées en Italie.

Giancarlo De Cataldo est juge auprès de la cour d’assises de Rome, où il vit depuis 1973. Il est également journaliste, essayiste, romancier, scénariste et auteur de pièces de théâtre. Romanzo criminale a été porté à l’écran par Michele Placido.

« Voici le grand livre d’une certaine Italie. » Les Inrockuptibles

La cinquième femme de Henning Mankell :

Cinquième femme

Les victimes sont des hommes ? Empalés, étranglés, noyés. Ils n’ont rien en commun, mis à part peut-être leur brutalité. Et leur mystérieux bourreau, obsédé par son désir de vengeance. Wallander doit se hâter pour empêcher un autre meurtre tout aussi barbare.

« Du très grand art. » Télérama

Un sur deux de Steve Mosby :

Un sur deux

Vaut-il mieux mourir ou condamner l’autre à la mort ? Avant d’en tuer un sur deux, un serial killer torture les couples qu’il séquestre : à eux de décider. Jodie vient de tromper Scott et se sent coupable, de son côté, il recense cinq cents raisons de l’aimer. Ils sont enlevés. L’inspecteur Mercer n’a que quelques heures pour les retrouver avant qu’ils ne craquent. Et vous, que feriez-vous ?

Steve Mosby est né en 1976 à Leeds. Jeune écrivain surdoué, comparé à Dennis Lehane et à Michael Connelly, Un sur deux est son premier roman traduit en français. Il est également l’auteur de Ceux qu’on aime.

« Si vous ne lisez pas Steve Mosby cette année, vous y viendrez de toute façon dans les années à venir, alors faites-vous plaisir, commencez dès maintenant ! » Morning Star

Les soldats de l’aube de Deon Meyer :

Soldats aube

Zet Van Herden a quitté la police, rongé par le remords depuis la mort de son coéquipier. Il ne trouve de répit qu’en mitonnant des mets savoureux, sur des airs d’opéra. Lorsqu’une avocate lui propose de retrouver le testament d’un antiquaire nommé Smit, torturé puis assassiné, Zet ouvre un œil… puis deux. Le jeu de piste vire rapidement au cauchemar.

Né en 1958 en Afrique du Sud, Deon Meyer a grandi dans une ville minière de la Province du Nord-Ouest. Ancien journaliste, puis rédacteur publicitaire et stratège en positionnement Internet, il est aujourd’hui l’auteur unanimement reconnu de best-sellers traduits dans 15 pays.

Le cannibale de Crumlin Road de Sam Millar (Seuil)

Deuxième enquête de Karl Kane (Franchement, quel nom génial pour un détective privé, un nom qui claque comme deux coups de revolver !) après Les chiens de Belfast, Sam Millar continue son cycle dédié à son nouveau personnage.

Karl Kane, qui est détective privé à Belfast, a une relation avec sa secrétaire Naomi. Alors qu’ils s’apprêtent à sortir, une jeune femme demande à le voir. Elle s’appelle Geraldine Ferris, a 17 ans, et s’inquiète de la disparition de sa sœur Martina, qui n’a plus donné signe de vie depuis plusieurs jours. Certes, Martina est une junkie, placée dans un centre d’accueil pour des gens sans domicile, elle est coutumière de fugues. Mais son absence de contacts est très inquiétante.

En cette période estivale, Karl est à la peine avec ses hémorroïdes. Sa visite au centre d’accueil ne donne rien, et sa visite au commissariat n’est pas plus engageante. Son beau-frère, par ailleurs à la tête de la police, lui signale deux meurtres de jeunes filles. Les corps retrouvés ne correspondent pas à Martina et heureusement pour Karl : des organes ont été enlevés des corps, comme l’aurait fait un boucher.

Alors que les corps de jeunes filles s’accumulent, martyrisés d’une façon toute aussi horrible, Karl va poursuivre l’enquête de son coté et être confronté à des événements qui vont le toucher de près, de trop près.

Si de prime abord, on peut penser que ce personnage n’est pas nouveau, je répondrai qu’en tant que lecteur, j’adore lire des enquêtes de détective privé, car ils sont à la fois dans le système par leur façon de résoudre les énigmes, mais aussi en dehors du système par le fait qu’ils ne sont pas obligés de respecter certaines règles auxquelles les policiers sont soumis. Et la démonstration est éloquente dans cet épisode.

