Archives du mot-clé Tueur

Manaus de Dominique Forma

Editeur : Manufacture de livres

L’année dernière, est paru un petit roman aux éditions manufacture de livres, de la part d’un auteur qui sait tirer partie des formats courts, grâce à une plume efficace et imagée. Il nous convie à un retour dans les années 60 …

Plus exactement en 1964, lors du voyage présidentiel du Général de Gaulle en Amérique du Sud. En trois semaines, le convoi présidentiel visitera dix pays, pour renforcer la grandeur de la France et contrer la mainmise des Etats-Unis. Or, l’Amérique du Sud est réputé pour être un continent qui abrite nombre d’anciens nazis, de trafiquants de drogue et d’anciens généraux de l’OAS ayant fui l’Algérie.

Au milieu des officiels et des gardes du corps qui accompagnent le Général, François, un espion des Services Secrets, se cache avec une mission bien précise. Dès l’atterrissage en Argentine, il devra s’esquiver pour éliminer un traitre au Paraguay, avant de rejoindre le cortège officiel au Brésil, juste avant son retour en France. Mais il va devoir faire un petit détour non prévu dans sa mission.

Ecrire une histoire complète et complexe peut s’avérer un vrai casse-tête. Mais pour Dominique Forma, cela semble d’une facilité déconcertante, qui offre au lecteur une totale immersion dans un monde qu’il n’a jamais côtoyé. Quelques phrases pour parler du contexte, une phrase formidablement évocatrice pour dessiner les décors et des dialogues ne dépassant que rarement trois ou quatre phrases, voici les ingrédients qu’utilise l’auteur pour nous parler de cette histoire glauque.

Car on plonge dans un monde de barbouzes, où tout le monde se méfie de tout le monde, où chacun rêve de tuer son prochain car c’est un gage de survie, où chaque personnage ment, ou arrange la vérité pour vivre. Car la période des années 60 fut un tel brouillamini, que tous les pays cherchaient à avancer leurs pions pour être les mieux placés possibles, au nom de la géopolitique.

Les petites mains, ce sont des tueurs, comme le personnage principal de cette histoire, un soldat à qui on confie une mission, à qui on demande surtout de ne pas réfléchir, juste obéir. Au milieu de ce miasme, il va réaliser sa mission, mais aussi ne dire que le strict nécessaire pour sauver sa peau. Va-t-il réussir ? je vous laisse le découvrir en lisant ce petit roman par la taille, grand par le talent de son auteur, qui nous concocte un polar rapide et efficace.

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L’affaire Silling de Stéphane Keller

Editeur : Toucan

Après Rouge parallèle qui revisitait les années 60 et Telstar qui nous emmenait en pleine guerre d’Algérie dans les années 50, L’affaire Silling vient clore la trilogie consacrée à Norbert Lentz, ex-flic devenu barbouze assassin pour la république. Nous le retrouvons quelques semaines avant l’élection de François Mitterrand en 1981.

3 mars 1981, Paris. Sa fille Cécile arrive vingt minutes en retard à leur rendez-vous au restaurant ; Norbert Lentz cache dans sa poche le cadeau qu’il lui destine, les clés d’une Renault 5. Il serait prêt à tout pour sa fille mais surtout pas en mémoire de sa mère Denise, volage et morte vingt ans auparavant. Leur entrevue se termine mal et Lentz décide de passer sa nuit à boire. Ses excès violents envers des passants seront noyés dans les souvenirs de l’alcool.

Le lendemain matin, le téléphone le réveille. Le colonel Préville qu’il a connu à son retour d’Algérie le convoque. La mission est habituelle pour un tueur comme lui mais étonnante quant à son objectif. Il doit retrouver Nicolas Lovat, la star du cinéma français car ce dernier a en sa possession des photographies compromettantes pour tout un pan de la société française, de tous les domaines. Ces images auraient été prises par le majordome Paolo de Sisti.

Paolo de Sisti aurait été logé près de Menton. Lentz doit s’y rendre immédiatement afin qu’un contact lui contacte où dénicher sa proie. C’est finalement à Gênes qu’il doit se rendre, dans un hôtel de luxe où le majordome chercherait à négocier à bon pris les photographies compromettantes. La mission se révèle un cuisant échec : Le beau Paolo rentre trop tôt, Lentz est obligé de le tuer et il repart sans trouver la moindre photographie. Préville lui donne 48 heures pour les trouver. Lentz va se diriger vers la somptueuse villa de Lovat. Mais s’il trouve les photographies, il sera l’homme à abattre.

Voici donc le dernier tome de la trilogie consacrée à ce tueur des services secrets français, ex-flic revenu de tout et sans aucun état d’âme. Dans ce roman, Lentz a vieilli, il n’a plus la même vitesse d’exécution, plus la même déduction, mais il a gardé la même hargne, la même rage. Il est devenu une bête inarrêtable qui est capable de tuer n’importe qui parce qu’il n’a plus peur des conséquences.

