Condor de Caryl Ferey

Editeur : Gallimard

Comme beaucoup de lecteurs de polars, j’aime Caryl Ferey. J’aime Caryl Ferey pour ses intrigues. J’aime Caryl Ferey pour ses personnages. J’aime Caryl Ferey pour son humanisme. J’aime Caryl Ferey pour son honnêteté. J’aime Caryl Ferey pour ce qu’il nous montre du monde et de l’état dans lequel il est. Avec Condor, nous faisons étape au Chili.

Santiago du Chili. La manifestation étudiante fait rage Plaza Italia. Gabriela parcourt les rangs, armée de sa camera pour faire un reprortage qu’elle postera sur le Net. Elle y retrouve son amie Camila Araya, la présidente de la Fédération des Etudiants de l’université du Chili. La manifestation défend l’éducation pour tous, depuis que le Chili s’est libéré de la dictature de Pinochet pour plonger dans l’ultralibéralisme et des universités payantes qui coutent le salaire d’un ouvrier.

A 67 ans, Stefano a toujours la passion du cinéma et celle de partager la culture. Il héberge Gabriela depuis quatre ans, et lui propose de venir voir The Getaway de Sam Peckinpah à la Victoria, où ils rejoindront le Père Patricio. En pleine projection, la sœur Maria Inès leur demande venir voir le drame qui se déroule sur un terrain vague tout proche :

Quelques policiers tentent de maitriser la centaine de badauds qui observent le corps d’un jeune adolescent mort. Enrique, le fils de 14 ans du rédacteur en chef de Senal3 est étendu là, mort. Gabriela filme tout, car elle a remarqué des traces de poudre blanche. C’est le quatrième corps d’adolescent que l’on retrouve comme cela. Gabriela sait que la police ne fera rien pour élucider les morts de jeunes pauvres. On lui conseille alors de contacter un jeune avocat spécialiste des causes perdues Esteban.

Après la Nouvelle-Zélande («Haka», 1998, «Utu», 2004), l’Afrique du Sud («Zulu», 2008), et l’Argentine («Mapuche», 2012), Caryl Ferey pose ses valises au Chili. C’est l’occasion pour lui de montrer en 400 pages un pan de l’histoire de ce pays marqué par une dictature adoubée par les plus grands pays économiques, sous prétexte de lutter contre le communisme. Le pendant de cela, c’est que ce pays est tombé dans un ultralibéralisme, qui creuse les écarts entre les pauvres et les riches, et qui foule aux pieds le moindre humanisme. Il était donc logique que Caryl Ferey y installe son intrigue.

Si on peut regretter qu’au fil des pages, le personnage de Stefano disparaisse quelque peu, ce roman est bel et bien porté par ses deux personnages principaux Gabriela et Esteban. Ce sont deux personnages aussi opposés qu’on puisse l’imaginer, Gabriela étant une révoltée sans le sou et Esteban un avocat issu d’une famille immensément riche mais se battant pour les pauvres. Comme d’habitude, Caryl Ferey démontre tout son humanisme à travers ces personnages, et surtout faisant de son roman un reportage sur un pays où le seul leitmotiv est de faire toujours plus d’argent.

Pour autant, l’intrigue n’est pas en reste puisqu’elle se déroule gentiment, jusqu’à dévoiler le sujet véritable du roman dans les dernières pages, sujet que l’on est bien incapable de trouver auparavant. Avant, nous aurons eu droit à un très bon polar, avec des scènes de suspense haletantes, des dialogues formidables et surtout un contexte des plus noirs, choquant, révoltant, scandaleux.

Je dois dire que ce roman m’a passionné mais que j’ai regretté que les personnages soient aussi stéréotypés (les gentils sont très gentils, les méchants sont très méchants) et qu’un peu plus de subtilité m’aurait poussé à mettre un coup de cœur. Et puis, il m’a manqué un peu de folie, un peu de passion, que je n’ai pas ressenti à la lecture, et qui est une des raisons pour lesquelles j’adore cet auteur. Ceci dit, ce roman n’est en aucun cas décevant pour moi, car c’est encore une fois un formidable voyage dans une contrée mal connue, pourrie par le règne de l’argent eu détriment des hommes et des femmes, présenté par des formidables personnages inoubliables.

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13 réflexions sur « Condor de Caryl Ferey »

  1. J’ai aimé ce livre, peut-être même plus que les autres. Et si les méchants sont méchant et les bons sont gentils, Caryl Ferey est ce genre d’auteur qui apporte toujours un plus à ses polars. Dénoncer les crimes des dictatures n’est jamais inutile et rafraîchie la mémoire ou en apprend beaucoup à d’autres. En plus j’ai eu la chance de voir la lecture du roman par Bertrand Cantat avec la musique de Marc Sens. Un très grand moment. Comme un coup de poing dans le plexus solaire, inoubliable !

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  2. Oui, c’est vrai que pour écrivain de talent faire des stéréotypes aussi gros est dommage. Mais je veux lire ce livre, je l’ai, mais j’ai pas encore eu le temps, ma PAL est en surcharge pondérale ! 😆

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  3. Je trouve les personnages très réussis et la force principal de ce roman mais je comprends ce que tu veux dire. Il n’en reste néanmoins que ce livre est tres recommandable 😊

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