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Gisants-Les-Rouen de Roland Sadaune

Editeur : Val d’Oise éditions

J’ai la chance depuis quelques années de pouvoir chroniquer les romans de Roland Sadaune. Et j’adore cet auteur, car il fait la place belle à ses personnages, des gens comme vous et moi, dans des intrigues qui mélangent le roman noir, le roman à suspense et le thriller. En tous cas, le contexte est toujours d’actualité et intéressant. Ce roman ne fait pas exception à la règle, jugez en plutôt :

La ville de Rouen a décidé de placer en priorité le tourisme. La mairie a donc fait paraitre un arrêté qui exige de sortir les Sans Domicile Fixe du centre ville, car cela risque d’altérer la bonne image que pourraient avoir les touristes de cette belle ville de Normandie. Les SDF se retrouvent donc embarqués dans des cars, et emmenés … ailleurs. D’aucuns disent qu’on ne les revoit plus …

Mathieu Lancaster est un jeune auteur qui a écrit un premier roman, Si tu savais … qui a reçu un accueil favorable. Son deuxième roman, L’amour sans toi est, aux dires de son éditeur promis à un grand avenir. D’ailleurs, il vient d’être sélectionné pour le prestigieux prix Jeanne d’Arc. Tout le monde s’accorde d’ailleurs à dire que son roman est le meilleur des 6 en lice. Mais, c’est la grande désillusion quand c’est un autre roman qui gagne le prix. Mathieu, dégoutté, désespéré, va s’exiler dans la maison de campagne familiale pour se ressourcer et retrouver l’inspiration.

Elise Verdoux est capitaine de police à Rouen. Elle a affaire avec une série de meurtres mystérieux : 2 policiers territoriaux et un SDF ont été retrouvés morts, avec la copie d’une photographie d’une vieille grille rouillée d’un portail dans la poche. Son adjoint le lieutenant Franck Person est sur d’une chose : la série va continuer tant qu’ils ne trouveront pas un cadavre avec l’original de la photo en question. Effectivement, un quatrième corps est bientôt retrouvé …

Avec un sujet comme ça, on se dit que l’on va avoir droit à un roman social qui va dénoncer des arrêtés municipaux aussi idiots que racistes. Certes, mais pas que …

Avec les corps que l’on retrouve, on se dit que l’on va avoir droit à une enquête policière épineuse et pleine de mystères. Certes, mais pas que …

Avec ses chapitres courts, son style fait de phrases courtes, on se dit que l’on va courir à perdre haleine dans un roman à la limite du thriller. Certes mais pas que …

Car on se retrouve bien avec un roman à la croisée des genres, dont l’une des qualités est de camper des personnages plus vrais que nature. C’est aussi une sorte de ballet, de jeu de cache-cache auxquels jouent nos personnages. Elise et Mathieu ont chacun leurs chapitres, jusqu’à ce qu’intervienne un troisième personnage, Keller, ancien amant d’Elise ; A ce moment, le duo devient trio avant de redevenir duo, dans un final sanglant et noir.

C’est donc un roman plein de surprises, plein de rebondissements, auquel nous convie Roland Sadaune. Et tout ceci est mené de main de maitre. Il faut dire que Roland Sadaune a écrit plus d’une trentaine de polars, donc tout est maitrisé à la perfection. Et puis, je retrouve dans ce polar toutes les raisons pour lesquelles j’aime cet auteur : ces personnages que l’on rencontre le temps de 300 pages, mais qui resteront longtemps cachés dans un petit coin de mon cœur. Une nouvelle fois, Roland Sadaune nous écrit un roman humaniste avec un peu plus de noir que d’habitude.

Ne ratez pas les avis des amis Claude et l’Oncle Paul

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Un caddie nommé désir de Roland Sadaune (Val d’Oise éditions)

Le dernier roman en date de Roland Sadaune fait une nouvelle fois la part belle à des personnages comme vous et moi et démarre de façon classique pour se terminer dans le noir … le plus complet.