Il va tomber sur une histoire des plus sordides et, de chasseur, il va devenir chassé, devenant l’homme à abattre pour avoir vu des images qui ne doivent pas ressortir au grand jour. Et pour être ignobles, elles sont ignobles. Sauf que Lentz, même chassé, passe toujours à l’attaque. Ce genre d’histoire, même s’il a déjà été abordé dans d’autres romans est bigrement haletant dans ce cas-ci pour beaucoup de raisons.

Tout d’abord, comme pour ses deux premiers romans, l’époque est bien rendue : on y parle de la peur de l’arrivée au pouvoir de Mitterrand avec dans ses bagages les communistes. La peur du rouge en devient terrible à tel point que de nombreux riches ou bourgeois partent déjà vers la Suisse ou le Luxembourg. La défaite de Giscard d’Estaing n’est plus une surprise mais une évidence et il s’agit de mettre à l’abri son argent.

Ensuite, ce personnage de Lentz est incroyable, je n’ai jamais lu un tel personnage dur, intraitable, meurtrier dans le polar français. Et le style de ce roman, sec, sans fioritures, dur, va s’adapter à l’histoire ce qui est un grand changement par rapport aux deux autres histoires, Rouge Parallèle et Telstar. Du coup, le roman est plus court, il se lit vite et va vite puisque les événements s’enchainent à un rythme d’enfer.

Stéphane Keller ne laisse pas de coté ni l’immersion dans cette époque de changements pour le peuple, abordé par de petites touches, ni la psychologie des personnages secondaires, dont il se débarrasse quand il n’en a pas besoin. Et finalement, on est pleinement satisfait après avoir tourné la dernière page d’avoir voyagé dans ce polar noir avec ce personnage hors-norme. Comme pour ses deux premiers romans, Stéphane Keller nous surprend à nouveau avec cette histoire noire et rouge sang.

Oldies : La bête de miséricorde de Fredric Brown

Editeur : Moisson rouge (Grand format) ; Points (Format Poche)

Traducteur : Emmanuel Pailler

Nouvelle année, nouveau défi. Après avoir consacré mon année Oldies à Rivages en 2018, à la Série Noire de Gallimard en 2019, c’est au tour des éditions Points pour 2020. C’est aussi l’occasion de fêter les 50 années d’existence de cette collection, et les 40 ans de Points Policier.

L’auteur :

Fredric Brown, né le 29 octobre 1906 à Cincinnati en Ohio et mort le 11 mars 1972 à Tucson en Arizona, est un écrivain américain de science-fiction célèbre pour ses nouvelles au parfum humoristique. Il a également publié des romans policiers ou de science-fiction, souvent dans un registre burlesque, comme dans son roman Martiens, Go Home !

Il commence à travailler à l’âge de seize ans, exerçant divers métiers (employé de cirque, plongeur, détective privé, bibliothécaire, correcteur pour des journaux, etc), après avoir perdu sa mère et son père, respectivement un et deux ans plus tôt. En 1926, il tente d’entrer à l’université de Hanover dans l’Indiana, mais il abandonne rapidement.

Brown a été édité toute sa vie dans des pulps, ces magazines populaires et bon marché qui regroupent des histoires policières ou de science-fiction. Il commence sa carrière d’écrivain en 1937, à l’âge de 31 ans, alors qu’il travaille comme correcteur pour le Milwaukee Journal. Sa première fiction, The Moon for a Nickel a été publiée dans la revue Detective Story en mars 1938.

Il écrit par la suite beaucoup de nouvelles, notamment des short-shorts, nouvelles de quelques centaines de mots se concluant par une chute époustouflante, comique ou tragique. Dans les années 1960, il fut publié dans Playboy et d’autres magazines pour hommes, où ses histoires très courtes et souvent drôles avec une chute inattendue faisaient merveille. Il est même considéré comme le maître de la micro-nouvelle (short short-story) et de la nouvelle brève, dont le recueil en français, Fantômes et Farfafouilles (traduit de l’américain par Jean Sendy : Denoël, « Présence du futur » n°65) donne un saisissant aperçu. Il est d’ailleurs principalement connu en France pour ses nouvelles de science fiction, alors qu’il a surtout offert beaucoup à la littérature policière, par ses innombrables nouvelles ou ses romans, où, de son style percutant et épuré, il propose des intrigues à la fois simples et originales, dans un décor reflétant les réflexes, les modes et les angoisses de l’Amérique des années 1960.

L’humour est très présent chez Fredric Brown, au point parfois d’être le point de départ, sinon la raison, de ses textes. L’Univers en folie (What Mad Universe) écrit en 1949 joue avec les clichés du genre, racontant l’histoire d’un éditeur de magazine envoyé dans un monde parallèle et reprenant une vision enfantine des récits publiés dans la revue. Martiens, Go Home! (écrit en 1954) décrit une invasion martienne vue à travers les yeux d’un auteur de science-fiction, par d’insupportables petits hommes verts caricaturaux, sans gêne, malicieux et tourmenteurs d’une humanité qui va peut-être se ressouder contre eux.

L’une de ses nouvelles les plus connues, Arena, a servi pour un épisode de la série Star Trek.

