Le chouchou du mois d’octobre 2015

Honneur aux invités, donc honneur à Suzie qui en ce mois d’octobre, a chroniqué La défense de Steve Cavanagh (Bragelonne), un polar juridique dont le personnage principal, ancien voleur, va devoir sauver sa fille prise en otage par la mafia russe. C’est plein d’action, c’est divertissant et le final est explosif …

Dans le cadre de l’hommage à la Série Noire qui fête ses 70 ans, j’ai bénéficié des conseils avisés de Jacques-Olivier Bosco pour découvrir un super polar Pas de dragées pour le baptême de Jean Dorcino (Série noire). Il s’agit d’un polar étonnant, moderne, qui nous montre de formidables personnages, mais aussi l’ambiance du Paris des années 50.

J’aurais aussi continué à proposer les vendredis des romans au format de poche. J’ai donc parlé du formidable Et justice pour tous de Michael Mention (Rivages), qui est un roman noir dont on ne sort pas indemne tant sa lecture est dure. J’aurais aussi présenté Laissez toute espérance de John Connoly (Pocket), le deuxième tome des enquêtes de Charlie Parker qui nous plonge dans l’univers glaçant du nord des Etats-Unis.

Enfin, parmi les moyens ou grands formats, j’ai été étonné par les voyages que m’auront permis de faire mes lectures. Dans Le crime de Julian Wells de Thomas H.Cook (Seuil), nous aurons parcouru le monde à la recherche d’une explication du suicide de Julian Wells, avec toute la subtilité dont cet auteur est capable. Nous serons partis du coté du Gabon, avec Les voleurs de sexe de Janis Otsiemi (Jigal), où cet auteur que j’adore nous présente une autre facette de son pays, entre superstitions et modernité. Nous serons partis du coté du Vietnam, avec Personne ne court plus vite qu’une balle de Michel Embarreck (Archipel), un pur roman d’aventures qui ressemble à s’y méprendre à un hommage non dissimulé aux aventures de Bob Morane et Bill Ballantine. Puis nous serons partis dans le Nord, en Suède plus exactement, pour un roman policier psychologique passionnant avec Les noces perdues de Anna Jansson (Toucan) .

N’oublions pas la France, avec la dernière enquête en date du capitaine Mehrlicht dans Sans pitié ni remords de Nicolas Lebel (Marabooks), qui est un mélange d’enquête et d’action et qui fait encore une fois la part belle aux envolées lyriques de cet excellent personnage.

Le titre du chouchou revient donc fort logiquement à Nid de vipères de Edyr Augusto (Asphalte), pour son sujet, ses personnages, et l’originalité de sa forme, sorte de puzzle passionnant et à l’intrigue à perdre haleine.

Je vous donne rendez le mois prochain et d’ici là, n’oubliez pas le principal, lisez !

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Les noces perdues de Anna Jansson (Toucan)

Il est étonnant de ne pas plus entendre parler de ce roman. Car le début du roman est tout simplement brillant. En ce qui me concerne, j’avais découvert Anna Jansson avec Derrière les remparts, et ce roman m’a surpris car je ne m’attendais pas du tout à cette façon de traiter un tel sujet, à savoir les relations de couple.

En Suède, sur l’île de Gotland, dans la vieille cité de Visby. Maria Wern rentre chez elle après un diner avec Erika et Anders. Erika est une collègue et Anders, son amour du moment, un médecin de district. Sur le chemin du retour qu’elle a décidé de faire à pied, elle entend un appel au secours. Elle aperçoit trois hommes battre à mort un jeune homme. Elle s’interpose et les trois se retournent contre elle. Elle échappe au viol, mais l’un d’eux lui enfonce une aiguille emplie de sang, avant de partir. Et si on l’avait infecté du Sida ?

A l’hôpital, Tomas Hartman, son commissaire, vient prendre de ses nouvelles. Mais elle ne peut lui donner que de maigres indices concernant les agresseurs. Puis, c’est Jonatan Erikson, le spécialiste des maladies infectieuses qui vient la rassurer quant au risque qu’elle court et qu’elle peut faire courir à son amant Per Arvidsson, policier lui aussi. Quand elle se lève à la recherche du jeune homme battu à mort, Linus, elle rencontre son père qui lui annonce sa mort et veut se venger des assassins.

