L’étrange histoire de l’ours brun abattu dans les quartiers espagnols de Naples de Antonio Menna (Liana Levi)

Au concours du titre le plus long, ce roman pourrait bien remporter la palme. Au concours du roman le plus drôle, il serait assurément bien placé. Alors que nombre de romans aux titres les plus farfelus les uns que les autres déferlent sur les linéaires des libraires, ce roman de Antonio Menna pourrait bien passer inaperçu. Ne vous y trompez pas, c’est un excellent roman qui vous fera passer par toutes les émotions possibles et imaginables.

Tony Perdudo est journaliste free-lance, quoique ! C’est plutôt un journaliste bas de gamme, à qui on demande de remplir les colonnes des chiens écrasés. D’ailleurs, en général, son nom est remplacé et son article réécrit. Ce matin là, à cinq heures du matin, il sort de chez lui pour se promener car il souffre d’insomnies. En plein milieu de la via Speranzella, il découvre un ours brun allongé.

Après quelques observations, il doit se rendre à l’évidence que l’ours est mort. Le petit quartier s’éveille doucement, et l’information circule vite. Il appelle son rédacteur en chef, qui lui demande de trouver un scoop sur cet ours brun, mort en pleine rue de Naples. Alors, il interroge les voisins, s’étonne que personne n’ait rien vu, rien entendu. Tony se demande ce qu’il va bien pouvoir trouver.

Du coté de la police, rien à signaler. Du coté des pompiers, rien à signaler. Il ne lui reste plus que son amie Marinella, qui est docteur. C’est elle qui autopsie la bête. Les premières constatations sont étranges : L’ours brun a été abattu de trois balles : deux dans le torse et une dernière en pleine tête. Cette méthode de meurtre correspond à ce que fait la mafia napolitaine pour punir les traitres. Tony tient son scoop. Il devrait se satisfaire de cette information mais de nombreux rebondissements vont l’obliger à se plonger dans cette enquête.

Il faut bien l’admettre, quand on suit une histoire, un personnage au profil de loser nous est forcément sympathique. Quand, en plus, il a de l’humour, le lecteur que je suis ne peut que se passionner pour ce qui va lui arriver. Le personnage de Tony Perdudo (dont le nom est proche de perduto qui veut dire perdu) est de ce point de vue exemplaire. La façon de raconter ses aventures est si réaliste que nous ne pouvons que courir après lui, en cherchant à comprendre cette histoire surréaliste et complètement loufoque.

Parmi les arguments de poids pour ce roman, il y a l’intrigue, qui va de rebondissements en rebondissements, qui nous balade d’une piste à une autre, sans que Tony ne soit jamais le maitre de la situation. A chaque fois qu’une hypothèse est avancée, tous les arguments font office de preuves, et la police est bien pressée de clore ce dossier qui finalement ne rime à rien. Et à chaque fois, une nouvel événement tombe qui replonge Tony au centre de cette enquête sans qu’il en soit l’instigateur. En ce sens, c’est très drôle, et surtout, on a l’impression d’être baladé comme une boule de flipper.

L’autre aspect que j’ai adoré est la description du quartier napolitain et de ses habitants. Antonio Menna fait la part belle aux personnages secondaires, et l’air de rien, nous présente subtilement des aspects de la vie quotidienne d’un petit quartier. De la concierge qui fait attention à tout aux étrangers qui transitent des paquets douteux, de la menace de la mafia aux policiers très indulgents, tous en prennent pour leur grade, sans pour autant que l’auteur adopte un ton agressif.

Et puis, il y a la fin, les cinquante dernières pages, qui une nouvelle fois font basculer l’intrigue vers une tension insoutenable. Ces dernières pages là, vous êtes obligés de les lire d’un coup. Et ceux qui ont peur du noir vont être servis. C’est aussi pour cela que j’ai adoré ce livre, cette facilité qu’a l’auteur d’aborder plusieurs genres, de jouer avec les codes pour finalement nous passionner quelque soit ce qu’il raconte. Ça doit être ça, le talent de conter une histoire, et Antonio Menna est un sacré conteur.

Ce roman a fait l’objet d’un coup de coeur de la part de l’ami Claude ici

15 réflexions sur « L’étrange histoire de l’ours brun abattu dans les quartiers espagnols de Naples de Antonio Menna (Liana Levi) »

  1. m’a l’air bien curieux ce bouquin ! du genre que j’aime ! Le problème par contre c’est que ma femme rêve d’aller en Italie, mais si même les ours risquent leur peau avec la Mafia, on va peut être y reflechir à deux fois avant de faire nos valises ! 🙂 très belle chronique en tout cas ! Amitiés

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    1. Salut Souriceau, ma foi, c’est le bouquin parfait pour apprécier les petits quartiers italiens. Plus que Carlotto qui est définitivement noir. C’est un roman décalé porté par son personnage et son ambiance. J’espère que c’est un personnage récurrent ! Très bon. Tu peux y aller. Amitiés

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  2. J’en avais entendu parler dans le lire « spécial polar » et j’avais noté le titre, d’ailleurs, j’ai du changer la cartouche d’encre de mon stylo, y’en avait pas assez pour arriver au bout du titre. 😀

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  3. Bonsoir mon ami,
    Si ce roman n’est pas fait pour moi, je n’y comprends rien. Y va pas falloir longtemps avant que je ne me le procure, nom d’un ours. Les éditions Liana Levi me semblent très attentives pour dégoter de petites perles. Je pense, entre autres, à « Un petit boulot » de Ian Levinson. La bise.

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