Tout commence avec une pièce de 1 euro. C’est bête, ça ne vaut pas grand-chose, et pourtant cela va changer le destin de Raphaël Darmont. Ancien lieutenant de police, Darmont a fait les frais d’une affaire mal embarquée, et a fait office de bouc émissaire. Tout juste a-t-il pu récupérer un poste chez Sécuritex, une entreprise de vigiles privés qui lui permet à la fois de contrôler les clients chez Mamouth, à la fois de s’occuper du recrutement de ses futurs collègues.

1 euro, c’est ce qui manque à la superbe brune pour prendre un caddie et faire ses courses. Ebloui par sa beauté, Darmont lui propose une pièce et, à force de discussions, ils proposent de se revoir. Malgré sa petite cinquantaine, Darmont a un coté rassurant et Malika a le charme des beautés orientales. Le premier rendez-vous se fera dans un restaurant, puis il ira chez elle, puis ils coucheront ensemble. Ce ne sera pas une réussite, mais il y aura une suite … comme des cailloux parsemés sur le chemin de l’enfer.

On peut diviser ce roman en deux parties. Le premier présente les personnages, sur la base de chapitres courts, avec des allers retours entre le moment présent et le passé, passant des uns aux autres avec une facilité enivrante pour le lecteur. Petit à petit, les pièces du jeu d’échecs se mettent en place et le drame peut avoir lieu : alors que Darmont ne voit plus Malika depuis quelques jours, il va chez elle, crochète sa serrure et la trouve morte dans sa douche.

La deuxième partie est plus linéaire, plus classique aussi au sens où elle déroule l’enquête de Darmont, mais plus noire, où il est impliqué de près dans cette histoire de meurtre, où son attitude est suspecte pour les autres mais aussi pour ses collègues policiers, où il se retrouve forcé et contraint de trouver la vérité car il sait plus de choses que les autres. Même sa femme, qui occupait déjà un rôle secondaire dans savie n’est plus considérée comme un canot de sauvetage.

Avec un style remarquable d’efficacité et de brutalité, ne prenant pas de gant envers ses personnages, Roland Sadaune nous concocte un roman noir avec une histoire qui s’avère bien plus surprenante que l’on aurait pu croire au tout départ. Si vous aimez les polars aux scenarii implacables, alors ce roman là est pour vous.

Ne ratez pas les avis des amis Claude Le Nocher et l’Oncle Paul.

Minna de Roland Sadaune (Val d’Oise éditions)

J’avais déjà eu l’occasion de parler de Facteurs d’ombres, cet excellent livre fait de portraits peints d’auteurs de polars et de chroniques élaborées par les blogueurs et Claude Mesplede. Roland Sadaune est aussi auteur de polars. J’ai la chance de vous présenter son dernier roman en date, Minna, dont la force principale est la qualité de ses personnages.

L’auteur :

Né à Montmorency de mère polonaise, Roland Sadaune se passionne très tôt de cinéma et littérature policière. Sa carrière d’artiste peintre ne l’empêche pas d’avoir à son actif une trentaine de romans policiers et une cinquantaine de nouvelles noires. Pour lui, le Polar, c’est l’évasion par les chemins de traverse défoncés par le destin, avec des phénomènes de société dissimulés derrière les haies.

Il en est à sa 90ème exposition particulière, en 2006, intitulée Peintre de Polars.

Son joker préféré est le cinéma : en salle, car l’été on y est au frais et l’hiver on s’y sent bien.

(Source Babelio)

Quatrième de couverture :

… De toute façon je ne peux pas disparaître du secteur, se dit Minna, quand un bruit la fit se retourner. Elle repéra un individu posté au bas de l’escalier et s’immobilisa entre deux volées de marches, sous un lampadaire. L’homme la suivait-il ?…

… Minna était en sécurité pour combien de temps ?

Les autres ne la lâcheraient jamais ! Elle rejoignit l’immeuble. Un inconnu pénétrait dans son meublé.

Furieuse, elle s’élança et…

… N’y tenant plus, Léopold regarda vers Minna. Ces pleins et ces déliés. Quand elle passa des bracelets, il se sentit englouti par une chape de solitude…

… La rue arborait les tons rompus de la détresse.

Même les rats étaient confrontés à la morosité des poubelles…

Quand la ville mord.