Linn Brogen est infirmière à l’hôpital. Elle rentre chez elle, en pensant à sa fille, Sara, en attente d’une greffe de poumons. Et comme son mari Claes est en mer, elle ne dort pas beaucoup. C’est dans un parking qu’elle se fait agresser par trois hommes ; elle aurait pu être violée si son voisin Harry n’avait pas sorti ses chiens. Ce traumatisme supplémentaire ne va pas arranger ses insomnies, d’autant plus que quelqu’un vient frapper à sa fenêtre en pleine nuit.

Linn va voir Anders pour qu’il lui donne des somnifères. Anders est le genre de médecin à écouter longuement ses patients, ce qui lui fait perdre beaucoup de temps. Mais cela lui permet de les comprendre. Linn ne lui dit rien de son agression, et parle de sa volonté de quitter son mari. Puis c’est Harry qui est hypocondriaque, qui vient consulter et Anders lui prescrit des analyses d’urine.

Un matin, on découvre un corps décapité au sommet d’une colline…

Que ceux qui cherchent des sensations et des romans rythmés passent leur chemin. Il s’agit bien ici d’un roman policier psychologique, où l’auteure prend le temps d’installer ses personnages ainsi que le décor. Le corps de Linn ne sera, en effet découvert qu’après 100 pages, ce qui montre qu’auparavant, on aura eu le temps de se familiariser avec les différents protagonistes.

Le début de ce roman est tout simplement brillant. L’auteure commence par un personnage, lui en fait rencontrer un autre, que le lecteur va à son tour suivre, jusqu’à en rencontrer un troisième que nous allons suivre et ainsi de suite. C’est brillamment fait, et surtout les descriptions sont justes. Certes, l’auteure prend son temps, mais les traits qu’elle dessine sont tous parfaitement placés. A cela s’ajoute le fait que les personnages habitent tous le même quartier, ce qui simplifie les transitions.

Puis arrive le meurtre et l’aspect policier peut se mettre en place. Et même là, l’auteure semble placer l’enquête au deuxième plan, préférant s’attarder sur la vie quotidienne de ces gens qui habitent sur une ile, en presque totale autarcie. Cela permet ainsi de fouiller certains aspects de notre société, et surtout la difficulté des relations humaines, la vie de couple ou bien la difficulté d’être accepté en tant qu’homosexuel. Même si ce roman n’est un pamphlet, chaque personnage incarne un aspect de ces thèmes.

C’est remarquablement fait et c’est psychologiquement passionnant. Il y a bien des passages un peu bavards, surtout vers le milieu du livre, mais ils sont vite effacés au profit d’une fin stressante et surtout inattendue, d’autant plus qu’elle est bien amenée. Ce qui fait que je garderai de ce roman un souvenir particulier, comme un voyage sur cette ile où j’aurais vraiment eu l’impression de vivre auprès de gens simples, engoncés dans leurs problèmes quotidiens. Très bon !

Laissez toute espérance de John Connolly (Pocket)

Ce billet est évidemment dédicacé à mon pote du sud La Petite Souris et à Jean Marc Laherrère. Ce sont eux deux qui m’ont donné envie de lire la série Charlie Parker

Je continue mon exploration de l’univers de Charlie « Bird » Parker, le personnage récurrent de John Connoly. Après un premier épisode poisseux dans les bas-fonds de la Nouvelle Orléans, fortement chargé d’émotions à la suite du meurtre de sa femme et de sa fille, nous retrouvons notre Charlie en cours de reconstruction.

Il entame donc un retour aux sources, direction Scarborough, le village de son enfance, où il retape la maison familiale. Comme ce n’est pas un passionné du bricolage, et qu’il doit entamer la réfection de la toiture, il en profite pour visiter les amis. Parmi ceux-ci, il y a Rita Ferris qui lui demande de récupérer sa pension mensuelle que Billy Purdue ne lui a pas versée.