Il meurt en 1972, alors que, alcoolique et atteint d’un emphysème pulmonaire, il avait arrêté d’écrire depuis neuf ans.

(Source Wikipedia)

Quatrième de couverture :

Est-ce un suicide ? Le mort, Kurt Stiffler, avait de bonnes raisons de vouloir en finir : rescapé d’Auschwitz, il venait de perdre toute sa famille dans un accident de voiture. Mais l’arme qui l’a tué reste introuvable, et l’unique témoin semble en savoir plus qu’il ne veut bien l’avouer. Pour l’inspecteur Frank Ramos, pas de doute : il s’agit d’un meurtre.

Fredric Brown, né le 29 octobre 1906 à Cincinnati, Ohio, est un écrivain américain de science fiction et de roman noir, célèbre pour ses nouvelles humoristiques, fantastiques et policières. Il est décédé en 1972. La bête de miséricorde a été publié en 1956 aux Etats-Unis.

Mon avis :

C’est un roman que je m’étais mis de coté, suite à un coup de cœur de Claude Le Nocher. Je ne savais pas de quoi il retournait ; cela s’appelle la confiance aveugle. Datant de 1956, ce roman policier pourrait aussi bien être écrit aujourd’hui, tant il est moderne dans son écriture et dans son analyse psychologique des personnages. Ce roman frise la perfection, menant son intrigue avec une force peu commune, et avec des dialogues parfaits.

John Medley va, un beau matin, faire ses courses. En revenant, il découvre un cadavre dans son jardin et appelle la police. Frank Ramos et Fern « Red » Cahan sont les deux inspecteurs qui vont s’occuper de l’affaire. L’homme a été abattu d’une balle par l’arrière du crâne et aucune arme n’est trouvée dans la jardin. Ils vont fouiller dans le passé de la victime mais aussi dans celui de Medley.

Si on ne lira pas ce roman pour son suspense, car on sait très vite qui a tué, par son attitude réservée et mystérieuse, on le lire indéniablement pour son approche psychologique. Fredric Brown choisit pour cela la forme d’un roman choral, adoptant le point de vue de chaque inspecteur, mais aussi de Medley, du capitaine de police Walter Pettijohn ou de la femme de Frank, Alice Ramos. Il va autant dérouler l’enquête que les vies personnelles des protagonistes, et démontrer sans en rajouter la vie d’une petite ville des Etats Unis.

On se retrouve donc avec un roman qui ressemble beaucoup à une enquête de Colombo, que j’adore, avec l’intervention de chaque personnage. Il est difficile de faire plus simple en étant génial, surtout avec cette fin qui montre la monotonie des vies et ses difficultés. Un petit joyau à ne pas oublier.

Coupable (s) de Samuel Sutra

Editeur : Flamant noir

Samuel Sutra fait partie des auteurs « chouchous » de Black Novel, depuis que j’ai lu Kind of Black, extraordinaire roman policier se déroulant dans le petit monde du jazz (réédité chez Flamant Noir). Cet auteur, au talent incontestable, est aussi l’auteur des romans loufoques mettant en scène une bande de voleurs ratés, dirigés par Tonton, une légende dans le milieu, dont l’extraordinaire Akhanghetno et sa bande. Il est aussi à l’aise dans le registre comique que dans celui plus sérieux du polar. Ce roman en est encore une fois une preuve éclatante.

Jean Raphaël Deschanel est un lieutenant à la Sécurité Intérieure, originaire d’Haïti. Il ne se rappelle pas la vie là-bas, ayant été adopté, mais il en garde des cauchemars de bâtiments en ruine et d’églises qui s’écroulent. Jaulain son chef le réveille pour lui annoncer qu’il va être détaché auprès de la brigade criminelle, sous les ordres du commandant Blay. Lui qui en a toujours rêvé, le voilà empli d’espoir mais aussi soumis à une pression de ne pas être ridicule.

Entre la Police Criminelle et les Renseignements, l’entente n’est pas au beau fixe. Mais le Commandant Blay se charge de rassembler et motiver ses troupes. Ils ont affaire à quatre meurtres depuis ce matin, quatre meurtres isolés en deux semaines, perpétrés avec une méthode différente. Quatre morts sans rapports les uns avec les autres : Le premier, Daniel Favre, était flic, connu pour être pourri jusqu’à la moelle. Le deuxième était Jean-Claude Maréchal, propriétaire d’une boite de BTP. Le troisième était dans l’armée, le lieutenant-colonel Hervé Carsini.  Celui de ce matin se nommait Thierry Meursault, égorgé dans un parking de la Défense ; Sur lui, la police a retrouvé une carte de visite, celle de Daniel Favre, ainsi qu’un porte-clés avec une poupée vaudou. C’est ce qui leur a permis de relier les meurtres entre eux. C’est ce qui explique la présence de Jean-Raph. L’enquête s’annonce bien compliquée.

Une nouvelle fois, Samuel Sutra fait mouche avec ce roman policier que l’on pourrait considérer comme classique. La recherche d’un tueur multirécidiviste, on connait. Des victimes sans lien les unes avec les autres, on connait aussi. Mais c’est sans compter avec le talent de ce jeune auteur qui ne cesse de m’étonner par sa maîtrise des codes inhérents au genre.

