Archives du mot-clé Claude Picq

Nés sous X de Cicéron Angledroit

Editeur : Palémon

Après Sois zen et tue-le … voici le deuxième tome des aventures de Cicéron Angledroit (dit Claude Picq), René et Momo.

Margueron arrive à vivre en commettant de petits larcins avec un ou deux complices. Cette fois-ci, il a eu un bol pas possible. Suivant des braqueurs de banque, il les a vus se séparer et l’un d’eux cacher son butin dans une maison avant de ressortir. Margueron n’avait eu qu’à entrer par effraction et mettre la main sur quelques belles liasses, qu’il ne devrait pas partager pour une fois.

René vient déranger Cicéron alors qu’il garde sa fille, pour lui proposer une nouvelle affaire, une affaire pas ordinaire. Margueron déjà attablé au bar de l’Interpascher lui montre la une du Parisien, une rafle spectaculaire de la police à Mennecy. Bizarre que la police ait débarqué  une demi-heure après Margueron dans la maison où la braqueur a déposé son butin. Mais chose plus étrange encore, le braqueur que Margueron a suivi pose en photo, non pas avec les menottes aux mains mais en tant que policier ayant procédé à l’interpellation. Il y a du pourri dans l’air !

Cette affaire ne va pas lui mettre plus de beurre dans les épinards. Mourad N’Guyen, son peut-être futur potentiel client et connaissance de René, Il lui montre un extrait de journal des Yvelines où, lors d’une prise d’otages, le forcené a été tué. A première vue, ce n’est qu’un fait divers, mais l’homme en question est le sosie, trait pour trait, de Mourad. A Cicéron de trouver une potentielle possible lignée, pour un plein gratuit pour la Fiat, car Mourad tient la pompe à essence.

On retrouve donc nos trois compères dans de nouvelles aventures avec au centre Cicéron qui aimerait passer plus de temps avec sa fille. Mais entre l’envie de faire tomber des flics pourris pour aider le commissaire Saint Antoine (ce dernier n’avait pas de nom dans le premier tome, et puis avouez que c’est un bel hommage !) et cette mystérieuse histoire de ressemblance, il a de quoi faire !

Bref, ce que j’aime, c’est l’impression de suivre Cicéron dans ses pérégrinations, comme si elles étaient improvisées, de goutter à ses réflexions et ses détournements de la langue française (il y en a moins que dans le premier tome) et son ton toujours décontracté et humoristique (il n’y a que les contrepèteries où je passe au travers). Ajoutez-y une pincée de sexe, une grosse louchée de personnages frappés avec leurs descriptions à l’avenant et vous obtenez un bien agréable divertissement.

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Des poches pleines de poches v12

C’est déjà la 12ème rubrique consacrée aux livres de poches, avec des découvertes à ne pas manquer.

Gisèle de Denis Flageul

Editeur : Atelier in8

Collection : Polaroid

Gisèle fait ses courses dans un supermarché et peine à trouver une place libre sur le parking. Et après des tours et des retours, elle se gare. Quand un homme lui fait une remarque, elle sort un pistolet de sa boite à gants et le braque. Il faut dire qu’avec son fils Jean-Marc qui ne lui donne aucune nouvelle et les deux hommes patibulaires qui ont sonné à sa porte et qui le cherchent, il y a de quoi péter un câble.

Quand on lit une novella de la collection Polaroïd, il faut s’attendre à une histoire bien noire et bien écrite. On a du mal à croire que c’est un premier roman tant l’auteur montre dans cette histoire simple une maitrise impressionnante, autant dans sa façon de présenter les personnages que dans le déroulement de l’intrigue. Alternant entre phrases détaillées et morceaux hachés, il nous tient en haleine jusqu’à un final flamboyant.

L’amant religieux de Claude Picq

Autoédition

Michel D. est assis au restaurant et regarde la serveuse. Elle ressemble à Lola, ses yeux surtout. Maintenant Lola est morte, comme beaucoup d’autres. Il ne peut supporter de vivre seul, a besoin de se sentir désiré. Et quand cela dure trop longtemps, il les tue et arrange son acte comme un accident ou un suicide. Avec son air charmeur et anodin, il arrive toujours à s’en sortir.

