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La chronique de Clara : Marche ou crève de Stephen King

Editeur : Livre de Poche

Traductrice : France-Marie Watkins

Depuis la Rome Antique, les auteurs ont pointé des méthodes pour occuper un peuple sous un régime autoritaire par l’expression « Panem et circenses ». Dans une société toujours plus violente, de nombreux artistes ont imaginé ce que l’avenir pourrait devenir en termes de divertissements brutaux voire mortels. Nous pourrions citer les exemples de Hunger Games (2008), Squid Game (2021), Battle Royale (2000). Dans la bibliographie du célèbre auteur Stephen King, on peut également trouver ce genre de livres : Running Man (1982) ou encore Marche ou Crève (1979).

Le roman dystopique Marche ou Crève, dont le titre original est The Long Walk, a été publié en 1979 par Stephen King sous le nom de Richard Bachman. Ce roman peint une société dans laquelle 100 adolescents se portent volontaires pour participer à une course, la Longue Marche. La marche a lieu à travers les Etats-Unis en partant de la frontière canadienne et passant par l’état du Maine. Chacun se voit attribuer un numéro. Ils doivent marcher le plus longtemps possible entourés par des militaires, dirigés par le « Commandant », qui sont en charge de leur apporter de la nourriture et de l’eau. Si un coureur s’arrête, il est « éliminé ». Autrement dit, il meurt tué par un soldat armé après trois avertissements, « il reçoit son ticket ». A la fin, il n’en restera qu’un qui remportera une somme d’argent importante et un « prix » qui peut prendre la forme qu’il souhaite.

Le personnage principal, Ray Garraty, le numéro 47, originaire du Maine, se lie vite d’amitié avec d’autres marcheurs comme Peter McVries, numéro 61, ou Artur Baker, numéro 3, malgré le fait qu’il sache que seul l’un d’entre eux ressortira vivant de cette course. Cependant, un mystérieux marcheur retient l’attention de Garraty : Stebbins. Ce dernier ne parle à personne, marche seul à une vitesse régulière et semble avoir beaucoup de connaissances sur la Longue Marche.

La dystopie de ce livre repose sur le principe même du jeu : « marche ou crève » (expression militaire liée aux batailles sur le front d’une guerre). Les adolescents doivent marcher pour sauver leur vie dans une société qui n’a aucune pitié, prête à tuer. Ces mêmes adolescents sont volontaires pour participer à cette course, ils sont assez fous pour vouloir participer à un jeu pouvant potentiellement les tuer. Les marcheurs sont totalement déshumanisés avec des numéros qui leur sont attribués et qui les qualifient.

Les Etats-Unis sont devenus un régime totalitaire, une dictature militaire où des gens misent de l’argent sur le marcheur qu’ils veulent voir gagner et ne se rendent pas compte de l’atrocité de cette course. Les concurrents sont exposés sur la route au milieu de la foule, dont la cruauté est infâme, comme des bêtes de foire. L’armée contrôle cette course : ils encadrent les coureurs et sont chargés de les exécuter lorsqu’ils s’arrêtent. Le pays récompense le vainqueur pour avoir survécu plus longtemps que tous les autres malgré l’épuisement physique et mental, donc le gagnant a vu les autres coureurs mourir devant ses yeux.

Les liens sociaux entre les personnages est un des thèmes les plus développés du roman. En effet, les interactions entre les marcheurs sont limitées, ils savent qu’ils verront leurs partenaires mourir donc certains essayent de rester seuls et de réduire les contacts avec les autres. Mais il existe aussi un lien entre les coureurs et la foule. Les habitants des Etats-Unis encouragent, sur le bord de la route, les concurrents pour les voir souffrir, se dépasser rendant ainsi inhumaine cette course tandis que les candidats doivent tout faire pour leur plaire car, bien évidemment, la foule n’encourage que les participants qu’elle aime.