Les personnages tout d’abord sont criants de vérité. En premier lieu, il y a Jean-Raphaël, lié à cette enquête par ses origines, et qui subit une énorme pression. Il ne veut pas décevoir ni son chef, ni son service, ni son ambition. Il doit faire ses preuves sans pour autant s’imposer, et tenter de se rapprocher du Graal : obtenir un poste au « 36 ». Le hic de l’histoire, c’est l’apparition d’une profileuse, imposée par Blay. Attirance, méfiance, voilà les choix qui s’offrent à ce jeune homme peu habitué à ces choix.

Ensuite, il y a l’équipe de Blay et Blay lui-même, tous présents, mais volontairement en retrait. Ils sont bien là comme des seconds rôles, et participent à l’histoire en fournissant de fausses pistes. Car même si on peut penser avoir compris les tenants et aboutissants, au fur et à mesure qu’on avance, on est saisi de doutes, on imagine des hypothèses, des scenarii impossibles jusqu’au dénouement final du dernier chapitre. C’est du grand art.

Et puis ce roman ne serait qu’un roman policier de plus s’il n’y avait pas cette fluidité de la narration, cette facilité à construire des décors, à placer des dialogues évidents. Samuel Sutra déploie toute sa subtilité et sa finesse pour mener à bien un roman que je qualifierai d’abouti, de maîtrisé de bout en bout.

Enfin, il y a le sujet de fond. Ces quatre personnages vont participer à la reconstruction d’Haïti à divers degrés. Ce roman dénonce comment ces pourris vont profiter des subventions pour bâtir des habitations « en carton », puisqu’ils n’ont aucune chance de se faire prendre, en facturant le maximum. Finalement, le monde ne change pas : les riches gagnent leur argent sur le dos des pauvres. D’où le titre, qui peut paraître énigmatique : Coupable ou coupables ? Coupable et coupables ! Un roman à ne rater sous aucun prétexte !

Il et moi de Philippe Setbon

Editeur : TohuBohu éditions

Depuis ses parutions aux éditions du Caïman, j’essaie de lire les romans de Philippe Setbon au fil de l’eau. Son petit dernier sort aux éditions TohuBohu, toute jeune maison d’édition et c’est une nouvelle fois un scénario fantastique.

Constantin Lepage, dit Costa est un acteur cinquantenaire, qui voit bien sa carrière décliner et qui se cherche un rôle.

Jean-Louis Rey est romancier et scénariste, et son dernier roman vient d’être refusé par sa maison d’édition.

Willy Willemetz est à la tête de sa maison d’édition, Double-V éditions et c’est aussi le meilleur ami de Jean-Louis. Mais il est bien ennuyé depuis que sa femme Elise a demandé le divorce.

Pour se venger, Jean-Louis monte un traquenard et propose à Willy de lui faire rencontrer un tueur à gages de ses connaissances, Henk Van Der Weld. Il pourrait s’occuper de gommer ses problèmes matrimoniaux. Puis, Jean-Louis propose à Costa un rôle à sa mesure, si ce n’est que ce sera dans la vraie vie. Après sa rencontre avec le tueur (en réalité Costa, vous l’aurez compris) et quelques jours de réflexion, Willy accepte le marché et paie 50% de la somme promise.

Costa, qui s’est pris au jeu, va se déguiser et aller voir la femme volage pour lui dire que son mari veut la tuer. Mais elle se met à paniquer devant l’air inquiétant de cet homme qui s’est introduit chez elle sans prévenir. Dans le feu de l’action, Henk Ven Der Weld / Costa lui lance un cendrier massif à la tête et la tue. Pris au dépourvu, il balance le corps par la fenêtre pour faire croire à un suicide et tape une lettre sur le micro-ordinateur. Ce qui ne devait rester qu’une blague va se transformer en spirale infernale.

Il et moi ou Il est moi ? Tout est question d’identité dans ce roman, avec un superbe jeu de mot en guise de titre. Tout part d’une situation simple, comme à chaque fois avec Philippe Setbon que je lis depuis maintenant quatre polars. Et après, tout déraille, juste à cause d’un petit grain de sable. Ce qui est remarquable dans ses romans, c’est la logique avec laquelle va se dérouler l’intrigue, ajoutée à une fluidité de l’écriture.

Ici, la situation de blague vengeresse va placer Costa, excellent acteur, dans un rôle qui va le hanter, au point de créer chez lui une bipolarité. Tout le sel de l’histoire va dans un premier temps résider dans la spirale infernale dans laquelle les deux compères vont s’enfermer, puis savoir comment tout cela peut bien se terminer. Et concernant Philippe Setbon, il faut vous attendre à une fin … surprenante et fort bien trouvée. On peut même y trouver une réflexion sur les acteurs, capables de se glisser dans la peau de personnages, et le risque de perdre leur propre personnalité, voire leur peau …

On n’a pas le temps de s’ennuyer, le roman est découpé en scènes qui chacune va constituer une brique à insérer dans le mur. Les dialogues vont participer à la logique de l’histoire, il n’y a pas de psychologie à rallonge, les actes parlent d’eux-mêmes. Bref, tout ceci ne vous surprendra pas si vous connaissez déjà Philippe Setbon. Sinon, c’est le moment de découvrir cet extraordinaire artisan de polars. Et encore une fois, ce roman là est une grande réussite à mettre au crédit d’un auteur injustement méconnu.

