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Mortels trafics / Overdose de Pierre Pouchairet

Editeur : Fayard / Livre de Poche

Prix du quai des Orfèvres 2017, ce roman a été adapté par Olivier Marchal sous le titre Overdose et réédité à cette occasion au Livre de Poche. Nous faisons donc connaissance avec Léanne Vallauri.

La base militaire anglaise du détroit de Gibraltar est en émoi : un Zodiac navigue dans leur direction. Par peur d’un attentat, la caserne se mobilise, avant de s’apercevoir que le bateau se dirige vers la plage toute proche. Ahuris, les militaires assistent à distance, à travers leur paire de jumelles au débarquement de nombreux paquets de drogue sur la plage réservée aux touristes.

A l’hôpital Necker de Paris, la brigade criminelle est appelée d’urgence. Deux enfants ont été assassinés et on a peint sur les murs « Allahu Akbar » avec le sang des victimes. Le commandant Patrick Girard va être chargé de cette affaire, pour savoir s’il y a un lien avec les réseaux extrémistes. Quand ils vont rendre visite à la mère d’un des jeunes enfants qui loge chez un cousin, ils s’aperçoivent qu’elle a disparu.

La brigade des stupéfiants de Nice s’apprête à arrêter un réseau de trafiquants de drogue, dès qu’ils passeront la douane. Un de leurs indics les a prévenus que des BMW vont faire le trajet de Marbella à la France comme de simples touristes … finis les Go-Fast. Avec l’aide des autorités espagnoles, la commandante Léanne Vallauri va suivre la progression des véhicules jusqu’à ce qu’un accident sur l’autoroute ne chamboule leur plan.

Comme tous les lauréats du Prix du Quai des orfèvres, ce roman offre une bonne intrigue et nous montre tous les rouages du système policier en respectant les relations entre la police et la justice et ici, particulièrement, les relations entre les différents services. Contrairement à d’autres romans, on ne va pas assister à une guerre entre services mais bien à une collaboration entre la police judiciaire et la brigade des stupéfiants.

J’ai particulièrement apprécié les personnages et la façon dont Pierre Pouchairet les a créés, avec Léanne que l’on retrouvera ensuite dans la série des Trois Brestoises et Patrick Girard. Malgré le grand nombre de personnages, on ne se retrouve jamais perdu et on alterne entre les différents lieux avec une aisance remarquable, aidés en cela par un style fluide et une construction maitrisée.

Et dès le début du roman, on se sent pris par le rythme de l’action. Malgré le fait que l’on parle d’un « Go-Slow », on ressent une célérité, une vitesse, un rythme qui nous empêche de lâcher ce roman. Du transfert de la drogue à l’enquête sur les meurtres d’enfants, les pièces du puzzle vont se mettre en place avec en filigrane une certaine urgence à boucler les dossiers pour cause de réduction de budget. Pierre Pouchairet nous offre avec Mortels Trafics (ou Overdose) un polar agréable, costaud, bien fait.

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Larmes de fond de Pierre Pouchairet

Editeur : Filature(s)

Au rythme où Pierre Pouchairet publie ses romans, je dois avouer que j’ai du mal à suivre. J’avais le choix entre lire les deux petits derniers de la série Les trois brestoises, achetés lors de mes vacances estivales, ou bien lire celui-ci qui sort dans une toute nouvelle collection. On retrouve dans ce roman toutes les qualités que j’adore chez cet auteur.

Quimper. Yvonnick Oger tient une petite boutique de réparation informatique. Au moment de fermer, une sexagénaire lui apporte, affolée, son ordinateur qui n’a pas apprécié la dernière mise à jour. Rentré chez lui, il retrouve sa compagne Sandrine avec qui il partage son amour de la plongée sous-marine. Un coup de fil va abréger sa soirée : on a besoin de lui pour une mission pour récupérer un conteneur en forme de torpilles sous l’eau, de la part d’un de ses clients qui penche du coté des fachos.

Quimper. Jean de Frécourt a dépassé les soixante-dix ans après avoir magouillé auprès de tous les politiques de tous bords. En rentrant chez lui, un livreur lui amène un paquet, avant de le malmener avec un couteau. Puis on lui met une cagoule sur la tête et il atterrit dans le coffre d’une voiture, puis dans un bateau. Il doit se rendre à l’évidence, il vient de se faire enlever et se demande ce que ses ravisseurs lui veulent.