Mon avis :

Ce n’est pas en lisant la quatrième de couverture que vous allez savoir de quoi parle ce roman. De même, si vous regardez la couverture, vous y verrez Thriller, alors que, si je devais lui donner une étiquette, j’hésiterais entre roman policier et roman noir. Mais je n’aime pas les étiquettes. Sachez donc que ce roman est fort, noir, et qu’il va vous obliger à regarder la rue, les gens, le trottoir et le caniveau. Par contre, cela va vous donner une idée du style de l’auteur.

Ce roman est porté par deux personnages forts, Léopold et Minna. Leopold est un SDF, qui depuis qu’il a été licencié, a divorcé. Il n’a plus de contact, ni avec sa femme, ni avec sa fille. Il s’est volontairement marginalisé, faisant la manche devant les Grands Magasins. La seule personne avec qui il a gardé contact est sa sœur, qu’il va voir de temps en temps. Sinon, il habite en colocation au Hurlevent, en compagnie d’autres laissés pour compte comme lui.

Minna est une immigrée clandestine nigériane, qui fait des ménages dans les hôtels de luxe et qui se prostitue pour le compte du « chef » dans ces mêmes hôtels. Le « chef », c’est madame Sokoto, une nigériane aussi, qui profite de la naïveté des jeunes immigrées pour faire fonctionner son commerce.

Un soir d’octobre, une jeune femme s’enfuit d’un hôtel de luxe, en jetant sa culotte dans une poubelle. Plus tard, son corps est retrouvé chez elle, égorgée. Or Léopold, intrigué par l’attitude de la jeune femme, a récupéré la culotte, sur laquelle il y a des traces de sang. Léopold, après avoir vu les informations à la télévision, est persuadé qu’il a la culotte de la victime.

Le grand mérite de Roland Sadaune, c’est bien de positionner au centre de son intrigue deux personnages formidables, attachants. D’ailleurs, on ne va quasiment pas suivre d’autres personnages que Léopold et Minna, à part BDR et sa femme. Cela donne l’impression que ces deux marginaux de la vie sont réellement séparés de la vie sociale « standard. Car c’est une histoire hors standard, hors du commun, hors des sentiers battus que l’on suit.Et on ne peut qu’aimer Léopold et Minna, car dans le fond, ils sont bons, humains. Le paysage est peuplé de fauves, de robots et seuls les délaissés paraissent humains.

Oui, j’ai aimé Léopold. Oui, j’ai aimé Minna. Et j’ai aussi adoré le Paris peint par Roland Sadaune. Je connais parfaitement les coins du 18ème, 19ème et 2àème que l’on voit dans ce roman. Les petites touches ajoutées ici et là, comme sur un tableau, m’ont fait revenir dans des quartiers que j’ai largement arpentés durant ma jeunesse. Roland Sadaune effectivement construit ses décors comme des tableaux de peinture, qui est aussi un de ses métiers.

De ce tableau multicolore, l’auteur nous livre une histoire bien noire, presque désespérée, un brin désabusée sur les gens que l’on ne voit plus, dont tout le monde se fout. Pour autant, c’est raconté sans pathos, mais il nous force tout de même à voir ce qu’on ne regarde plus. Et le style, dans ces moments là peut devenir très dur, très franc, très direct, là où les rues au coucher du soleil deviennent si poétiques. Evidemment, Léopold et Minna vont se rencontrer, et il ne s’agira pas de bluette à l’eau de rose. Le monde est plus dur, plus impitoyable que ça. On aura droit à des courses poursuites jusqu’à épuisement des participants.

Je sais, c’est un billet bordélique, et je le revendique. Ce roman a fait passer beaucoup d’émotions différentes, contrastées en moi. J’ai vécu avec eux pendant 350 pages, j’ai partagé une partie de leur vie, j’ai rencontré des gens, des vrais, j’ai vu des salauds, j’ai hurlé vers la fin, comme une envie de meurtre.