Ce roman comporte un certain côté visionnaire puisqu’il a été rédigé il y a environ 40 ans mais il ressemble fortement aux jeux télévisés actuels, comme Koh-Lanta ou Survivor, où l’on voit des participants souffrir pour sauver leur vie. On peut trouver le même principe aux informations diffusées à la télévision où l’on nous montre de plus en plus de personnes souffrantes, avec par exemple la guerre en Ukraine où les chaînes d’informations retransmettent des images de rescapés des bombes lancées par la Russie. Le but de ce livre est de montrer une société dans laquelle le gouvernement abreuve le peuple avec des jeux de plus en plus violents, de montrer comment une société dictatoriale parvient à tenir son peuple avec des jeux brutaux car l’humain est de nature agressive. Ainsi, la violence est toujours plus présente à la télévision surtout maintenant avec les séries, les films, la téléréalité…

J’ai lu ce roman l’été dernier. Je voulais faire une pause dans Le Rouge et le Noir donc j’ai acheté ce livre. En deux jours il était terminé. J’étais captivée du début à la fin. Je le lisais partout et tout le temps. A la plage, le soir dans mon lit, le matin au petit déjeuner. Le rythme était tel que je ne pouvais pas arrêter, je voulais sans cesse connaître la suite et surtout connaître le fameux vainqueur. Je me suis retrouvée à la place d’un voyeur avide de violence exactement comme les spectateurs du livre sont assoiffés de voir les coureurs souffrir.

Stephen King détaille avec précision la psychologie de chaque personnage ce qui en fait un des sujets principaux du livre. Nous nous attachons à leur histoire, leur caractère et on veut de moins en moins les voir mourir car nous le savons tous : il n’en restera qu’un. Nous sommes placés dans l’esprit de Garraty, nous avons accès à ses pensées, ses douleurs à la fois physiques et psychologiques. Nous le suivons tout au long du livre et nous le voyons tenter de donner un sens à sa vie et à sa présence dans ce jeu. Ainsi, nous avançons dans la Marche avec lui, accompagnés de ses pensées. C’est là une des choses les plus incroyables de ce livre : l’auteur possède le pouvoir de créer un lien fort entre le lecteur et les personnages, nous rendant ainsi plus difficile leur mort.

J’adore surtout l’auteur. Si j’ai acheté ce livre c’est parce que je savais que Stephen King l’avait écrit. J’aime son style d’écriture, ses idées, ses histoires. Il est probablement mon auteur préféré. Ce roman nous invite à nous questionner sur notre rapport aux jeux télévisés, à remettre en question nos sources de divertissement. Stephen King souhaite, dans la plupart de ses ouvrages, faire passer un message.

Le principe du jeu en lui-même est affreux mais il ne m’a pas choqué. C’est peut-être parce que, comme veut le dénoncer King, j’ai pris l’habitude de voir ce genre d’horreurs à la télévision. Je me suis même surprise à vouloir voir certains personnages mourir, ceux que j’aimais le moins, seulement pour faire avancer l’action.

Ma scène préférée est lors du premier coureur tué. C’est à ce moment que tous les autres personnages comprennent les enjeux réels de la marche. Ils comprennent également qu’en choisissant de participer, ils mettent leur vie en jeu. Certains ne savent même pas la raison pour laquelle ils se sont engagés dans cette marche folle mais ils continuent pour éviter la mort.

Malgré le fait que ce soit une longue marche insistant sur le côté physique des personnages, leur mentalité est aussi mise à rude épreuve. Ils doivent creuser, au plus profond d’eux-mêmes, cette volonté de vivre à tout prix même si, pour cela, ils doivent regarder tous les autres concurrents mourir avant eux.

La fin est particulièrement touchante. Je ne voudrais pas dévoiler le dénouement donc je vais essayer de donner le moins de détails possible. Le vainqueur de la course, le dernier survivant, n’est plus du tout humain. Il ressemble plus à un zombie marchant avec toujours la foule qui l’acclame. Dans cette scène, nous pouvons voir à quel point les gens peuvent être horribles : ils saluent un homme qui n’en est plus un, il s’apprête à être récompensé pour avoir survécu plus longtemps que tous les autres.

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La chronique de Clara : Dôme de Stephen King

Editeur : Albin Michel (Grand Format) ; Livre de poche (Format Poche)

Traducteur : William Olivier Desmond

Comme je vous l’ai déjà dit, ma fille Clara (bientôt 15 ans) est une liseuse passionnée. Heureusement, quelques professeurs de français leur demandent de faire des billets, pour donner envie à leurs camarades de lire. Elle a donc dévoré ces deux tomes de Dôme et m’a donné l’autorisation de publier son avis ici. Le voici donc :

Ce livre a été écrit entre 2007 et 2009. Il a été traduit par William Olivier Desmond. Stephen King est un célèbre auteur de romans américain. Il rencontre son premier succès en 1974 avec Carrie. Tous ses livres se passent dans le Maine car c’est là-bas qu’il a grandi. Je vais d’abord parler du thème et du registre du livre Ensuite je vais présenter la situation initiale. Puis je vais expliquer le déroulement de l’histoire et enfin je vais raconter un passage que j’ai apprécié.