Brest. En ce dimanche matin, Léanne se réveille difficilement après le bœuf qu’elle a fait la veille au soir avec ses deux amies Sandrine et Elodie. Après un footing, direction le commissariat central où elle est sure de ne trouver personne. Elle en profite pour passer en revue ses écoutes téléphoniques en cours sur un jeune geek potentiellement livreur de drogue et un homme d’affaires douteuses. Les discussions sur le téléphone de de Frécourt montrent sa femme Gisèle affolée : elle est persuadée que l’on a enlevé son mari.

Divisé en trois parties, ce roman va réunir les deux sœurs que les habitués des romans de Pierre Pouchairet connaissent bien. La première est consacrée à Léanne, la deuxième à Johanna et la troisième se nommant Deux flics peut se passer de commentaires. L’intrigue commence donc en Bretagne, fait ensuite un détour à Nice puisque Johanna vient d’y être nommée commandant.

Deux lieux différents, deux enquêtes différentes, mais deux personnages de femme flic qui ont les mêmes qualités : une force humaine hors du commun. Toutes deux ont leurs failles, leurs cicatrices, faute à un passé tumultueux et à des regrets pesants : Léanne a vu son mari mourir et Johanna est affublée d’un boitement suite à une affaire précédente. Toutes deux ont plutôt tendance à être des têtes brulées.

Même si on n’a pas lu les enquêtes précédentes, Pierre Pouchairet nous explique brièvement les affaires précédentes, non pas pour spolier les histoires mais pour justifier la psychologie de ses personnages. Et ces enquêtes-là, qui vont se rejoindre, vont encore une fois malmener nos deux héroïnes et mettre à jour des complots qui démontrent une fois de plus l’étendue de l’imagination de l’auteur. En fait, Pierre Pouchairet donne à son œuvre une cohérence globale avec ce roman qui fait le lien entre le cycle des trois Brestoises, Tuez les tous et La prophétie de Langley.

Comme bien souvent, quand l’auteur a exercé le métier de flic, l’intrigue suit scrupuleusement les étapes d’une enquête, ce qui donne un accent vrai à l’histoire et c’est grandement appréciable. Et encore une fois, on se retrouve avec un super polar, au rythme trépident qui ne vous lâchera pas du début à la fin. Les romans de Pierre Pouchairet sont comme une drogue dure : quand on y a goûté, on ne peut plus s’en passer et on ne rêve que d’une chose, en reprendre un autre.

Les 3 brestoises tomes 2 et 3

Depuis Haines, j’ai découvert le personnage de Léanne Vallauri, qui a vu le jour dans Mortels trafics, prix du Quai des Orfèvres 2017. Depuis qu’elle revenue à Brest, elle a retrouvée ses deux amies d’enfance, Elodie médecin légiste et Vanessa psychologue judiciaire. Ses deux dernières enquêtes viennent de paraître aux éditions du Palémon, toujours sous la plume de Pierre Pouchairet.

La cage de l’Albatros :

Cela fait 25 ans, 3 mois et 22 jours que Jean-Luc Kernivel est veuf pour son bonheur. Depuis, il collectionne les aventures féminines. Chaque matin, il fait un footing pour entretenir sa forme. Comme il fait beau, il va pouvoir suivre le sentier des falaises, son préféré. A mi-chemin, il longe un parking et sent quelqu’un qui le suit. Un peu plus loin, il se sent poussé vers le précipice et subit une chute mortelle.

En planque dans une voiture, Léanne attend le bon moment pour déclencher la descente visant une énorme livraison de drogue, en compagnie de Noreen Lebel, la petite nouvelle. Quand l’action se déclenche, tout ne se déroule pas comme il faut et Léanne se retrouve menacée par un trafiquant. Noreen n’hésite pas un seconde et abat le truand. Léanne va devoir gérer ce cas devant la Police des polices.

Que ceux qui n’ont pas lu le premier tome se rassurent, ils peuvent lire celui-ci sans être gênés. Par contre, ce roman est bien la suite du précédent, et fait référence à des personnages qui ont été présentés dans Haines. Je ne peux que vous conseiller de lire donc Haines avant de lire celui-ci.