On en apprend beaucoup plus sur la psychologie de Karl Kane dans cet épisode : Il est très attaché à sa fille et en veut énormément à sa femme depuis leur séparation. D’ailleurs, on va apprendre pourquoi. Et puis, il est attaché à Naomi comme un naufragé à sa bouée, même s’il garde ses secrets, sa petite vie, et qu’il ne lui dit pas tout. Pour mener ses investigations, il utilise beaucoup ses contacts à la police, s’en créé de nouveaux, mais sa principale source de progrès est surtout son intuition. Enfin, il respecte la police et la loi ; il suit le système judiciaire, jusqu’à un certain point, quand il juge que cela ne va pas assez vite. Pour autant, Sam Millar ne veut pas insérer de message dans son roman, mais il a posé les bornes de son personnage.

Il faut signaler que c’est un épisode violent, sans pour autant être démonstratif ou gratuit. Karl Kane est tout de même un personnage qui voyage dans une société de plus en plus violente, et il réagit par rapport à celle-ci. Ce qui démarque ce roman des autres du genre, ce sont ces dialogues fantastiques de naturel et ces scènes chocs inoubliables et j’en citerai trois sans pour autant vous donner le dénouement du livre : la visite dans le cinéma où Karl va, dans le noir, faire une visite des plus inquiétantes, le final éblouissant dans un lieu inimaginable et je peux vous dire que la tension est intenable, ou même la scène avec Ivana qui est plus intimiste, presqu’uniquement menée par des dialogues et fondante d’humanité.

La dernière chose que je voulais signaler est le titre français. Je trouve qu’il en dit peu et trop à la fois. Je le trouve surtout trop racoleur, alors qu’il n’y a dans le livre aucune scène gore. Le titre original The Dark Place (que l’on pourrait traduire par L’endroit sombre) est à mon avis bien meilleur et aurait mérité d’être utilisé. Bref, je conclurai par une affirmation : Je serai un lecteur assidu de la prochaine enquête de Karl Kane.

Ne ratez pas les avis de l’ami Claude et Unwalkers

Le bazar et la nécessité de Samuel Sutra (Flamant noir)

Quatrième aventure de Tonton, ce roman humoristique est aussi un événement, puisque notre gentleman cambrioleur, au bord de la retraite, va se trouver affublé d’un fils. Et pas n’importe quel fils …

Alors qu’il était en train de travailler dans sa gigantesque propriété sise sur les bords de la Marne, c’est-à-dire qu’il était allongé dans le jardin en train de se faire faire les pieds par sa domestique Donatienne, une lettre est arrivée à le faire taire, que dis-je, est arrivée à le laisser ébahi. A tel point qu’il est en resté bouche bée, laissant s’écouler quelques larmes de bave dans sa cuvette.

A ce moment là, Gérard déboule dans sa Mercedes et un superbe dérapage non contrôlé, pour faire part à Tonton qui est aussi son oncle, de son prochain coup. Il trouve Tonton dans un état catatonique inquiétant, et le contenu de sa lettre est sans équivoque : Tonton a un fils. Une larme point au coin de l’œil de l’illustre dérobeur de biens.

Ils s’en vont voir Marylou Bresson, la mère du fils prodigue, qui lui apprend que ce dernier est flic et qu’il rêve de serrer son père. Les rêves de Tonton s’écroulent comme un château de cartes mal monté, et le coup proposé par Gérard va lui donner l’occasion de donner une leçon à son fils. On n’arrête pas aussi facilement un virtuose du vol de haut vol. Ils vont donc monter un coup pour dérober les joyaux du Maharadja Janaydjamarh.

Sur Black Novel, je vais continuer à chanter (même si je chante faux) les louanges de Samuel Sutra. Car je considère cet auteur comme étant à ce jour l’un des auteurs les plus doués de sa génération. Il est, en effet, capable de se fendre d’une série comique à mi-chemin entre Dortmunder et Les tontons flingueurs et en même temps écrire de merveilleux romans noirs subtils comme Kind of Black. Bref, je vais continuer à parler de Samuel Sutra, car c’est un auteur rare et trop injustement inconnu.