Thème traité et registre :

Le thème principal traité est l’histoire avec une allégorie du totalitarisme. Le registre de ce livre est un registre fantastique.

Situation initiale :

L’histoire se passe dans Chester’s Mill, une petite ville du Maine en forme de chaussette, peu avant Halloween vers 2008/2009. Il n’y a pas de personnage principal, c’est la vie de toute une ville pendant le dôme, mais j’ai choisi de présenter trois d’entre eux.

Jim Rennie, surnommé « Big Jim », est le 2eme conseiller de la ville. Il est aimé de presque tout le monde. Il rêve de mettre la ville sous sa coupe pour pouvoir la contrôler.

Dale Barbara, surnommé « Barbie », est cuisinier au petit restaurant de la ville. Il a eu un incident avec le fils du 2eme conseiller, Junior, et depuis, presque toute la ville le déteste. Il voulait partir de Chester’s Mill mais le dôme est tombé à ce moment là.

Julia Shumway est la rédactrice en chef du journal local, The Democrat. Elle déteste Big Jim et aime dire du mal de lui dans son journal. Elle se lie d’amitié avec Barbie pendant le dôme.

Déroulement de l’histoire :

Un matin d’octobre, à Chester’s Mill dans le Maine, un phénomène inexplicable se produit : un champ de force invisible bâti tout autour de la petite ville apparaît, le dôme. Il cause beaucoup de morts lors de son apparition et en causera encore plus au cours du temps. Big Jim, 2eme conseiller de la ville, profite de la situation pour contrôler la population effrayée. Une sorte résistance s’installe alors autour de Dale Barbara, « Barbie », un cuisinier. Big Jim et son fils, Junior, veulent la peau de Barbie. L’armée et le gouvernement tentent tant bien que mal de détruire le dôme, d’abord avec une bombe puis avec de l’acide, sans succès.

Barbie, qui était autrefois un soldat de l’armée, est appelé par le gouvernement pour résoudre cette énigme et trouver le potentiel générateur et le faire disparaître.

Big Jim garde beaucoup de secrets notamment le fait qu’il possède un laboratoire de drogue dans la ville. Certains habitants sont au courant de ce laboratoire et ont décidé d’aller lui en parler mais ils ne sont jamais revenus : Jim Rennie élimine les témoins.

Pour imposer son pouvoir, le 2eme conseiller augmente les forces de police qui sont sous ses ordres et, de ce fait, détient la ville dans sa main. La population de Chester’s Mill, qui se trouve dans une situation inédite, décide de croire tous les mensonges de Big Jim pour se rassurer.

Un passage que j’ai apprécié :

Un épisode que j’ai apprécié particulièrement est l’épisode du jeudi sous le dôme :

Barbie et Rusty, un médecin « résistant », sont en prison. Les autres résistants ont décidé de les faire évader ce jour-là car Big Jim tenait une réunion pour tenir les habitants de Chester’s Mill au courant des dernières actualités. Toute la ville était donc à cette réunion. Pendant l’évasion des prisonniers, Junior, le fils de Jim, tente de tuer Barbie. Et pendant ce temps-là, la 3eme conseillère, Andréa Grinnell, déclenche une émeute à la réunion en voulant assassiner Big Jim. Durant tous ces épisodes, les autres résistants partaient se cacher à l’autre bout de la ville.

Dans ce passage, plusieurs actions importantes se passent en même temps mais l’auteur a réussi à tout détailler. C’est un épisode passionnant grâce à tous ces évènements qui se présentent simultanément.

Ce livre a été écrit par un des plus grands auteurs du monde. Il est plein d’actions. Il critique le totalitarisme et amène le lecteur à réfléchir à sa réaction, ainsi qu’à sa nature, en situation de crise. J’ai beaucoup aimé ce livre et j’espère qu’il vous plaira, si vous le lisez.