Billy Purdue, en voilà un raté comme pas deux. Le genre à se fourrer dans des problèmes, à toujours choisir la mauvaise décision, à faire des petits coups pour un maximum de problèmes. La rencontre entre Billy et Charlie est musclée. Billy croyait que Charlie était un émissaire de Tony Celli, le ponte mafieux du coin. Finalement, Billy donne dollars à Charlie, en attendant des jours meilleurs.

Charlie retourne dans ses terres, quand il rencontre dans un bar un personnage malfaisant. Son nom, Caleb Kyle, fait peur à tout le monde, des plus grands au plus petits. C’est un vieil homme, à l’odeur de putréfaction insistante, et aux yeux noirs comme la mort. Caleb lui demande où est Billy. Charlie ne sait pas. Mais quand Charlie apprend que Rita et son fils ont été tués, il va être obligé de se remettre en chasse …

Si je dois avouer que je n’ai pas ressenti un personnage de Charlie Parker miné par le douleur d’avoir perdu sa famille, puisque le drame qui l’a frappé est intervenu moins d’un an auparavant, ce roman applique finalement les mêmes règles que le premier tome (Tout ce qui meurt) avec la même réussite. Voici donc un pur roman d’action avec une petite touche de fantastique, qui ajoute une aura de mystère bienvenue.

Alors que dans le premier tome, nous avions visité les bayous de la Louisiane, nous avons droit ici à un voyage dans le Grand Nord, en plein hiver, quand les bois sont silencieux et stressants, quand les sols sont recouverts de neige et que le froid se fait mordant et peu accueillant. Les habitants ne sont pas plus accueillants, d’ailleurs, puisqu’ils vous attendent avec des chiens hargneux et un fusil à canon scié.

Comme à chaque fois, l’intrigue ne se veut pas linéaire, elle suit les pas de Charlie Parker qui sont tout sauf surs. L’enquête avance à petits pas, et quand on a l’impression qu’il va abandonner, l’auteur rajoute un personnage, ou un rebondissement qui relance le rythme et l’action. C’est cette accumulation de faits qui donne son allant au livre, cette envie de continuer pour atterrir dans des scènes d’un visuel hallucinant. J’ai dénombré pas moins de 4 scènes de pure action qui vous font accélérer le palpitant et qui touche au génial.

Et puis, il y a ces passages étranges, soit des rêves, soit des paysages brumeux qui montrent le penchant de l’auteur pour le fantastique. Parfois cet aspect n’est que suggéré ; parfois ce sont de vrais passages angoissants. Et on a envie de continuer la saga parce que Charlie Parker et ses amis sont drôles et que ce roman s’est lu trop vite malgré ses 540 pages. Et on en redemande, du divertissement de ce niveau là !

Les voleurs de sexe de Janis Otsiemi (Jigal)

Voici le petit dernier d’un auteur que je défends depuis son premier roman paru chez Jigal, La vie est un sale boulot. Si le titre peut surprendre, il peut attirer l’œil de ceux qui arpenteront les rayons des libraires. Et pour le coup, ils tomberont sur un excellent polar. Bienvenue à Libreville, Gabon !

Akebe 2 est un quartier où il ne fait pas bon trainer à la nuit tombée. Benito et Tata sont deux jeunes garçons qui attendent leur troisième compère Balard. Né d’un père Burkinabé qui est retourné au pays, Benito est un passionné de musique, surtout de rap français hard-core, tels Tunisiano, Faf Larage ou Akhenaton. Tata lui est plutôt du genre fumeur et c’est le genre de gars qu’il ne faut pas chercher car il démarre au quart de tour et est toujours vainqueur dans ses bagarres. Balard quant à lui a une réputation de puceau et il vient annoncer à ses copains qu’il vient (enfin) de se faire une nana, la petite Nathalie qui a débarqué il y a à peine six mois et que tous les garçons convoitent.