La cage de l’Albatros dispose des mêmes qualités que le précédent, à savoir une enquêtes classique avec plein de fausses pistes, des personnages forts et réalistes, et surtout une impression de plonger dans une enquête réaliste. Je dois dire que je suis épaté de lire comment Pierre Pouchairet arrive à insérer ses trois personnages féminins dans une même enquête, sans qu’aucune d’elles ne reste au second plan.

Avec de telles forces de caractère, je verrai bien cette série adaptée en série télévisée, car on y trouve tous les ingrédients pour passionner le spectateur. Il est à noter les nombreux clins d’œil faits aux collègues, dont Nicolas Lebel ou Olivier Norek qui donnent un aspect plus léger à une enquête qui s’avère bien noire. Et la fin est bien noire comme il se doit, et donne envie de lire la suite immédiatement. Ce qui démontre qu’il y a une forme d’addiction à lire les enquêtes des 3 brestoises.

L’assassin qui aimait Paul Bloas :

Rien ne va plus pour Léanne, puisqu’elle vient d’être mise en examen par l’’IGPN (la Police des Polices) suite à sa précédente affaire. C’est une nouvelle affaire qui lui permet de s’en sortir, mais elle n’aura pas droit à l’erreur. Un cadavre a été découvert dans les tunnels qui peuplent les alentours de Brest : le corps a subi de nombreuses coupures puis une mise à mort par poignard. A-t-il été torturé ? Bien vite, les équipes trouvent un deuxième corps et Léanne se voit affublée de 4 autres morts suspectes et identiques, bien que le coupable soit soi-disant sous les barreaux.

Autant on peut lire le précédent tome sans avoir lu les autres, autant il vaut mieux avoir lu La cage de l’Albatros avant d’entamer celui-ci, puisqu’il en est directement la suite. Je ne louerai jamais assez le talent de Pierre Pouchairet pour bâtir des intrigues complexes en les rendant à la fois simples et passionnantes. On a l’impression que l’histoire se déroule normalement comme dans la vraie vie, aidée en cela par un souci de véracité qui rend cette lecture addictive.

On retrouve les trois femmes aux affaires, Vanessa, Elodie et Léanne en proie avec une intrigue bien difficile à démêler et avec cette urgence dans l’écriture que j’adore. La visite des tunnels (les mines et ceux reliant les blockhaus entre eux) est passionnante et certaines scènes sont impressionnantes. On aura droit aussi à une fin haletante ce qui démontre une fois de plus que Pierre Pouchairet respecte les codes du polar en les adaptant à sa façon de raconter. Et c’est encore une belle réussite à mettre au crédit de cet auteur prolifique pour notre plus grand plaisir.

Honneur à Pierre Pouchairet

A force d’entasser les romans, il était temps que je me penche sérieusement sur les romans de Pierre Pouchairet et tente ainsi de rattraper mon retard.

L’auteur :

Biographie réalisée par mes soins à partir de celle disponible sur le site de l’auteur : https://pierrepouchairet.com/biographie/

Pierre Pouchairet, né en 1957, est un écrivain français, auteur de roman policier.

Après avoir intégré l’école des inspecteurs de police à Cannes écluses en 1980, il commence sa carrière dans la police judiciaire à Versailles. Jusqu’en 2012, il passera de la police judiciaire à la brigade des stupéfiants, et exercera son métier de Marseille au Kazakhstan en passant par Beyrouth, Ankara, Grenoble, ou l’Afghanistan.

A partir de 2012, il prend sa retraite et se consacre à l’écriture. Son premier polar sort en 2014, Coke d’azur (Editions Ovadia). Depuis 2014, ce ne sont pas moins de 10 polars écrits et publiés par cet auteur prolifique, chez Jigal, Plon et les Editions du Palémon. La reconnaissance advient en 2016, quand il remporte le Prix du Quai des Orfèvres avec Mortels trafics en 2016.

Les romans de Pierre Pouchairet peuvent se diviser en deux catégories, tout en restant dans le genre « polar ». D’un côté, des intrigues évoquant le crime international et la géopolitique ou le terrorisme, d’un autre coté des romans policiers nationaux. A chaque fois, ce sont des intrigues solides portées par des personnages forts et vivants. Du pur plaisir de lecture.