Déstockage : Doctor Sleep de Stephen King

Editeur : Albin Michel (Grand Format) ; Livre de Poche (Format Poche)

Traducteur : Nadine Gassie

Quand ce livre est sorti en grand format, je l’ai acheté de suite, en me disant que j’attendrai le bon moment, la bonne envie avant de le lire. Ce moment est arrivé … car Shining fait partie de mes lectures marquantes de jeune adulte. J’ai été surpris et emballé par cette suite.

Danny Torrance et sa mère Wendy ont réussi à s’enfuir de l’hôtel hanté, l’Overlook, et les propriétaires leur ont donné des indemnités pour l’explosion de la chaudière et les déboires qu’ils ont connus. Ils pensaient pouvoir tourner la page, jusqu’à ce que Danny voie un spectre apparaître dans leurs toilettes. Il fait donc appel au cuisinier Dick Halorann, qui lui apprend comment emprisonner les esprits dans sa tête.

Les années ont passé, mais les cauchemars et les visions n’ont jamais cessé pour Dan. Le seul moyen qu’il a trouvé est de se noyer dans l’alcool. Il lui arrive de se réveiller à coté de quelqu’un et de n’avoir aucune idée de son identité. A force de déambulations, il se retrouve à Frazier et trouve un poste d’infirmier dans l’hospice Helen Rivington en échange de la promesse d’arrêter de boire qu’il fait à Kingsley et de participer à des réunions d’Alcooliques Anonymes.

Mais son Don ne le laisse pas tranquille. Il lui permet de soulager les malades en fin de vie, mais aussi de prendre contact avec une fillette, Abra, née en 2001. Alors qu’elle avait quelques mois, elle a fait une crise de pleurs de plusieurs jours annonçant le 11 septembre. Depuis, son Don n’a cessé de grandir et elle trouve en Dan l’ami dont elle a besoin et qui comprend son état. Surtout, son pouvoir est d’une force gigantesque.

Ils s’appellent les Vrais et ils cherchent l’immortalité. Ni êtres humains, ni spectres, ils enlèvent de jeunes gens ayant le Don, les torturent jusqu’à la mort pour avaler la vapeur qui sort de leur corps. Cette brume leur apporte plus de vie. Leur troupe est menée par Rose O’Hara, Rose Claque comme l’appellent les membres du Nœud Vrai. Ils ont tous des noms étranges, et Rose est la plus puissante du groupe. D’ailleurs, Rose a ressenti une fillette très puissante. Ils vont se mettre à sa recherche.

Ceux qui ont lu Shining en gardent un souvenir énorme, comme une part de leur enfance. Ceux qui ont vu le film seront quelque peu désappointés. C’est pour cela que je vous conseille de lire Shining avant. Car toute la première partie fait la transition entre avant et après. Et après, c’est Doctor Sleep, et cela n’a rien à voir avec Shining si ce n’est le personnage principal. Vraisemblablement, Stephen King a voulu écrire une suite en écrivant autre chose, mais cet autre chose est très proche de lui et lui tient à cœur. Car ce roman regorge de passion et de thèmes forts.

La grande force, ce sont ses personnages. Danny qui devient Dan, est détestable en tant qu’alcoolique qui touche le fond au début du roman ; puis il devient touchant dans sa volonté de se racheter. Abra partage la vedette avec Dan et elle tient le haut du pavé tant sa présence est forte et sa psychologie très fouillée. Les Vrais ensuite sont effrayants au possible et par seulement Rose Claque. Tous ont une présence spectrale qui vous fait frissonner. Enfin, tous les autres personnages secondaires ont une importance et sont tous vraiment bien faits. C’est la magie King.

L’intrigue est simple : Dan va rencontrer Abra et devoir lutter contre les Vrais. Dit comme ça, ce n’est pas engageant. Mais c’est oublier le plaisir que l’on a à rencontrer des gens pas comme les autres et de visiter les Etats-Unis à travers les yeux du King. Car toute scène devient l’objet d’un mystère qui fait monter le stress, juste par de petites expressions ou par la peinture d’un décor. Et l’on se laisse bercer par le talent unique de conteur du King.