Un accident de voiture a lieu pas loin de là où zonent les garçons. Le chauffeur a raté un virage dangereux. Quand ils arrivent sur les lieux, il est trop tard pour le chauffeur. Par contre, ils voient une valise avec beaucoup d’argent et une enveloppe kraft qui renferme des photos. Arrivés chez eux, ils sont ébahis par ce que montrent les photos : De nombreux membres du gouvernement et le président lui-même sont en pleine cérémonie maçonnique.

En parallèle, le capitaine Pierre Koumba est chargé de trouver un homme qui vole les sexes des Gabonais : Simplement en les touchant, les victimes sentent que leur sexe diminue. De nombreux cas sont déjà apparus et cela s’est terminé par une course poursuite pour attraper le soi-disant coupable, puis par un passage à tabac de celui-ci. Koumba et son équipe a intérêt à aller vite pour éviter la paranoïa et l’émeute. Car on ne plaisante pas avec le sexe au Gabon.

Avec ce roman, Janis Otsiemi, dont on vante les qualités d’écrivain, de ré-inventeur de la langue française, nous a concocté son roman le plus abouti à ce jour. Du moins, c’est mon avis.

Avec ce roman, on ne va plus lire Janis Otsiemi pour ses expressions imagées qui viennent de là-bas, du Gabon qui nous parait si loin. Car même si on y trouve toujours ces verbes bien trouvés, ces proverbes amusants, tout cela se retrouve bien intégré au récit, si bien qu’on ne les voit plus. Du moins, c’est mon avis.

Avec ce roman, On va se laisser transporter par ces personnages forts, mais si bien intégrés dans le décor. On ne s’étonne plus de la corruption des policiers, on ne s’apesantit plus sur les décors. On vit là-bas, on est plongés dans cette ville. Du moins, c’est mon avis.

Avec ce roman, Janis Otsiemi nous montre, avec la subtilité que l’on ressentait déjà auparavant, toutes les contradictions de cette société, ce mélange entre modernité (musique rap, truandise, violence) et superstitions (croyances dans des marabouts capables de jeter des sorts). Du moins c’est mon avis.

Avec ce roman, Janis Otsiemi aborde les différentes nationalités qui arrivent à Libreville, entre les Burkinabé qui viennent travailler ou les Ivoiriennes qui se prostituent, sans oublier les Chinois si discrets. Il montre une société qui évolue. Du moins, c’est mon avis.

Avec ce roman, Janis Otsiemi a écrit son meilleur roman à ce jour. Du moins, c’est mon avis. Et il a écrit un roman important sur une société en mutation, avec la verve qu’on lui connait, avec une langue si simple et si belle.

Avec ce roman, Janis Otsiemi a écrit un livre important.

Ne ratez pas l’avis de Claude ici même

Le crime de Julian Wells de Thomas H.Cook (Seuil)

En tant que fan de Thomas H. Cook, je ne pouvais pas faire autrement que lire ses livres dès leur sortie. On connait cet auteur par ses thèmes nous interrogeant sur la famille et sur les conséquences des actes passés. Il arrive encore à nous surprendre avec ce titre qui évoque l’Argentine et les exactions de la junte militaire.

Julian Wells sort de sa petite maison, et se dirige vers l’étang, situé en contrebas. Il monte dans la barque, prend les rames et s’éloigne du bord. Sa décision est prise, il va aller le plus loin possible, pour que personne ne le rejoigne. Arrivé à une certaine distance, qu’il juge suffisante, il s’ouvre les veines avec un couteau. Sa vie s’écoule lentement de son corps, et avec lui les cicatrices du passé.

Philip Anders est le meilleur ami de Julian Wells. Philip est très marqué par ce suicide, car il a toujours eu beaucoup d’admiration pour son ami, qui est devenu un auteur de livres à succès, alors que lui n’est que critique littéraire. Julian Wells est en effet un auteur reconnu de biographie ayant pour sujet les grands tueurs en série. Ses œuvres se démarquent des autres par sa façon qu’il a de prendre la place des victimes, tout en fouillant la psychologie des tueurs.