Ne ratez pas les avis de Julie et de PsychoPat sur QuatreSansQuatre

Cyanure de Laurent Loison

Editeur : Hugo & Cie

Auréolé du Prix du Balai de la Découverte 2017 avec son précédent roman Charade, Laurent Loison nous revient avec un deuxième roman explosif, que mon ami Richard a sélectionné pour le Prix des balais d’or 2018. Accrochez vous, voici une lecture explosive.

Le tueur débarque dans un immeuble de la région parisienne. Il grimpe au 12ème étage, et s’installe calmement. Etant donné le tir qu’il s’apprête à faire, avec une cible située à plus de 1000 mètres, il doit s’assurer de tous les paramètres : vitesse du vent, humidité, température. Il installe donc ses appareils de mesure et corrige sa trajectoire. Dans sa mire, l’homme à abattre est là, sur le parvis de la Défense. Il appuie sur la gâchette, ne tire qu’une seule balle et touche sa cible. Puis il remballe son matériel et s’en va.

Le commissaire Florent Bargamont dit Barga reçoit l’ordre de se rendre immédiatement sur le lieu d’un meurtre : le ministre de la Santé vient d’être abattu par un sniper. L’ordre vient directement du ministre de l’Intérieur qui n’est autre que le parrain de sa compagne Emmanuelle de Quezac. Alors qu’il pensait plutôt avoir droit à un temps de répit, il se doit de venir rapidement. La pression de la hiérarchie ainsi que celle des politiques va être démesurée.

Barga, Emmanuelle et le capitaine Loïc Gerbaud vont vite avoir le résultat de l’autopsie : celui qui a perpétré ce crime est un as du tir. Ceux qui peuvent faire ça se comptent sur les doigts de la main en France. Par contre, la balle a été enduite de cyanure. Le ministre n’avait donc aucune chance d’en réchapper. Barga se lance donc dans cette enquête en cherchant parmi la légion ou les brigades d’élite françaises. Quand il cherche les meurtres à base de cyanure, il tombe sur plus de 75 cas sur quelques dizaines d’années. Se pourrait-il qu’ils aient à faire avec le plus grand tueur à gages de tous les temps ?

OOOOOOOOOOUUUUUUUUUUAAAAAAAAHHHHHHHHHHHHH !!!!!!

Quelle surprise ! Quelle claque dans la gueule ! Je n’avais pas lu Charade et il va falloir que je m’y attaque très très rapidement. Car j’ai avalé ce roman quasiment d’une traite, et j’ai envie de retrouver Barga et Emmanuelle au plus vite. Et malgré le fait d’avoir raté le premier épisode, je n’ai absolument pas été gêné car la présentation des personnages est impeccable. Comme tout le reste d’ailleurs. C’est d’ailleurs ce qui m’a le plus impressionné dans ce roman : la maitrise et la cohérence du roman alors que ce n’est que le deuxième roman de l’auteur. Chapeau bas !

Des histoires de tueurs en série ou de tueurs à gages, on en a déjà lues. Des enquêtes mêlant politique et vengeance aussi. Mais je dois dire que le déroulement de l’intrigue est réellement impeccable, et que cela est possible grâce à des chapitres non pas courts mais d’une dizaine de pages. Avec un bon équilibre entre narration et dialogues, on tient là un divertissement haut de gamme.

C’est surtout au niveau du style que j’ai été impressionné. Ça saute, ça valse, ça virevolte dans tous les sens. Il y a dans ces phrases un sens du rythme, une volonté d’action constante, qui font qu’on ne peut pas lâcher le livre et que la lecture devient addictive. Il y a aussi une sorte de folie dans les scènes, de démesure qui me font comparer Laurent Loison à ses grands illustres auteurs de polars plus grands et plus vrais que la réalité, j’ai nommé Jacques Saussey et Mallock, pour ne citer qu’eux.

Pour ajouter un petit grain de sel supplémentaire, l’auteur s’adresse à nous en début et en fin de roman. Il nous laisse nous faire notre opinion ouvertement sur les protagonistes, sur le sens de la justice et de ses jugements avec un dernier chapitre très intelligent. D’ailleurs il met en tête de chapitre des citations qui portent tous sur ce thème. Alors, comme il le dit en fin de roman, lisez ce roman pas comme les autres et faites vous votre propre jugement. Il y a de quoi faire !

Ne ratez pas les avis de Anaïs et Paco

La nuit des corbeaux de John Connolly

Editeur : Presses de la cité (Grand Format) ; Pocket (Format poche)

Traducteur : Jacques Martinache

Je continue mon exploration de l’univers de Charlie Parker avec sa onzième enquête. Il semblerait que nous rentrions dans une série d’enquêtes plus classiques, ce qui est le cas pour ce roman. La liste des billets sur Charlie Parker est à la fin.