Dans ce nouvel épisode de Tonton, Tonton a affaire avec un fils, qu’il a eu lors d’un épisode oublié, presque une erreur. Et comble de malchance, ce fils est flic. Évidemment, tout ceci n’est pas sérieux, et ce n’est pas le principe de cette série. Prenez un génie de la cambriole, un de ceux qui sont capables de dérober un joyau sans effusion de sang ; Affublez le d’une bande de tarés mous du bulbe et vous aurez la base de la série. D’ailleurs, le moins débile de la bande est aveugle, c’est vous dire …

Si le scenario de ce nouvel épisode est toujours aussi bien construit, tout en restant assez simple (car il ne faut pas non plus se prendre la tête, c’est de la grande littérature de divertissement), j’ai ressenti à sa lecture une sorte de retenue de la part de l’auteur. On n’y retrouve pas l’humour déjanté de l’épisode précédent mais plutôt de l’humour drolatique basé sur des phrases longues issues d’un autre temps. Et cela me fait toujours aussi rire.

On y retrouve aussi des maximes en début de chaque chapitre, qui sont autant de vérités hilarantes, que l’on devrait lire et relire chaque matin. Telle celle là : « Je ne remets jamais à demain ce que je peux me permettre de ne pas faire du tout. » ou bien celle-ci : « L’abus d’alcool est dangereux. Surtout pour la santé de ceux qui me parlent mal quand je suis bourrée. ». Ou bien : « Un conseil, Gérard. Les femmes, n’essaie jamais de les convaincre. Attends juste qu’elles changent d’avis ».

Et puis il y a ces descriptions géniales qui, au passage, vous donneront une idée du style de ce livre. J’en veux de celle-ci qui montre l’arrivée de Tonton chez son amour de jeunesse et où on découvre la propriétaire des lieux :

« La porte se déverrouilla de deux coups de clefs retentissants et, à hauteur de regard … rien. Rien, car à son ancienne conquête, Tonton n’avais pas du faire chavirer que le cœur. Il avait du lui mettre la tête en bas une paire de fois, car la souris voyait le monde en contre-plongée et plafonnait à un timide mètre cinquante du sol. Taillée dans un bâton de sucette, elle devait chausser du 30, se fringuer au rayon layette de luxe et être passée reine dans l’art des nœuds marins à force de s’arrimer le sous-tif en lui faisant faire deux tours de poitrine. »

Génial, je vous dis.

L’information du mardi : Envie de polars ?

Voici quelques propositions de polars pour ceux qui seraient en recherche d’idées …

ZONE: Chroniques d’un dernier jour Tome 1 de Steeve Hourdé (ARK)

Thriller horrifique. Roman électronique ou roman papier

Zone

Septembre 2009, Ullapool, 6 morts. Octobre 2011, Mer du Nord, 38 morts. Août 2013, Skägen, 72 morts. 8 Septembre 2015, Folkestone. Les troupes du Major Kieran Wallace prennent position. Personne n’entre, personne ne sort. Zone est un thriller sombre construit sous la forme d’un huis-clos à la mécanique implacable, dans lequel un ensemble de personnage sera confronté à une catastrophe terrifiante. Un seul choix: survivre. Une seule question: comment? OSEREZ-VOUS PÉNÉTRER DANS LA ZONE?

Palissade de Franck Villemaud (Taurnada éditions)

Roman à suspense déjanté. Roman électronique et papier

Palissade

À sa sortie de l’hôpital psychiatrique, où il a séjourné un temps suite à une séparation douloureuse, Fred emménage dans une petite maison en arrière d’un immeuble, avec pour unique voisin Roland, ancien légionnaire d’une cinquantaine d’années. Sur fond d’alcool et de rock’n’roll, une amitié trouble et déjantée va alors se nouer entre eux, dans le décor inamovible de leur cour commune que divise une vieille palissade en bois. Jusqu’à ce que le passé s’invite à la fête…

L.A. pour les intimes de David Guinard (Librinova)

Polar. Roman électronique

LA pour les intimes

Dix ans déjà que David Marquan a fui son passé et la France pour s’exiler à Los Angeles. Devenu un « privé » spécialisé dans les relations extraconjugales, il est aussi écrivain le dimanche, et se prend à rêver, parfois, d’une vie mouvementée, digne de son héros de papier. Et puis un jour, une femme vient le trouver pour une enquête banale : un mari volage qu’il s’agit de pister. Oui mais voilà : l’homme disparaît, et ne réapparaît qu’une fois suicidé dans d’étranges circonstances, celles d’une affaire vieille d’un an !