Philip ressent de la culpabilité envers son ami qu’il a délaissé. Avec la sœur de Julian, il va chercher à comprendre ce geste qu’il ne comprend pas. Il va donc reprendre la carrière d’auteur de son ami, se déplaçant sur les lieux que Julian a visité pour écrire ses livres. Le père de Philip lui donnera des pistes, lui qui a été diplomate en Argentine et qui leur a présenté une jeune guide, Marisol, lors d’un séjour là-bas.

Pour avoir lu nombre de romans de cet auteur, je dois dire que celui-ci m’a énormément surpris.

Il est surprenant par son genre, le roman d’espionnage, car on a affaire à un jeu de dupes, dépourvu de sentiments, la seule motivation étant l’obtention de renseignements ou de pouvoir à tout prix.

Il est surprenant par son intrigue, plus linéaire que d’habitude, plus balisée que d’habitude par les romans de Julian Wells, pris dans leur ordre de parution. Pour autant, on retrouve ces petites scènes, qui ajoutent de l’épaisseur aux personnages et de la réalité au récit.

Il est surprenant par ses personnages, et surtout par le nombre de personnages secondaires, qui ont tous leur importance dans l’intrigue. Comme toujours, leur présentation est impeccable, toujours subtile.

Il est surprenant par son contexte car c’est la première fois que Thomas H. Cook sort du cadre familial (à ma connaissance) pour mettre sur le devant de la scène, à la fois une partie de ce qui est arrivé en Argentine, à la fois l’importance des hommes de l’ombre, ces espions qui obéissent aveuglément à des ordres qu’ils ne comprennent pas, au mépris de la vie humaine, voire des conséquences de leurs actes.

Il est surprenant par son style, beaucoup plus froid, beaucoup plus analytique, moins sensible que dans ses précédents romans. C’est un aspect qui peut dérouter les fans, les surprendre en tous cas. Et comme le narrateur est critique littéraire, on comprend mieux cette distanciation avec l’intrigue.

Comme quoi, même quand on connait un auteur, celui-ci peut nous surprendre et même si ce n’est probablement pas le roman à conseiller pour qui veut découvrir Thomas H. Cook (essayez donc Les Feuilles Mortes ou Mémoire Assassine), ce Crime de Julian Wells vous réservera d’excellents moments et une fin surprenante.

Ne ratez pas les avis des amis Claude Le Nocher et Actudunoir

Nid de vipères de Edyr Augusto (Asphalte)

Etes-vous prêt pour une expérience ?

J’avais raté les deux précédents romans de cet auteur brésilien parce que … je ne sais pas. Celui-ci m’a été conseillé par Le Concierge Masqué. Et il avait raison, tant ce petit roman de 150 pages en vaut d’autres qui, sur le même sujet, en font 500 ! En fait, c’est à une véritable expérience que je vous convie, presque à un défi. Car je vais défendre ce roman que j’ai adoré, que je trouve fantastique.

Dans le quartier de Centre Architectural de Nazaré, il est presque minuit et les feux d’artifice vont bientôt se déclencher. Trois hommes sortent d’une voiture et entrent dans un immeuble. Ils pénètrent dans un appartement et assassinent la famille Pastri au complet. Les coups de feu se perdront dans le brouhaha des festivités.

A la terrasse d’un bar, Valdomiro, simple comptable, boit se bière. Trois hommes passent devant lui, et laissent tomber un porte-clés. Lui qui les collectionne, va le mettre dans sa poche. C’est aussi un arbitre de football amateur, où il oublie sa lâcheté naturelle, et grand fan de cinéma classique.

Autre temps, autre lieu. Il est l’amant de Pat Harrison, une rock-star internationale. Il doit prendre l’avion pour le Brésil et revenir dans son pays, le Brésil.

Les trois hommes ayant perpétré l’assassinat des Pastri s’arrêtent sur un parking. Une autre voiture arrive. Des hommes les exécutent.

Autre temps, Autre lieu. Les Pastri sont propriétaires d’une scierie à Castanhal. La famille est au complet, les deux enfants Alfredo et Isabela sont là. Wlamir Turvel débarque avec sa bande. Ils frappent le père, violent la mère devant les enfants … Jusqu’à ce que le père accepte de céder son exploitation à Wlamir.