Il faut que vous lisiez cette novella écrite en vers, sans forcément de rimes ; enfin, pas toujours. Cela impose donc des phrases courtes qui pour autant vont s’avérer explicites, tant dans les descriptions des lieux que dans les sentiments des protagonistes. On prend un réel plaisir à avaler cette histoire, pleine d’humour noir caustique et cela me rappelle, dans la forme, un roman écrit aussi en vers de Jean-Bernard Pouy : 54×13 (L’Atalante).

Terminus Leipzig de Max Annas & Jérôme Leroy

Editeur : Points

Christine Steiner, commissaire à la brigade anti-terroriste, monte une équipe pour interpeler Boulinier, un activiste d’extrême droite. Lors de l’intervention, elle se prend trois balles dans son gilet et apprend le suicide de sa mère. Sur une photographie chez sa mère, elle découvre le nom de son père et décide de le rejoindre en Allemagne.

Wolfgang Sonne et sa compagne Elke se préparent à quitter leur maison à cause du risque que présente la gravière. Ils sortent en pleine nuit pour déterrer des armes qu’ils avaient enfouies dans le jardin du voisin. Il leur semble entendre des bruits comme si on les épiaient. La situation devient urgente.

Il n’est pas commun de lire un polar écrit à quatre mains par deux auteurs étrangers. J’avais déjà lu et apprécié Le coffre de Jacky Schwartzmann et Lucian-Dragos Bogdan. Si l’histoire est bien menée, le format court nuit à l’intrigue puisqu’on se retrouve dans une situation d’assaut et que la fin semble trop rapide par rapport à la mise en situation du début qui, elle, était remarquablement bien faite. Malgré tout, le contexte reste intéressant et instructif.

Ska cru 2022 

Comme tous les ans, je vous propose une petite revue des derniers titres parus chez Ska, ou du moins certains d’entre eux. Voici donc quelques lectures électroniques noires, pour notre plus grand bien. L’ordre des billets ne respecte pas mon avis mais l’ordre de mes lectures. Tous ces titres et plus encore sont à retrouver sur le site de Ska : https://skaediteur.net/

Je voudrais juste vous signaler deux choses : La saison 2 d’Itinéraire d’un flic de Luis Alfredo sera traitée dans un billet à part, ainsi que la nouvelle série écrite par plusieurs auteurs à la manière d’un Poulpe et qui s’appelle : Il était N.

Le jour des morts de Régine Paquet 

Deux nouvelles nous sont proposées : Dans l’odeur des lavandes (Accompagnée par l’odeur de la lavande, la narratrice, âgée de 66 ans) annonce à sa fille qu’elle va se marier et veut choisir sa robe blanche immaculée) et Un 15 janvier 1950 (Les femmes se réunissent pour la mort de Chrétien, le géant simplet du village)

Derrière une simplicité et un naturel si difficile à atteindre, Régine Paquet a réussi à me faire pleurer dans Dans l’odeur des lavandes, avec sa chute terrible et si sereine. La deuxième, écrite comme un conte, narre une histoire de village qui deviendra sans nul doute une légende.

Naissance des ogres de Alain Emery

Le corps de Rubens Carat est découvert dans la rivière, la gorge tranchée. Il fabriquait de l’alcool dans ses alambics clandestins et était connu pour être colérique et violent. Le lieutenant Dessouches mène l’enquête et focalise son attention sur Rudy Mayence.

L’auteur nous convie à un voyage temporel au début du vingtième siècle, pour une intrigue située dans un village et où la justice consiste surtout à se débarrasser des gens qui déplaisent. Accompagné d’une plume fort agréable, très classique dans la forme, cette nouvelle se termine dans un rire jaune sarcastique et mystérieux.