Malgré cela, on ne peut que déplorer quelques traductions maladroites et certaines expressions décidément mal choisies. De même, alors que cela fait presque une trentaine d’années que j’ai lu Shining, j’y ai trouvé quelques scènes où Stephen King étire ses descriptions. Parfois, on a l’impression qu’il remplit des pages, pour faire la bonne taille : 600  Pages.

Malgré cela, le plaisir est grand, intense. On referme le livre avec une satisfaction ajoutée à une impression d’avoir retrouvé un plaisir d’adolescent. On est heureux d’avoir ajouté ce livre à notre culture, parce qu’il parle de la lutte du Bien contre le Mal. Mais aussi parce qu’il parle de transmission : Le rôle que Dick Halorann a eu avec Danny, Dan va devoir l’assumer avec Abra. Et grâce à sa construction complexe (passage d’un personnage à l’autre, sauts dans le temps), si ce roman s’annonce comme la suite de Shining, il s’adresse tout de même à des adultes, des adultes qui veulent revenir quelques années en arrière, mais qui doivent assumer leur rôle de parent.

Quatre pour le prix d’un

Depuis quelque temps, les éditeurs nous proposent des nouvelles ou des novellas en format poche à des prix relativement bas. Voici quatre lectures d’auteurs différents qui peuvent vous donner quelques idées de lecture

Maitres du jeu de Karine Giebel (Pocket)

Maitres du jeu

4ème de couverture :

Il y a des crimes parfaits.

Il y a des meurtres gratuits.

Folie sanguinaire ou machination diabolique, la peur est la même. Elle est là, partout : elle s insinue, elle vous étouffe… Pour lui, c est un nectar. Pour vous, une attente insoutenable. D où viendra le coup fatal ? De l ami ? De l amant ? De cet inconnu à l air inoffensif ? D outre-tombe, peut-être…

Ce recueil comprend les nouvelles Post-mortem et J’aime votre peur.

Mon avis :

Ce recueil proposé à moins de 3 euros est clairement une très bonne affaire.

Post-Mortem nous propose une intrigue machiavélique qui n’est pas sans rappeler les meilleurs romans de Jean Pierre Ferrière. Au menu, un style fluide, et de la créativité dans le scenario qui en fait un excellent moment de divertissement.

J’aime votre peur est plus classique, proposant une course poursuite après un serial killer qui vient de s’échapper d’un hôpital psychiatrique. Si la trame m’a paru déjà vue, je dois dire que la façon de mener l’histoire est bigrement vicieuse et met même mal à l’aise. Mais on a l’habitude avec Karine Giebel !

 

Plein gaz de Joe Hill & Stephen King (JC.Lattès)

plein gaz

4ème de couverture :

Sur une route désolée du Nevada, un gang de motards est pris en chasse par un camion fou, apparemment bien décidé à les éliminer un à un. Il n’existe qu’une seule issue pour sauver sa peau : ne jamais ralentir…

Inspiré par le désormais classique Duel, de Richard Matheson, adapté au cinéma par Steven Spielberg dans son premier film, Plein Gaz marque la première collaboration entre Stephen King et Joe Hill.

Traduit de l’anglais par Antoine Chainas

Mon avis :

L’alliance entre le père et le fils ne m’a pas passionné plus que cela. Soit le roman est trop court, soit il est trop long. En tout état de cause, beaucoup de sujets sont évoqués mais à mon avis juste effleurés ce qui fait que je suis resté sur ma faim, comme par exemple la relation entre le père et le fils, justement. La poursuite apparait tard dans l’histoire et même là, je n’y ai pas entendu le bruit de l’acier que l’on broit, je n’y ai pas vu le sang couler. Et comme je ne me suis pas attaché aux personnages, le résultat m’a paru bien fade et décevant. Finalement, j’ai ressorti le DVD de Duel de Steven Spielberg, et je me suis fait un bon trip autour de ce grand téléfilm.

L’encre et le sang de Laurent Scalese et Frank Thilliez (Pocket)

encre et sang

4ème de couverture :

Au fond d’un vieux garage hongkongais, elle est là. Elle l’attend.

La machine.

Il suffit de taper. Et tout s’écrira, dans la réalité.

Très vite, l’écrivain William Sagnier comprend qu’il tient là l’instrument de sa vengeance. La femme qui l’a trompé. L’homme qui lui a volé son livre. Tous ceux qui l’ont humilié, utilisé, détruit, seront punis à leur tour.