Autre temps, autre lieu. Wlamir Turvel a bati sa fortune sur les biens des autres. Avec l’argent de la scierie, il a construit son empire de trafics. Drogue, prostitution, tout y passe. Il est devenu incontournable et a réussi à devenir gouverneur.

Voici un aperçu des premiers chapitres de ce roman, pas comme les autres. Les chapitres sont courts, très courts. Ils représentent tous une pièce du puzzle. Il n’y a aucune indication de temps, voire même de lieu. Le lecteur est amené à construire lui-même l’histoire, à reconstruire cette intrigue. Même la narration est sèche, les phrases sont courtes. Il n’y a pas de séparation dans les dialogues. Ils se suivent dans le même paragraphe. Là aussi, c’est le lecteur qui doit construire sa propre lecture.

Et vous savez quoi ? ça marche ! Quand je vous parlais d’expérience, je crois bien n’avoir jamais lu un roman aussi jusqu’au-boutiste dans sa forme, mais qui, malgré cela, fonctionne à merveille. C’est un roman étonnant, car, une fois accepté le jeu, on se retrouve avec une bombe à retardement entre les mains. Cela devient un véritable plaisir voire plus, une véritable drogue tant on a du plaisir à revenir sur les pages. On en vient même à relire certains passages tellement c’est bon.

Et cela ne s’arrête pas là. L’histoire, qui est la vengeance d’Isabela, n’est pas aussi simple que l’on croit. Le parcours de Wlamir est éloquent, la trajectoire d’Isabela terrible, les personnages secondaires nous mettant en face d’un dilemme : Peut-on aimer un seul de ces personnages, devant leur violence, leur lâcheté, leur égocentrisme, leur croisade sanglante ? Fichtre ! c’est un sacré bouquin, de ceux qui vous remuent, de ceux qui vous marquent, de ceux qu’on n’oublie pas, de ceux qu’on ne peut pas oublier.

Etes-vous prêt pour une expérience ?

Sans pitié ni remords de Nicolas Lebel (Marabook)

Il m’aura fallu découvrir Nicolas Lebel grâce à son précédent roman, le jour des morts,  pour être tombé amoureux de son personnage principal Mehrlicht. Et donc, c’est une maladie chez moi, je ne pouvais pas rater le petit dernier Sans Pitié ni remords.

9 novembre. Le meilleur ami du capitaine Mehrlicht et ancien collègue, Jacques Morel, celui qui faisait chier les infirmières, celui qui fumait comme un pompier dans sa chambre d’hôpital, celui qui vidait les bouteilles de Romanée-Conti quand il devait prendre ses médicaments, celui qui partait dans des tirades extraordinaires vient de rendre l’âme. Toute l’équipe de Mehrlicht assiste à l’enterrement et le commissaire Matiblout lui conseille de prendre quelques jours de congés.

Avant de partir en province, Mehrlicht est convoqué par un notaire pour la succession de Jacques Morel. Il lui remet une enveloppe marron, dans laquelle il trouve des jeux de reflexion (Mots fléchés et Sudoku) ainsi qu’une petite pierre précieuse. C’est alors que le capitaine Kabongo, membre de « la police de l’art » lui annonce que cette pierre fait partie d’un vol qui a eu lieu plusieurs années auparavant. Pour Mehrlicht, prouver l’innocence de son meilleur ami devient une question vitale.

Pendant ce temps là, l’équipe de Mehrlicht est appelée pour un suicide. Leur nouveau chef provisoire, pendant l’absence de Mehrlicht s’appelle Cuvier, un incompétent notoire, connu et reconnu comme tel. Le suicide est une pendaison d’un dénommé Ghislaini. Rien n’est signalé dans son dossier judiciaire. Ghislaini a juste été entendu dans une affaire d’œuvres d’art africain il y a une dizaine d’années. L’affaire se complique quand d’autres suicides font leur apparition.