Haines :

Editeur : Editions du Palémon

Léanne Galji, l’héroïne de Mortels trafics (que je dois lire) a choisi de quitter la brigade des stups pour sa Bretagne natale. A la tête de la Police Judicaire de Brest, elle doit s’occuper de sa première « grosse » affaire : Un meurtre vient d’être signalé. Corentine Ledantec, une dame âgée de 89 ans a été retrouvée assassinée à son domicile. Vraisemblablement, elle a été frappée et étranglée. De là à penser à un cambriolage qui a mal tourné, il n’y a qu’un pas. Mais la Bretagne, c’est aussi l’occasion pour Léanne de retrouver ses amies d’enfance, à savoir Elodie, médecin légiste et Vanessa, psychologue. Ces trois jeunes femmes, les trois Brestoises, vont chacune participer à la résolution de cette enquête.

Pierre Pouchairet va construire un roman policier classique, dont l’intrigue est simple, mais sans renier pour autant les fausses pistes et les mystères. Et il faudra bien compter sur les aides de ses amies pour arriver à une conclusion pour le moins étonnante. Et je peux vous dire que quand un roman policier est bien fait, bien mené, bien construit, bien écrit, sa lecture devient passionnante. Il m’aura fallu 2 jours pour dévorer ce roman. Tout sent le vécu : les personnages sont vrais, les situations sont vraies, le déroulement de l’intrigue est vrai.

J’ajouterai juste une chose. Il faut un sacré talent pour ne pas en dire trop sur l’enquête précédente de Léanne, et pour plonger le lecteur dans un contexte nouveau sans le perdre. N’ayant pas lu Mortels trafics, je n’ai jamais été perdu. Et j’ai tout de suite adhéré aux trois personnages principaux. On a l’impression de les avoir toujours suivies, de les avoir toujours connues. Il se créé une certaine connivence avec le lecteur, ce qui est très fort. Bref, du début à la fin, ce fut une belle lecture plaisir, de celles qui font passer le temps très agréablement. Du vrai bon roman populaire, du vrai bon roman de gare, dans le bon sens du terme.

A noter que le tome 2, La cage de l’albatros, est sorti et que le tome 3 devrait sortir en mai. J’aurais donc l’occasion d’y revenir.

A l’ombre des patriarches :

Editeur : Jigal

Changement de décor, changement d’ambiance.

Jérusalem. Le corps d’une jeune femme dévêtu est découvert dans un terrain vague. Guy et Dany, deux flics de la police judiciaire israélienne (rencontrés dans Une terre pas si sainte) vont être chargés de l’affaire. Et il s’agit bien d’une affaire brûlante, car la jeune morte, juive, est retrouvée en plein quartier arabe. De quoi exacerber les tensions entre deux peuples qui se détestent et sont obligés de cohabiter. Il leur faut d’abord déterminer l’identité de la morte, puis suivre les premières pistes, dont de jeunes arabes qui jouent au football dans ce terrain vague.

Je ne veux pas en dire plus sur ce roman, tant j’ai peur de vous aiguiller sur la piste, mais aussi parce que l’intrigue foisonne de pistes, de personnages et d’ambiances lourdes. A partir d’un départ classique, Pierre Pouchairet nous plonge sans ménagement dans un contexte pesant de guerre, d’occupation, de haine, de racisme, de violence. Sans prendre parti et se contentant d’être factuel, il nous décrit une situation où l’on se rend compte qu’il n’y aura jamais d’issue, ni facile, ni positive mais forcément dramatique.

C’est en scrutant ses personnages, en décrivant leurs réactions, tout en restant en retrait dans un style clinique, froid, journalistique que Pierre Pouchairet nous montre un pays sous haute tension. A chaque minute, on peut être enlevé, tué, être victime d’un attentat ou même d’une agression. Et tout est fait pour monter les deux camps l’un contre l’autre, ce qui va à l’encontre des pseudo-efforts des grands pays « civilisés » qui veulent œuvrer pour la paix dans cette zone stratégique.

Cet écart entre ce que l’on nous raconte à la télévision par exemple et ce que Pierre Pouchairet nous montre est frappant, le résultat brutal. Et Pierre Pouchairet connait bien le sujet, pour avoir vécu sur le terrain. On comprend bien qu’au final, le combat, la haine est tellement ancrée chez chacun que cela ne peut que mal se terminer. Alors que ce roman n’est pas un reportage sur la situation de cette zone, il nous en montre bien plus que beaucoup d’émissions télévisées et est en cela bien plus précieux. C’est un excellent polar qu’il ne faut rater sous aucun prétexte.