Marquan prend sur lui de résoudre l’affaire. Il n’a aucun indice tangible, aucune piste sérieuse, seulement cette intuition : chercher la femme… Cette femme, serait-ce Deborah McClure, épouse du sénateur et amante du mari suicidé ? L’hypothèse est… séduisante.

N’aie plus peur de Bernard Florentz (Librinova)

Roman humoristique. Roman électronique

Plus peur

Que sont-ils devenus ? Telle était la question qui taraudait René Lallemend, éditeur et cancéreux du foie au stade terminal. Que sont devenus les morts une fois morts ? Lui qui avait mis le grappin sur le marché du livre ésotérique, lui qui aurait dû, plus que tout autre, avoir des réponses, le voilà terrorisé rien qu’à penser à l’au-delà. Toutes les foutaises métaphysiques qu’il avait publiées, de toute façon, il n’y avait jamais cru. Par contre Aurélien, son frère aîné, devait savoir. Car ce grand voyageur, ce penseur autrefois acclamé, cet homme devenu secret allait mourir aussi… mais il était serein, et cette tranquillité était louche : c’était sûr, il avait un secret, le secret : celui de l’immortalité !

C’est animé par ce dada insensé, tout environné par une étrange nuée de mouches et de corneilles, que René s’est dirigé vers la maison de retraite d’Aurélien : il allait lui extorquer la vérité. Et rien ne pourrait l’arrêter ! Ni sa propre mort, ni celle de son frère, encore moins le meurtre de son neveu stupide, de son ancienne amante, ou d’un banquier anglais ruiné par une secte de barbouzards.

Grossir le ciel de Franck Bouysse (Manufacture du livre)

J’en avais beaucoup entendu parler, de ce roman, pour ses qualités stylistiques. Et pour ne pas gâcher mon plaisir, je l’ai pris sans regarder la quatrième de couverture. Je peux vous dire que ce roman est excellent, excellent, excellent.

« C’était une drôle de journée, une de celles qui vous font quitter l’endroit où vous étiez assis depuis toujours sans vous demander votre avis. Si vous aviez pris le temps d’attraper une carte, puis de tracer une ligne droite entre Alès et Mende, vous seriez à coup sûr passés par ce coin paumé des Cévennes. Un lieu-dit appelé Les Doges, avec deux fermes éloignées de quelques centaines de mètres, de grands espaces, des montagnes, des forêts, quelques prairies, de la neige une partie de l’année, et de la roche pour poser le tout. Il y avait aussi des couleurs qui disaient les saisons, des animaux, et puis des humains, qui tour à tour espéraient et désespéraient, comme des enfants battant le fer de leurs rêves, avec la même révolte enchâssée dans le cœur, les mêmes luttes à mener, qui font les victoires éphémères et les défaites éternelles. »

Dans ce paysage perdu des Cévennes, deux hommes, Gus et Abel. Ils vivent tous les deux seuls, chacun dans leur coin. On est en janvier 2006, il fait froid, la terre est recouverte de neige et l’Abbé Pierre vient de mourir. Gus est en chasse avec son chien Mars. Un coup de feu déchire le silence des bois, puis un cri retentit. Il n’est pas sur de vouloir savoir d’où cela vient … cela attendra demain …

Il faut se laisser porter par le style de l’auteur, et apprécier ce ton bourru qui va nous accompagner tout au long de ce roman. Et je dois dire que c’est une sacrée découverte personnelle que ce roman, tant le rythme lancinant se fait calme, agrémenté de l’élevage des bêtes et des activités champêtres. Cela sent bon le cru, la campagne perdue où le téléphone n’arrive pas encore dans ces maisons isolées, perdues au milieu des bois. On y part à la chasse avec le chien, dans ce paysage enneigé, pour trouver la nourriture du jour. On va voir le voisin, et on partage le vin de bienvenue, même si ces gens-là ne sont réellement accueillants.

Il y a bien des gens qui passent pour vendre qui des bibles qui des choses dont on n’a pas besoin. On peut dire que Gus sait les recevoir. Car en plus d’être un bon éleveur, il a de la répartie, le Gus. Et on trouve là des scènes fort drôles qui aboutissent au découragement du visiteur. Mais il ne faut pas se mentir, ce roman est un roman noir, dont le fil dramatique va se construire doucement pour arriver à un dénouement à la fois inattendu et violent. Certains pensent que seuls les Américains savent écrire sur la nature et la dureté de la vie à la campagne. Erreur ! Ce roman est formidable, dur, âpre, et original.