La vie, la mort, la toute-puissance au bout des doigts, là ou se mélangent l’encre et le sang…

Mon avis :

Voici encore une fois une excellente affaire, un roman inédit de deux auteurs reconnus. Et je peux vous dire qu’à la lecture, je me suis éclaté ! J’ai eu l’impression de revenir trente ans en arrière, et de retrouver en train de lire une nouvelle de Stephen King. Car on y retrouve une ambiance impeccable, une inventivité dans cette intrigue fantastique (dans les deux sens du terme. Et quand on a fini les 120 pages de cette histoire, on regrette que cela ne soit pas un peu plus long. Cette histoire, c’est du pur plaisir, de la jouissance littéraire à l’état pur.

Hécate de Frédéric Jaccaud (Gallimard série noire)

hecate

4ème de couverture :

«Le fait divers déverse, divertit, met en branle l’imagination mauvaise de tout un chacun. Sa nécessité ne fait pourtant aucun doute, parce qu’il agite les sentiments de pitié et de mépris sans aucune implication morale ; on ne ressent aucun remords en s’y projetant. Il commence et se termine dans l’impersonnel. Les acteurs de ces petites pièces décadentes n’incarnent personne en particulier ; ils évoluent à l’état brut de caractères théâtraux.»

Le 2 février 2010, Sacha X., médecin de Ljubljana, est retrouvé sans vie à son domicile, le corps déchiqueté par ses trois bullmastiffs. Là s’arrêtent les faits chroniqués en leur temps par la presse internationale. Entre alors en scène un jeune flic, Anton Pavlov, témoin imaginaire de cette scène indescriptible. Cet amoureux secret de littérature se laisse dès lors entraîner dans une quête du sens qui le mènera au-delà de l’obscène : comprendre l’histoire de cette mort étrange, trancher le voile et découvrir derrière celui-ci la beauté, la vérité ou la folie.

Mon avis :

D’un fait divers, Frédéric Jaccaud créé une nouvelle (ou un court roman) qui met franchement mal à l’aise. Entre les scènes explicites et très violente et la descente aux enfers de ce policier, l’auteur pose des questions et laisse le lecteur faire ses propres réponses. Le style de cette nouvelle est formidable, le sujet brulant, et l’ensemble assez impressionnant. On se retrouve en position de voyeur, et on se pose la question de ce qui peut passionner les gens qui s’intéressent aux faits divers. Si le fond est louable et intéressant, la forme parfois « donneuse de leçons » de certains passages peut agacer. En tout état de cause, je vous conseille cette lecture qui est assurément marquante, bien que la violence soit très explicite et donc que certaines pages ne soient pas à mettre entre toutes les mains.

Et n’oubliez pas le principal, lisez !

22/11/63 de Stephen King (Albin Michel)

Cela fait vingt deux ans que je n’ai pas ouvert un roman de Stephen King, depuis La part des ténèbres et Le pistolero sortis en 1991. Peut-être est-ce parce que j’ai considéré à l’époque que ce n’était plus de mon âge ? Cela n’enlève rien à l’œuvre du Maitre du suspense et de l’horreur, ni aux souvenirs que je garde de ces lectures fantastiques dont les plus marquantes sont (de ce dont je me rappelle) Shining, Simetierre, Le gout de vivre ou La peau sur les os. Avec les avis unanimes sur son dernier roman, je ne pouvais que m’essayer à sa lecture, et en même temps me remémorer les formidables moments de suspense et d’angoisse que j’ai vécus grâce à cet auteur.

2001, Maine. Jake Epping est un professeur d’Anglais qui vit seul depuis que sa femme l’a laissé tomber. Plutôt solitaire, il se contente de sa vie faite d’habitudes et de routines comme celles d’aller manger ses hamburgers chez Al Templeton, qui sont si peu chers que tous pensent qu’il s’agit de viande de chat. Un soir, Al lui montre, à l’arrière de sa caravane une brèche qui lui permet de remonter dans le temps en 1958 ; c’est là bas qu’il achète sa viande pur bœuf.