Quatrième de couverture :

Dans les profondes forêts du Maine, les corbeaux attendent, comme toujours, dans le sillage des prédateurs…

À Pastor’s Bay, Randall Haight tente de refaire sa vie. Enfant, il a assassiné une fillette, mais dix-huit ans de prison n’ont pas effacé sa faute. Les lettres anonymes s’amoncellent depuis son retour. Engagé pour en trouver l’auteur, le privé Charlie Parker découvre un client trouble et une ville livrée à ses démons. Une jeune fille vient en effet de disparaître. Et le coupable semble tout trouvé…

Mon avis :

Pour cette 11ème enquête, John Connolly abandonne l’aspect fantastique qui est présent dans les précédentes, pour nous offrir une enquête policière classique. Enfin, classique, c’est vite dit. Parce que si le roman s’ouvre avec la disparition d’Anna Kore dans un centre commercial de Pastor’s Bay, le nombre de fils conducteurs du roman va rapidement se multiplier. Puis c’est Aimée Price qui propose de trouver qui envoie des lettres de menace à son client Randall Haight, un homme qui a passé plusieurs années sous les barreaux pour avoir tué une jeune fille noire de 14 ans quand il était adolescent. Puis vient l’apparition de deux tueurs avec qui il vaut mieux ne pas discuter …

On a droit au début du roman à un repas entre Rachel et Charlie, et je dois dire que John Connolly est très fort pour écrire des scènes intimistes poignantes, surtout quand il fait parler Samantha, leur fille. Une fois passée cette scène, nous attaquons l’enquête avec tout le coté inquiétant de cette disparition. Mais ce qui permet de relâcher la tension, ce sont ces dialogues à l’humour hilarant, en particulier entre Louis et Angel. Et je donnerai une mention particulière à ceux entre Martin Dempsey et Francis Ryan, deux tueurs inquiétants et impitoyables à l’humour noir comme il faut.

John Connolly n’est jamais aussi fort que quand il invente l’histoire d’une ville, construit des personnages de zéro, comme s’il prenait une feuille blanche pour y poser quelques traits. Il est aussi passer maître dans l’art de faire monter la tension à travers des scènes incroyablement visuelles. Si ce roman n’est pas pour moi le meilleur de la série, il est tout de même un excellent roman policier mené avec brio jusqu’à un dénouement qui va relier tous les fils épars qu’il aura semé au début.

Les enquêtes de Charlie Parker dans l’ordre de parution sur Black Novel sont :

Tout ce qui meurt

Laissez toute espérance …

Le Pouvoir des ténèbres

Le Baiser de Caïn

La Maison des miroirs

L’Ange noir

La Proie des ombres

Les anges de la nuit

L’empreinte des amants

Les murmures

Je suis innocent de Thomas Fecchio

Editeur : Ravet-Anceau

Voilà un premier roman encourageant, qui mérite que l’on en parle, même si, en lisant la quatrième de couverture, on peut être dubitatif et craindre le pire avec un sujet casse-gueule comme celui là. Jugez-en plutôt :

Au lever du jour, la porte de la chambre de Jean Boyer est défoncée par une équipe de la police. A plusieurs, ils parviennent rapidement à l’immobiliser, le menotter et l’emmener au commissariat. Jean Boyer est en effet un violeur meurtrier multirécidiviste et vient d’être remis en liberté quelques mois plus tôt. Il avait tué et violé sa petite amie de l’époque, en 1968, ne pouvant supporter sa frustration sexuelle de son adolescence. Puis, dans les années 80, il avait récidivé, avant d’être à nouveau arrêté. Au global, Jean Boyer a passé plus de temps en prison que dehors.

L’enquête est menée par le capitaine Germain, qui a épousé une carrière de policier pour combler un manque d’explications sur la mort de son père. La victime est une jeune femme tuée violée et partiellement enfouie dans une forêt. Germain a naturellement cherché les violeurs récemment relâchés et est tombé sur l’identité de Jean Boyer. Dès le début de l’interrogatoire, Boyer ne veut rien dire, se contentant d’annoncer qu’il est innocent.

Alors qu’il demande la présence d’un avocat, on lui octroie une jeune femme. Celle-ci assiste aux entretiens et lui conseille de ne parler qu’en sa présence. Alors que Boyer est emmené en cellule pour la nuit, il s’arrange pour s’automutiler, simulant des maltraitances policières. Cela permet à l’avocate de le faire relâcher par faute de preuves et à Boyer d’entamer sa propre enquête. Quant à Germain, sa quête de la vérité l’amènera à faire une enquête parallèle. Tous les deux arriveront à une issue étonnante et dramatique.

