Editeur : Gallmeister
Traducteur : Jacques Mailhos
J’ai déjà dû le dire par le passé : il faut être vigilant sur les sorties du mois d’août des éditions Gallmeister, en ce qui concerne les premiers romans. Une nouvelle fois, ils nous ont déniché un sacré roman, époustouflant.
Nick entre dans sa dernière année de lycée. Il a vite appris que, pour être accepté parmi un groupe d’amis, il faut entrer dans l’équipe de crosse. Les deux meilleurs amis de Nick sont Max et Richard. Max est un jeune homme volubile, immature et toujours prêt à faire des bêtises, alors que Richard est plutôt mutique et discret. Par voie de conséquence, max a beaucoup de succès auprès des jeunes filles alors qu’on n’a jamais vu Richard sortir avec une fille. A la fin du trimestre, Nick réussit à sortir avec Haley, une jeune fille du lycée privé.
Les soirées de week-end sont mémorables, surtout celles où il y a des cigarettes, et de l’alcool. Les lycéens ont trouvé une parade pour récupérer de l’oxycodin. Quand l’un d’entre eux est blessé, il doit mettre des pilules de coté pour les soirées entre potes. Et puis, il y a les après midi chez Denny’s. Les discussions vont bon train, on se vanne, on s’envoie des piques et on raconte n’importe quoi.
Lors d’une de ces discussions, devant les bières, ils se remémorent la fête mémorable, la FOOTBRA : Fête Où On Baise Tous (Richard Aussi). Ils sont tous là, Max, Richard, Nick, Haley, ainsi que Ham et Alan. Max raconte alors comment, aidé de Richard, ils ont raccompagné Alice, une amie d’Haley, chez elle. Elle était saoule, inconsciente, et Max raconte qu’eux deux ont abusé d’elle. La rumeur ainsi lancée va faire bien des ravages dans la vie de ces jeunes.
Epoustouflant, ce roman, disais-je, car il faut avoir une sacrée dose de courage pour s’attaquer à un tel sujet. Ne nous trompons pas, le sujet n’est en aucun cas les débordements lors des fêtes estudiantines mais bien les conséquences d’une rumeur lancée dans un bar sur chacun des protagonistes, d’autant plus qu’Alice va se retrouver harcelée et Haley va se battre pour faire reconnaitre le viol.
Outre le courage de s’attaquer à un tel sujet, et de trouver cette fin mémorable qui va vous prendre par surprise, l’auteure a décidé non pas de faire un roman choral, mais de faire raconter cette histoire par Nick, qui est l’innocent de l’histoire, impliqué émotionnellement par son amitié pour ses potes et son amour pour Haley. Et j’y ai trouvé une allégorie de la religion, au sens où c’est Nick qui va être puni pour les crimes des autres …
Là où le roman atteint des cimes, c’est dans le choix de l’auteure pour la forme de la narration. Kate Reed Petty ose tout, passant de la narration à la première, deuxième, troisième personne, incluant des lettres de motivation d’Alice pour entrer à l’université ou même des extraits de scenario co-signés par Alice et Haley. J’ai trouvé extraordinaire qu’une jeune auteure prenne le risque de proposer un tel puzzle dont la colonne vertébrale est cette rumeur mais dont le paysage d’ensemble dessine une société de groupes avides de sensations qui ne doivent toucher que les autres.
On ressort de ce roman véritablement impressionné, par l’ampleur de l’ambition affichée, par la qualité de l’écriture (ainsi que la formidable traduction de Jacques Mailhos) et surtout par la cohérence de l’ensemble. De toute évidence, ce roman occupera une place à part dans ma mémoire, par son indéniable originalité et par sa faculté à avoir abordé tant de thèmes importants et surtout avec autant de réussite. Voilà un roman à ne pas rater, un des plus forts de cette rentrée littéraire.