Autant vous le dire tout de suite, si Nicolas Lebel écrit de très bons polars divertissants, il est aussi et surtout un auteur doué, très doué, capable de vous étonner. Etonnant, c’est bien le mot qui me vient après avoir tourné la dernière page. Ce n’est que le troisième roman de cet auteur, et il se permet de nous concocter un scenario surprenant, tout en y mettant les formes.

Car effectivement, vous allez être surpris par l’intrigue, jusque dans les dernières pages, mais vous allez aussi suivre le fil conducteur à travers plusieurs groupes de personnages. Et cela se passe avec autant de facilité parce que ces personnages sont forts. Mehrlicht occupe bien entendu le premier plan, et même s’il est moins en forme, moins présent, ses envolées lyriques sont toujours aussi jouissives et confines même au chef d’œuvre, telle celle des pages 156 à 158. L’équipe du capitaine, d’un autre coté, a affaire avec un remplaçant Cuvier que l’on adore détester voire même que l’on voudrait baffer. Enfin, vers le milieu du bouquin, on voit apparaitre un groupuscule responsable des suicides … et à la limite ce sont les passages que j’ai le moins aimé car ils m’ont semblé peu convaincants.

Le roman est donc divisé en deux temps, comme un opéra ou comme un film d’action. Vient d’abord Temps de deuil, où Nicolas Lebel met en place l’intrigue (complexe certes, mais dans laquelle on n’est pas perdu, loin de là, puisque le roman est réellement impossible à lacher). Puis arrive Temps de guerre où le rythme change et où le livre devient une course poursuite. Au-delà de ce rythme effrené, on y retrouve de pures idées comiques, telles les sonneries de téléphone que le fils de Mehrlicht installe sur le portable de son père et nous donne des moments comiques inoubliables !

Le livre se clot par deux pages de remerciements où l’auteur nous donne à lire une liste de blogueurs qui l’ont aidé, avec un dernier effet comique et j’ai adoré cet aspect de ne pas se prendre au sérieux. C’est aussi pour cela que j’adore cet auteur : il écrit d’excellents scenarii avec des personnages forts et malgré cela, il nous rappelle que tout cela n’est qu’un divertissement … quoique … Voici encore une réussite, une belle, signé Nicolas Lebel. Et ça rime !

Evénement littéraire : Sweeney Todd de J.M.Rymer (Tind)

Il a été adapté au cinéma par Tim Burton avec Johnny Depp. Toute la démesure et la poésie de Tim Burton s’exprime dans ce film dont voici la bande annonce :

Sachez que le livre dont est tiré ce film est inédit en France. Inédit ? Non, car les éditions Tind sortent enfin ce monument de la littérature horrifique dans un livre remarquable.

L’histoire :

Qui n’a pas entendu parler de Sweeney Todd, le plus démoniaque barbier que Londres ait jamais abrité ? Au XVIIIème siècle, la ville, perpétuellement enfouie sous le smog, est le plus lugubre lieu qu’il soit.

Repaire des plus vils malfaiteurs, elle est avant tout la capitale du crime et de la perdition, où les braves gens sont les victimes de la bonne fortune qui sourit aux truands.

Lorsque l’on y apprend la disparition d’un jeune marin, récemment revenu d’un long périple aux Indes, tous ses amis se mettent à sa recherche. Les pistes semblent toutes mener près du salon d’un barbier, aux abords de Fleet Street. Un certain Sweeney Todd…

Le livre :

Découvrez l’un des plus fameux penny dreadful et l’une des principales sources du Dracula de Bram Stoker. Dans une traduction exclusive en France, le lecteur pourra enfin découvrir le récit original et intégral du légendaire tueur en série de Londres, et frémir au coeur d’une cité londonienne fourmillante d’horreurs et d’épouvante.

Informations sur le livre :

Format : rogné 140 x 200 mm. 352 pages

Impression : Couverture quadrichromie, vernis sélectif, intérieur en noir

Finition :

Couverture souple, dos carré-collé

ISBN 979-10-93749-12-9

Prix : 19.90 €