La moindre des choses que l’on peut dire, c’est que le sujet traité par l’auteur est difficile : Le danger avec ce sujet est d’éprouver de la sympathie pour Jean Boyer, qui est un monstre sanguinaire et sans morale. Thomas Fecchio s’en sort remarquablement en positionnant ses deux personnages, chacun d’un coté de la ligne jaune. Boyer est effectivement un monstre, et il va donc se donner tous les moyens pour démontrer son innocence, quitte à enfreindre la loi. Germain est lui du bon coté de la loi, et avide de vérité.

Le parallèle est remarquablement bien fait, et remarquablement bien maitrisé, surtout si on se rappelle que c’est un premier roman. Car la grande force et le grand talent de cet auteur, c’est de faire tenir son intrigue grâce à la psychologique extrêmement bien fouillée de ses personnages. Avec des événements marquants, et des petits détails toujours bien trouvés, il en fait des personnes vivantes que l’on va suivre sans difficultés.

Ce roman est donc un très bon polar, écrit sous tension, qui intelligemment, évite de tomber dans la piège d’éprouver une quelconque sympathie pour l’assassin, et qui se lit d’une traite, grace aux nombreux rebondissements et la logique de son déroulement. On notera tout de même que l’auteur montre les a priori des protagonistes et si Germain n’était pas si têtu et si avide de vérité, l’issue de ce roman n’aurait jamais démontré le véritable coupable, qui s’avère à la fois bien trouvé et rend ce roman un excellent coup d’essai ; Je vous le dis, il va falloir suivre Thomas Fecchio à l’avenir.

Ne ratez pas les avis de L’oncle Paul et de Cassiopée

Au scalpel de Sam Millar

Editeur : Seuil

Traducteur : Patrick Raynal

Cela devient une bonne habitude : tous les ans, nous avons droit à la toute nouvelle aventure de Karl Kane, le personnage de détective récurrent de Sam Millar. Et personnellement, j’adore !

Un homme s’approche d’une maison et pénètre à l’intérieur. Sur son visage trône une cicatrice en forme de Z, d’où son surnom Scarman. Il sortit de sa camionnette un tapis, dans lequel est enroulé un fardeau. Il met le tout sur son épaule et entre dans la maison, quand quelque chose en dépasse : La main d’un enfant, celle de Tara.

Karl Kane essaie de dormir. Essaie car il est harcelé par des cauchemars, comme toujours. Son portable sonne. C’était Lipstick, la jeune prostituée qui lui a sauvé la vie. Elle l’appelle au secours depuis une chambre d’hôtel Europa. Un dénommé Graham Butler de Londres l’a frappée et veut lui faire des choses qu’elle ne veut pas. Karl débarque à l’hôtel, entre dans la chambre et dérouille Butler à coups de pieds dans la figure. Lipstick arrive à l’arrêter avant qu’il ne le tue. Puis Karl ramène Lipstick chez lui.

Scarman a observé la maison depuis quelque temps. Cette famille est composée d’ivrognes et de deux enfants. Ce qui l’intéresse, c’est la jeune fille Dorothy. Il attend que les parents soient abrutis par l’alcool avant de pénétrer dans la maison et de prendre la jeune enfant endormie au chloroforme. Puis il fait exploser la maison avec les bonbonnes de gaz entassées juste à coté.

Ce matin là, Naomi, la superbe secrétaire et amante de Karl lui demande de recevoir un homme pour une affaire. Son nom est Tommy Naughton. Il demande à Karl d’enquêter sur l’incendie de la maison de sa fille suite à l’explosion de bouteilles de gaz. La police conclut à un accident arguant que les parents ont du oublier d’éteindre leurs cigarettes en s’endormant. Sauf que les parents ne fument plus.

Les enquêtes de Karl Kane entrent dans la grande tradition des détectives de la littérature policière. Sam Millar y a ajouté sa patte, son originalité, en ayant créé un personnage noir et violent, en réaction à la violence de son environnement et de la société. A cela, il faut ajouter ce style si direct qui frappe sèchement comme des directs au foie, et un art des dialogues qui sonnent toujours justes.

Si on y trouve les obsessions de l’auteur, liées aux années de prison qu’il a passées en Irlande et une phobie de l’enfermement, la force évocatrice des descriptions en font une source de tension et d’angoisse pour le lecteur. Cette nouvelle enquête de Karl Kane ne fait pas exception à la règle, même si ici, Kark Kane va se retrouver personnellement impliqué dans son combat face à Scarman.

Au sens strict du terme, il ne s’agit pas d’un thriller, mais bien d’un roman noir violent, qui montre plus qu’il ne dénonce, le fait que l’on libère des cinglés assassins. Dans ce cas-là, l’auteur aurait pu faire apparaître son héros comme un justicier qui corrige les erreurs de la société, mais Sam Millar est bien plus intelligent que cela, nous proposant une fin qui ravira tout le monde, adeptes de romans noirs ou moralistes.

Il n’en reste pas moins que la peinture de la société reste toujours aussi noire et désespérante, même si ce n’est pas le sujet principal de l’enquête. Et par rapport aux précédentes enquêtes, le ton y est plus sur, les rebondissements nombreux, et l’humour hilarants, surtout dans les dialogues entre Karl et Naomi. Je trouve d’ailleurs que les romans de Karl Kane se rapprochent de l’univers de Jack Taylor, et ce n’est pas pour me déplaire. Bref, cet épisode est annoncé comme le meilleur de la série à ce jour, et je confirme : c’est excellent.