Jake va s’essayer à voyager dans le temps. La première fois est un aller-retour dans la ville de Lisbon Falls. Quand il revient, deux minutes se sont écoulées en 2011. A chaque voyage, il s’écoulera deux minutes et les modifications que Jake apportera au passé, avec leurs conséquences dans le futur seront remises à zéro à chacun de ses voyages dans le passé. Al, qui est atteint du cancer, demande à Jake de tuer Lee Harvey Oswald avant qu’il n’assassine John Fitzgerald Kennedy. Mais Jake veut d’abord sauver la famille d’Harry Dunning qui a été massacrée par son père. C’est le début d’une épopée qui va montrer à Jake que le temps est récalcitrant aux changements qui peuvent influer sur le passé.

Et ces quelques lignes ne font qu’effleurer à peine les cent premières pages. Et je ne sais comment vous dire le plaisir que j’ai eu à dévorer ces 930 pages, la joie de retrouver cette écriture limpide, évidente, hypnotique de Stephen King, cette magie de se retrouver plongé dans un autre monde qui est pourtant le notre, mais quelques dizaines d’années auparavant.

Vous allez trouver plein d’avis sur Internet qui vous diront que ce roman est génial, que c’est le meilleur du Maitre … eh bien, bien que je ne les ai pas tous lus, je pense qu’effectivement, ce doit être son meilleur, tant on sent qu’il a mis son âme dans le personnage de Jake, tant il a mis ses tripes dans cette histoire, tant il a voulu recréer les Etats Unis des années 60 selon Stephen King.

Et quel feu d’artifice ! Car dès que l’on lit quelques lignes d’un chapitre, on est happé par la force d’évocation de cette période dorée, mais sous-jacente de menaces, cette période d’insouciance pour les Américains moyens. Rarement, j’aurais eu la chance de visiter de l’intérieur la vie d’une petite ville avec autant de détails. Rarement j’aurais été imprégné par les couleurs vives du Texas, et par les odeurs nauséabondes des usines qui tournent à plein régime, relâchant leurs fumées noires dans un ciel bleu et limpide. Les descriptions des gens ordinaires d’une petite ville américaine sont exemplaires et tellement imprégnées de vérité, les spectacles de fin d’année scolaires, les fêtes de Noel, les galas de bienfaisance, les matches de football universitaire, tout est fait pour que l’on soit plongé dans cette époque du début des années 60.

Ce roman ne va rien apporter au mystère de l’assassinat de John Fitzgerald Kennedy, même si le sujet central, l’obsession du personnage principal est d’empêcher Lee Harvey Oswald de commettre son meurtre, mais il vous emportera par sa force d’évocation, il vous plongera dans le personnage de Jake Epping, un personnage bon mais qui est obligé de vivre avec un passé inexistant et trouble. Et puis, au détour d’une phrase, d’une description d’un paragraphe, Stephen King le grand va vous surprendre, faire monter la tension juste par quelques mots. C’est incroyablement bien fait, cette façon de dérouler son histoire pour s’amuser à nous planter un coup de poignard dans le dos.

Il y a tout dans ce roman : De l’aventure, de l’amitié, de l’amour, du suspense, bref tous les ingrédients pour passionner le plus difficile des lecteurs. Cela m’a rappelé les romans où l’on se passionne pour un héros qui se bat contre des éléments plus forts que lui, et ici nous avons droit à la lutte d’un homme contre le temps. Stephen King se permet même de comparer 1958 à 2011, en disant que finalement, aucune des deux époques n’est meilleure que l’autre, il ne tient qu’à chacun d’entre nous de faire le bien.

Il s’est passé quelque chose d’extraordinaire pendant que je lisais ce livre : je l’ouvrais pour lire un peu, j’étais emporté par cette aventure jusqu’à ce que je lève les yeux de ces pages ensorcelantes, et je m’apercevais que je venais de passer une heure en 1958. Magique ! cela m’est rarement arrivé, cette sensation d’être à ce point immergé, envouté par une intrigue, effrayé par une menace étrange que l’on a du mal à nommer.

Avec ce que je viens de résumer, nul doute que vous allez vous jeter sur ce roman, en courant comme un dératé chez votre libraire. Vous ne serez pas déçu par ce roman intemporel, par cette aventure temporelle, où Stephen King donne tellement et où le lecteur ressent l’homme derrière l’écrivain. La question à laquelle je ne répondrai pas est : Stephen King a-t-il écrit là son meilleur roman ? A vous de juger. En tous cas, nul doute qu’il fera partie de vos bagages de vacances cet été !