Facteurs d’ombres de Roland Sadaune (Val d’Oise éditions)

En ces temps de Noël, les idées de beaux cadeaux ne courent pas les rues. Pour les amateurs de polars, il ne faut pas hésiter, ce livre est exceptionnel, de par sa beauté, de par ses textes.

  sadaune

Né à Montmorency de mère polonaise, Roland Sadaune se passionne très tôt de cinéma et littérature policière. Sa carrière d’artiste peintre ne l’empêche pas d’avoir à son actif une trentaine de romans policiers et une cinquantaine de nouvelles noires. Pour lui, le Polar, c’est l’évasion par les chemins de traverse défoncés par le destin, avec des phénomènes de société dissimulés derrière les haies.

Il en est à sa 90ème exposition particulière, en 2006, intitulée Peintre de Polars.

Son joker préféré est le cinéma : en salle, car l’été on y est au frais et l’hiver on s’y sent bien.

Roland Sadaune est un auteur de polars mais aussi un peintre. Ne voulant pas choisir entre ces deux activités, il les réunit dans un livre regroupant 37 portraits d’auteurs d’hier et d’aujourdhui. Chacun est illustré par des textes émanant de passionnés mais aussi d’experts tels Claude Mesplede, Claude Le Nocher ou Paul Maugendre.

Avec une couverture cartonnée (comme on n’en fait plus), ses belles pages glacées rendent hommage à une œuvre que je ne connaissais pas et qui m’a tout simplement époustouflé. On y trouve aussi bien des auteurs étrangers (Mickael Connely, James Ellroy …) que des auteurs français (Christian Roux, Maurice Dantec, Jean Bernard Pouy …). Vous y trouverez d’autres esquisses ainsi que 7 nouvelles.

james-ellroy
michael-connelly

J’ai eu la chance de participer modestement à cette œuvre et donc je vous offre en exclusivité le texte que j’ai rédigé pour illustrer le portrait de Caryl Ferey :

Ma première rencontre (littéraire) avec Caryl Ferey, ce fut La jambe gauche de Joe Strummer. Je venais de découvrir Ken Bruen, et cette façon inimitable de créer une intimité avec un personnage. Ce roman fut une vraie découverte, en même temps qu’une envie de continuer à pénétrer dans l’univers d’un auteur. Alors je suis tombé sur Zulu, ou plutôt Zulu m’est tombé dessus. Car Zulu est un livre implacable, une démonstration en force de la cruauté des hommes, de leur imagination à faire souffrir son prochain, de l’inhumanité de l’homme.

Forcément, après une lecture pareille, on a envie de s’intéresser à l’auteur qui est derrière. Caryl Ferey est un globe-trotter qui va vivre dans un pays étranger pour s’imprégner d’une culture nouvelle, d’une histoire autre. Puis il va créer une intrigue intégrée à ce pays, pour nous dévoiler un pays et ses racines de l’intérieur. Mais il y a aussi cette maitrise de l’intrigue, cet art de surprendre le lecteur, de créer des scènes très visuelles et surprenantes sans que l’on s’y attende.

Mapuche est une poursuite dans cette veine que recherche Caryl Ferey. D’un pays qui a connu (et connait encore) une histoire forte et violente, il écrit un roman magnifique, une intrigue fantastiquement forte portée par deux personnages profondément humains. Il déploie dans ce roman tout son art pour montrer la lutte de l’amour contre la société, car l’amour est un sentiment profondément humain.

Lors de l’émission La grande librairie, on découvre une autre facette de cet auteur fascinant, sa volonté d’écrire le meilleur roman, son chef d’œuvre. Je me rappelle cette phrase, qui n’est peut-être pas de lui d’ailleurs : « Mon meilleur roman, c’est le prochain ». Et puis, il a parlé de ses personnages, de cette volonté de les placer au centre de son intrigue car ils sont et doivent rester au centre du monde. Caryl Ferey est un messager moderne dans une société numérique et inhumaine, une société qui se veut parfaite et qui oublie qu’elle doit être faite par les humains pour les humains. Il démontre que l’homme a une imagination sans limites pour créer la cruauté, pour inventer la violence. Il se pose ainsi comme un porte-parole de l’homme humain, un héraut humaniste.

Indéniablement, LE livre qu’il vous faut ou faut offrir en cette fin d’année 2013. Les images de ce billet ont été empruntées sur le Net à divers sites.