Les précédentes enquêtes de Karl Kane sont :

Les Chiens de Belfast

Le Cannibale de Crumlin Road

Un sale hiver26

Toutes taxes comprises de Patrick Nieto

Éditeur : Éditions Cairn

J’avais déjà adoré Jeux de dames de Philippe Beutin, publié par les éditions Cairn. Il semblerait que cette petite maison d’édition ait le nez pour dénicher des premiers romans passionnants et ambitieux. C’est le cas avec ce roman choral, qui s’avère passionnant de bout en bout.

2001, environs de Montauban. L’assassin est caché dans les fourrés qui entourent une luxueuse propriété. Il est 22 heures. L’assassin surveille à travers les vitrages sa future victime, qui, malheureusement pour lui, est au téléphone et a une conversation animée. Enfin ! L’homme raccroche et l’assassin pénètre dans la demeure. Il menace l’homme de son revolver, lui demande de s’agenouiller et l’abat d’une balle dans la tête. Puis, il renverse les affaires qui traînent sur le bureau, simule un cambriolage rapidement et s’enfuit.

Le premier témoin de ce drame est un chat sauvage. Il a bien vu l’assassin armé de son revolver. Il l’a vu aussi déposer dans l’herbe deux mégots de cigarette.

Le policier qui débarque sur la scène du crime est le capitaine Lemoine, de la SRPJ de Toulouse. Il semblerait que l’on ne fasse pas confiance aux gens du cru ! La mise en scène du meurtre ressemble plus à une mise à mort qu’à un cambriolage ou à un meurtre passionnel. Quelle n’est pas sa surprise quand il obtient l’identité du mort : Pierre-Henri Sennelier, proche conseiller du Président de la République Nicolas Sarkozy.

La veuve apparaît éplorée, elle aimait vraiment son mari. Pendant le meurtre de son mari, elle assistait à un concert classique à Toulouse. Il n’y a rien de choquant à cela, puisque son mari n’était pas mélomane.

Cette affaire de meurtre sans piste, sans indice, sans mobile, promet d’être compliquée.

Ce roman est un premier roman.

Ce roman est un roman choral.

Ce roman est excellent.

Je dois dire que j’adore les romans à plusieurs voix. Et je suis toujours étonné quand des auteurs choisissent cette forme pour leur premier roman. C’est faire preuve d’une ambition énorme. La difficulté de l’exercice est bien entendu de faire progresser l’intrigue logiquement, par personne interposée, de faire en sorte que le lecteur reconnaisse rapidement le personnage qui parle, de créer une psychologie cohérente pour chacun, et enfin, d’adapter le style de l’expression au personnage.

Si je reprends ce que j’attends d’un roman choral, point par point, je dois bien avouer que ce roman est un sans-faute. Les personnages sont fantastiquement dessinés, on les reconnait tous immédiatement et en plus, on est aidé par les titres des chapitres même s’ils ne sont pas forcément utiles. Les psychologies sont remarquables, les personnages nombreux puisqu’il y en a une dizaine. On est compréhensif envers le capitaine Lemoine, même s’il fait montre d’une certaine attitude hautaine. La veuve au début éplorée s’avère cacher des choses. L’assassin est retors au possible. L’avocate, mal dans sa peau, est attachante. Et les témoins, répartis dans l’intrigue, vont servir de lien, de liant. Pour donner un point de repère, ce roman dans sa forme, se situe au niveau du roman de Ron Rash, Un pied au paradis. Et je n’ai pas été bluffé à ce point depuis L’île des hommes déchus de Guillaume Audru.

Il faut dire que l’intrigue est menée de façon très intelligente, enchaînant avec beaucoup de créativité les rebondissements, les allers-retours, les fausses pistes, pour mieux accrocher le lecteur. De plus, c’est écrit avec beaucoup d’humour, et je ne vous parle même pas du dernier chapitre, qui à la fois donne une cohérence à l’ensemble, mais m’a beaucoup fait rire. Car c’est là que je me suis rendu compte que l’auteur s’était beaucoup amusé à jouer avec ses lecteurs et à nous par la même occasion.

Si le contexte de ce roman se situe au niveau des arnaques sur la taxe carbone, il faut bien s’avouer que cet aspect est parfaitement bien décrit mais n’est pas le point central du roman. Ce n’est pas un roman revendicateur mais bien du pur divertissement, de l’excellent divertissement. Pour le sujet sur la taxe carbone, je ne peux que vous conseiller de lire Le cimetière des chimères d’Elena Piacentini.

Pour un premier roman, Patrick Nieto a frappé très fort, plaçant très haut son ambition dans une intrigue policière en utilisant une forme difficile à maîtriser. Et cela s’avère une formidable réussite. Jetez vous sur ce roman, vous découvrirez un nouvel auteur et vous vous laisserez prendre dans les filets de cette intrigue.

Ne ratez pas l’avis de l’ami Jean le Belge