Si on a l’impression de se laisser mener, dans cette visite de nos campagnes, c’est pour mieux se faire surprendre par les personnalités de ce roman. Ces hommes sont bourrus, mais pas dénués d’humanité quand il s’agit de se donner un coup de main. Ils ne sont pas attachants, mais ils savent se débrouiller au milieu d’une nature hostile. Et du style aux personnages, ce roman forme un ensemble cohérent et surtout un suspense prenant à propos duquel vous parlerez longtemps. Je suis sur que c’est un roman qui fonctionnera longtemps grâce au bouche à oreille car c’est un roman hors du commun, impressionnant de maitrise qui vous fera voir différemment nos vertes contrées.

Chronique virtuelle : En proie au labyrinthe – tome1 La Lutte de Marek Corbel (L@ Liseuse)

Marek Corbel, on en avait parlé à l’occasion de la lecture de Concarn’Noir, ce roman policier et politique qui se passait dans une petite ville française qui ressemblait à Concarneau. On y avait droit à toutes les petites magouilles pour obtenir une once de pouvoir politique.

Dans ce premier tome d’une trilogie annoncée, Marek Corbel abandonne l’aspect roman policier pour faire un roman purement politique, situé dans un futur proche, en 2016.

Quatrième de couverture :

Février 2016.

Dans une France gréviste en pleine crise sociale et politique, un collectif entend participer de manière décisive, à la manifestation parisienne monstre qui s’annonce contre les dernières décisions économiques gouvernementales.

Face à ce tumulte inédit, une brigade de la DGSI, en proie aux luttes politiques intestines, s’emploie à contenir le déferlement de colère s’exprimant, plus ou moins violemment, sur les pavés de la capitale.

C’est sans compter les intérêts du Cartel Européen, dont le président entend jouer sa propre carte politique dans ce chaos hexagonal.

L’heure n’est-elle pas venue de mettre définitivement en coupe réglée cette république réfractaire aux directives ?

En proie au labyrinthe, à travers la description de cette journée où tout va basculer, revient tout au long du roman sur la préparation sinueuse d’un coup d’État aux contours prétendument démocratiques.

Mon avis

Les lecteurs de polars vont être surpris, alors il vaut mieux que je vous prévienne : ce roman n’a rien d’un polar, il flirte plutôt avec le pur roman politique. D’un coté, on y trouve Arno Pagani, membre d’un collectif qui en a ras le bol de la situation économique qui se dégrade en France, et qui décide de porter le coup de grâce à ce gouvernement de fantoches, dirigé par le président Govin. De l’autre, le Cartel, sorte d’hydre de Lerne, qui dirige les pays européens et à la tête duquel trône Jan Herrero de la Pena. Ce dernier veut une bonne fois pour toute faire plier la France à ses bons vouloirs. La grande manifestation qui s’annonce est une bonne occasion pour mettre la main sur ce pays récalcitrant.

Si ce roman est évidemment une création, si les personnages sont inventés, on y reconnait pas mal de gens que l’on voit à la télévision. Ou du moins, on y décerne ce que l’auteur en lit, et c’est une forme de jugement en règle sur le système politique en place, et les luttes de pouvoir au détriment du peuple dont on n’entend pas, dont on ne veut pas entendre qu’il gronde. Le décalage entre les gens d’en bas et les gens d’en haut est d’ailleurs bien montré et un des points forts de ce roman.

Très centré sur les personnages, ce roman, fait de chapitres courts, présente les personnages et leur passé. Marek Corbel se permet en effet de faire des flashbacks pour détailler leur passé et ainsi présenter les psychologies, comme un combat de boxe. Il faut dire que si les scènes sont essentiellement basées sur les dialogues, fort bien construits, il y a très peu de descriptions de lieux.

