Editeur : L’Archipel
Rares sont les romans que je relis, même s’ils ont été remaniés, réécrits, réactualisés. Le régisseur s’est appelé Point de fuite et m’avait énormément ému, moins par le contexte (la mort du régisseur de Coluche en pleine campagne pour les élections présidentielles de 1981) que par le personnage de Marie, amante de René, enceinte, rejetée de tous, accusée par tous, ne comprenant pas la tornade qui vient de déferler.
Je vais essayer de ne pas paraphraser mon avis sur Point de fuite que vous pouvez retrouver ici, et auquel je n’ai repris que le résumé, soit les deux paragraphes qui suivent :
Ce roman commence le 23 novembre 1980, et Marie, l’amante de René est inquiète de son absence. Elle est enceinte de 7 mois et cela ne ressemble pas à René de la laisser aussi longtemps sans nouvelles. Elle fait le tour de la troupe de Coluche pour savoir s’ils sont au courant de quelque chose mais elle revient bredouille. Deux jours après, deux policiers se présentent chez elle et son monde s’effondre.
On lui apprend, en effet, que le corps de René a été découvert dans un terrain vague de banlieue, assassiné de deux balles dans la nuque. Elle se retrouve totalement abasourdie et est bousculée entre les interrogatoires et le rejet des proches de René. Surtout, elle ne comprend pas et se rend compte qu’elle ne connaissait pas l’homme avec qui elle vivait, avec qui elle va avoir un enfant.
Reprenant le même fil narratif que Point de fuite, Jeanne Desaubry a complètement réécrit son roman. Même si l’histoire suit la même chronologie, si les chapitres suivent les jours suivant la découverte du cadavre de René, les différences sont telles qu’on a l’impression de lire un tout autre roman. Par contre, la force émotionnelle, la rage qui nous fait serrer les dents restent toujours présentes.
De ce roman, nous retiendrons ce portrait de Marie, jeune femme enceinte qui ne comprend pas ce qui lui arrive. Nous retiendrons cette impression que tout le monde se ligue contre elle, que ce soit la police qui la soupçonne ou l’entourage de Coluche qui l’ignore, en passant par « L’Autre » qui la menace. Nous retiendrons le support inconditionnel de la mère, l’absence du père, et cette intuition que Marie doit se battre pour mettre son enfant au monde. Nous retiendrons le monde des années 80, où une femme doit être mariée avant d’avoir un enfant, sinon elle parait louche, voire coupable. Nous retiendrons ce monde de paillettes, où les stars s’enivrent de plaisirs, se remplissent la panse tout en pensant de temps en temps à ceux qui n’ont rien à manger.
Et puis, on y notera les différences évidentes, ces phrases remaniées pour se recentrer sur le personnage de Marie, ses pensées sans ponctuation pour illustrer sa confusion, ses appels au secours, et ces passages où René vient lui parler (« Putain, je suis mort ! Fait chier ») qui accompagnent Marie, qui la soutiennent et qui, sur le dernier passage vous plante un poignard et vous feront passer de terribles frissons dramatiques dans le dos.
Ce roman remanié n’est ni moins bon, ni meilleur que Point de fuite. Il est différent, atteignant un équilibre entre les émotions de Marie et les événements dramatiques. Ce roman évite le coté « Document à scandale » et montre le combat d’une femme pour faire reconnaitre son amour, la difficulté à faire accepter aux autres l’Amour, celui où on se laisse vivre en compagnie de l’autre sans le harceler de questions, celui d’une liberté revendiquée de vivre sa vie comme on le veut … jusqu’à ce qu’un drame vienne tout bouleverser. Quelle vie, quel personnage que cette Marie si grandement mis en scène et en valeur grâce à la plume magique de Jeanne Desaubry.
Sortez le punching-ball contre les conformistes de tous poils et la boite de mouchoirs, ce roman est terrible.
Coucou Pierre. Wouaw ce personnage, celui de Marie donne envie d’y faire un tour. 😀
Toi et tes chroniques « vachement » bien écrites et tentantes 😋🤗!!!
Je m’en vais aller voir cela. Bizz. Geneviève
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Merci pour le compliment Geneviève et bonne lecture
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