Les mains vides de Valerio Varesi

Editeur : Agullo

Traductrice : Florence Rigollet

Ce roman n’est que le quatrième publié en France de cet auteur, après Le fleuve des brumes, La pension de la via Saffi et Les ombres de Montelupo, et déjà, j’ai l’impression qu’à chaque fois, ce sont des lectures impératives, obligatoires, tant ces lignes disent tant de choses.

C’est le mois d’aout dans la ville de Parme et la chaleur est insupportable. On aurait pu croire que la ville sommeillerait tranquillement en attendant la baisse de la température de la soirée. Mais il devait en être autrement. Dès le matin, un appel à la radio signale un braquage, réalisé par quatre individus. Puis c’est une bagarre générale qui se déclenche Via Trento, impliquant une quinzaine de personnes. Puis, c’est un fou qui menace la foule avec un couteau.

Mais c’est l’appel suivant qui attire l’attention du commissaire Soneri : deux hommes viennent de voler l’accordéon du musicien qui joue sur les marches du Teatro Regio. « On peut tout supporter de cette ville : sa chaleur, ses voyous … Mais pas qu’on lui vole sa musique. » L’après midi commence sur le même rythme : une jeune fille a été agressée puis un homme est retrouvé mort chez lui. On demande à Soneri d’aller voir cette affaire bien étrange.

En plein quartier des boutiques de fringues, Soneri arrive dans l’appartement de Francesco Galluzzo. Le mort, brun et bronzé, est couché à coté du canapé, sa tête tournée vers la porte. L’appartement est en total désordre et l’homme a le visage tuméfié, avec des traces de corde aux poignets. C’est son associé qui l’a découvert, après être allé chercher la clé chez la sœur de Galluzzo. Pour Soneri, c’est clair : c’est un passage à tabac qui s’est mal terminé.

Ceux qui ont lu les trois premières enquêtes de Soneri risquent d’être surpris au démarrage de ce livre. Là où Le fleuve des brumes jouait sur les ambiances, où La pension de la via Saffi et Les ombres de Montelupo abordaient les relations du commissaire avec son passé familial, nous sommes plongés dans une canicule en pleine ville. Le style et le rythme s’en ressentent : les phrases sont rapides, toutes en actions, en mouvements, et il y a peu de place pour les sentiments.

A partir d’une affaire simple en apparence, l’affaire va non pas se complexifier, mais dévoiler des liens sur la vie secrète de Parme et l’implantation de la mafia dans les commerces de la ville. Puis, le commissaire va se montrer un témoin des changements de sa ville, de sa vie, empli de nostalgie, de ce passé où la vie semblait si simple, si limpide, plus en relation avec la loi et le respect des gens.

Car le monde a choisi un nouveau roi, un nouveau Dieu, celui de l’argent. Tout se vend, tout s’achète et plus on en donne aux gens, plus ils en demandent. On trouve cette phrase éloquente et remarquable dans la deuxième moitié du livre : « L’argent est la nouvelle idole unique et totalitaire. Il ne nous reste plus que deux possibilités : soit en profiter, soit tenter de s’y opposer. Moi, j’ai choisi la première et vous, la seconde. Le seul point sur lequel on se retrouve, c’est le mépris qu’on peut ressentir pour ce monde-là. »

Si le sujet n’est pas nouveau, le regard que pose Valerio Varesi et son commissaire sur notre monde et sur son évolution permet de prendre un peu de recul par rapport à ce qu’on subit tous les jours. Publié en 2004, il avait des allures de visionnaire ; aujourd’hui, il fait office de constat pessimiste. Mais il y a une qualité que l’on ne peut lui reprocher : c’est de nous avoir emmené dans cette Parme magique, pour parler d’un sujet universel, avec un beau constat d’échec. Et quand on a tourné la dernière page, on a envie d’éteindre la télévision quand il y a des pages de publicité.

8 réflexions sur « Les mains vides de Valerio Varesi »

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