Et c’est un peu ce qui m’a manqué. Je n’ai pas ressenti la rue qui gronde, les manifestants qui défilent, à opposer au calme des bureaux des dirigeants. De même, on s’attend à une scène finale pleine de bruit, emplie de violence et elle se termine calmement, sans heurts. Pour moi, je trouve que ce roman est plus une mise en bouche qu’un plat principal. Et comme c’est le premier tome d’une trilogie, l’attente est grande et pleine d’espoir pour la suite. A suivre, donc …

L’homme qui a vu l’homme de Marin Ledun (Ombres noires)

Séance de rattrapage pour ce roman dont tout le monde a vanté ses qualités à sa sortie. Et la seule question que je me pose est celle-ci : Comment ai-je pu attendre une année avant de l’ouvrir ? Vous avez compris, il vous faut impérativement lire ce roman, c’est une fantastique réussite.

Marin Ledun a décidé d’évoquer la situation du pays basque, et plus particulièrement celle des indépendantistes. L’action se situe au début du mois de janvier 2009. Jokin Sasco est un jeune homme qui s’arrête pour faire le plein dans une station-service. Cinq hommes cagoulés s’approchent et le kidnappent. Ils l’enferment dans un endroit sombre, une cave peut-être, et les séances de torture commencent. Au bout de quelques jours, Jokin craque, son corps ne suit plus, il ne dira pas que le coffre de sa voiture est plein de billets de banque, il meurt après d’atroces souffrances.

Fin janvier 2009. La sœur de Jokin, Eztia, et sa famille organisent une conférence de presse pour demander à ce qu’on le retrouve, ou au moins, que la police se mette à sa recherche. Un journaliste est dépêché sur place, il s’appelle Iban Urtiz, il n’est pas basque, ou si peu, seulement par son père. Il va prendre cette enquête à bras le corps, comme une croisade, la quête impossible de la vérité.

Iban Urtiz doit plus ou moins faire équipe avec un photographe, un gars du cru, Marko Elizabe. En réalité, Marko va vite expliquer à Iban qu’ils vont chacun faire leur chemin de leur coté. Marko ne travaille pas avec les erdaldun, les étrangers au Pays Basque. Et puis, il va falloir qu’il choisisse son camp. Mais quel camp ? Iban et Marko, chacun de son coté, n’ont aucune idée de l’engrenage dans lequel ils viennent de se fourrer.

Si Marin Ledun s’est emparé de l’affaire Jon Anza (je vous rassure, je ne suis pas du tout un expert des affaires basques ; ce serait plutôt le contraire ; j’ai pris cette information sur le blog de Petite Souris qui parle très bien de ce roman), il en a surtout pris le sujet central pour en faire un roman dopé aux amphétamines. Car, dès les premières lignes, le roman file, court, galope, comme s’il courait dans un labyrinthe. La seule différence, c’est que le lecteur y court les yeux fermés … enfin … juste un peu ouvert pour pouvoir lire, quand même.

Ce roman est certes un roman rapide, mais c’est aussi un roman écrit d’une plume maitrisée, qui nous offre d’innombrables scènes, dont aucune n’est inutile. Tout au long des 460 pages que comporte ce roman, j’ai été littéralement happé par l’histoire, et c’est uniquement quand je faisais une pause, que je me rendais compte de la magie du style de Marin Ledun. En cela, ce roman est un formidable divertissement … mais il offre plus que cela.

Car, derrière sa forme de roman à suspense, le sujet de fond est bien la cause basque, ou du moins, le questionnement sur les attitudes des terroristes ou des forces de police. Les personnages sont nombreux, et on ne sait plus à qui se raccrocher, mais il est une chose qui est inéluctable : Marin Ledun nous décrit un état de siège, un pays en guerre. Il n’y a pas de gentils ou de méchants mais des actes violents, très violents que leurs auteurs justifient par une obéissance au chef. Fichtre ! On finit par s’apercevoir qu’entre l’Eta, la police française ou espagnole, les forces anti-terrorisme françaises ou espagnoles, on a affaire avec les mêmes pourris. Et que quand ces gens là sont du bon coté de la loi, ils se permettent tout, voire même deviennent pires que ceux qu’ils chassent. Quand l’homme devient plus con que l’animal, l’horreur n’est jamais bien loin.

En cela, parce qu’il allie la forme et le fond, Marin Ledun nous construit un roman impressionnant, qu’il faut faut absolument lire, et nous donne envie d’en savoir plus sur ce conflit, sans en faire forcément un roman contestataire. D’ailleurs, de tous ceux que j’ai lus de cet auteur, L’homme qui a vu l’homme est incontestablement le meilleur de son auteur … jusqu’au prochain.