L’empathe saute le pas de Claude Picq

Quand on parle du Tréport, on pense à ses falaises. Les petites vieilles qui en sont tombées aussi, probablement, mais pas longtemps. Quand on en dénombre trois en un mois, cela s’appelle une hécatombe. Georges Marchais travaillait à la Poste, jusqu’à ce qu’il se découvre Empathe, capable de ressentir des émotions sur les scènes de crime. Depuis, il est devenu policier et travaille sur des missions particulières, telle celle-ci.

J’avais découvert Claude Picq sous le pseudonyme de Cicéron Angledroit tout récemment. Ce fut une surprise de le retrouver chez Ska pour une nouvelle série maniant l’humour noir et la verve, comme à son habitude. On suit donc l’homonyme de l’ex-premier secrétaire du parti communiste dans sa première affaire qui se délecte pour ses bons mots, malgré des paragraphes trop longs à mon gout.

Carrousel d’Aline Tosca

La brune, grande, masculine, androgyne regarde dans les rayons à la recherche d’une paire de chaussures. La blonde, féminine, aux formes généreuses l’observe avant de se préparer à prendre son poste à la poissonnerie. Le chef du magasin quant à lui se sent bien seul au milieu de ces femmes.

Aline Tosca m’a surpris avec cette esquisse, ce tableau représentant un supermarché et sa galerie. De portraits en mouvements éthérés, elle donne l’impression de tracer des traits sur sa toile, donnant à l’ensemble une impression de douceur et d’impressions, que viennent rehausser les impressions de solitude et de mal-être des personnages. Cette nouvelle est une superbe illustration des gens qui se suivent, se rencontrent, s’entendent, parfois s’écoutent mais jamais ne vivent ensemble.

Les lendemains qui déchantent de Sébastien Géhan

Dimanche matin, enfin, 13h06. Malgré une douche froide, le narrateur est harcelé par un mal de tête lancinant, conséquence de la cuite de la veille. En prenant la direction du Palace, supérette tenue par des asiatiques, Il finit au Vincennes, le bar-PMU, le temps d’avaler une mousse et de faire un pari aux courses de chevaux, puis continue son périple.

Dans une ville peuplée d’âmes en peine, l’auteur raconte une errance de lendemain de cuite, le genre de trajet parsemé de rencontres inédites, pour peu que l’on s’intéresse aux gens. Parsemé d’anecdotes plus vraies que nature, l’auteur arrive à nous faire vivre une ville morte en apparence, et termine avec un optimisme bienvenu.

L’imposition du cireur Touchet de Jean-Hugues Oppel

Le Trésor Public réclamait à Jean-Louis Touchet, artisan cireur de chaussures établi à son compte, une somme astronomique. Ce qui obligea le brave homme à se reconvertir … et pourquoi ne pas envisager d’écrire un polar ?

A la fois hommage à Jean-Patrick Manchette et clin d’œil à des anciens du polar, cette histoire courte est savoureuse et cynique à souhait. On ne peut résister au rire qui nous prend malgré le malheur qui frappe ce pauvre Touchet.

Les fumiers de Pierrisnard

Ah, ça discute dans les bars de ce village de campagne ! Ah, ça rigole de mauvaises blagues, de foutage de gueule devant le Ricard ! Ah, ça énerve de les voir, les piliers de bar, toujours prêts à se plaindre alors qu’ils planquent des lingots dans leur jardin ! Les fumiers !

Je ne peux m’empêcher de faire ma propre accroche sur cette nouvelle qui fleure bon les vieux imbibés qui refont le monde tous les jours. Avec son style parlé, son agressivité qui tourne à la haine, l’auteur se laisse aller à une histoire noire mais jouissive avec un ton original. Un auteur à suivre, pour sûr.

Quand je serai grand, je serai tueur en série de Gaëtan Brixtel

Monsieur G. tel qu’il veut qu’on le nomme reçoit dans sa cellule sa psychologue Claire Frémont, qui doit évaluer son état. Il raconte alors comment il s’est présenté chez les parents de Mélanie Dariel pour leur annoncer comment il l’avait tuée.

On trouve dans cette nouvelle une bonne dose d’humour noir, où le tueur en série explique posément et poliment comment et pourquoi il a tué ces gens, qui sont pour lui extrêmement malpolis et agressifs. Une lecture jouissive.