Antonin Varenne : Fakirs (Points)

ATTENTION : coup de cœur ! Les symptômes d’un excellent bouquin, en ce qui me concerne, sont très simples. Je rentre très vite dans l’histoire, et je l’avale à raison de cinquante à cent pages par jours. Je suis pressé de suivre les déboires du ou des héros jusqu’aux dernières pages. Et là, vers la fin, j’avance comme une limace (dix pages par jour) parce que je ne veux quitter ni l’ambiance, ni les protagonistes de l’histoire. D’habitude, je mets la conclusion à la fin de l’article, mais là, je n’y vais pas par quatre chemins : courez acheter Fakirs et dévorez le.

D’un coté, il y a le lieutenant Guérin, qui travaille à la brigade des suicides (sic). Il est mis là comme on range un balai dans un placard. Mis de côté par sa hiérarchie pour ne pas gêner, affublé d’un stagiaire nommé Francis Lambert, il est appelé pour constater qu’il s’agit bien d’un suicide. Il est toujours resté droit dans ses baskets, c’est le genre de mec qui fait bien son boulot, désabusé par les injustices, mais qui n’a pas baissé les bras.

De l’autre, il y a John P. Nichols, un psychiatre franco-américain qui s’est retiré dans le Lot, et qui vit dans une cabane au fond des bois, loin de tout, loin des autres. Tout commence quand la gendarmerie de Saint Céré lui apprend le suicide de son meilleur ami, Alan Mustgrave, fakir de son état, mort sur scène pendant un de ses numéros extrêmes. Les deux personnages (trois avec Lambert) vont se rencontrer et s’entraider pour démêler une affaire plus compliquée qu’il n’y parait, entre les bizarres du Paris Underground, les officiels de l’ambassade américaine et la hiérarchie de Guérin moins blanche qu’on ne le croit.

D’abord, il y a les personnages, que l’on n’est pas prêt d’oublier, ceux que j’ai cités, mais aussi ce que l’on appelle les personnages secondaires qui sont tout simplement extraordinaires. Comment oublier Bunker (comme Edward et par comme l’abri anti-bombes) et son chien, mais aussi les collègues du Quai des Orfèvres, ou Ariel ou Paco. Je pourrais vous les citer tous un par un, tellement ils sont marquants.

Ensuite, il y a l’ambiance, si calme des bois du Lot, si déjantée du Paris nocturne. Il y a dans ce livre une vraie analyse du Paris d’aujourd’hui, sans jugement, avec suffisamment de petits détails pour qu’on y soit. Ce qui m’a choqué, c’est la description des sans abris sans papiers : il n’y a pas d’étonnement, pas de pathos, juste un état de fait. Les personnages voient ça, et continuent à vivre comme si c’était normal. N’est-ce pas ce que nous faisons en fermant les yeux ?

Il y a aussi le style simple, direct, évident. Pas de mots ou de descriptions superflus. D’ailleurs, le livre ne fait que 280 pages. On en vient presque à regretter qu’il n’y en ait pas 50 de plus. Et les dialogues sont ciselés, écrit avec pointillisme, adaptés à la psychologie de chaque personnage. Bref tout ça sonne bigrement vrai. Que du bon ! Que du plaisir ! La construction, qui passe d’un personnage à l’autre est classique mais devient évidente tant les événements servent le roman et pas l’inverse.

Pour toutes ces raisons, il faut lire ce livre. Ce n’est pas glauque comme du Chainas, pas violent comme du Ellroy, pas littéraire comme du Bello, pas marginal comme du Pouy, pas social comme du Jonquet, pas gore comme du Chattam, juste un excellent roman noir, mais noir. Noir mat. Comme la nuit.

Voilà. Je vous le redis : courez acheter ce livre. Le fait qu’il soit édité par la maison d’édition de Fred Vargas n’a rien à voir. Ce n’est pas les mêmes histoires ou le même style. C’est marqué « Policier » sur la couverture, mais c’est du vrai bon « Noir », comme un petit noir qu’on prend au bar du coin.

Ce livre m’a été conseillé par Vincent qui travaille à la FNAC des Halles de Paris. Une nouvelle fois, il a raison. Deux ou trois fois par an, il me dit : « Tiens, tu dois absolument lire ça » et à chaque fois, il fait mouche. Accessoirement, c’est mon meilleur ami, mais si vous avez besoin d’un bon bouquin, allez lui demander un conseil. Il ne vous donnera pas un titre de best seller, mais assurément un livre que vous n’oublierez pas.

5 réflexions sur « Antonin Varenne : Fakirs (Points) »

  1. Mhouhahahaha, ça ne marchera pas ! Pourquoi ? Parce que je l’ai acheté en bouquinerie fin juillet, na ! Juste après la lecture de « trois mille chevaux vapeurs »… 😉 si je sais que tu as eu un coup de coeur, alors je vais le faire passer en « pedigree PAL » ce soir 😀

    La FNAC des Halles… quand je vais à Paris, une fois tous les deux ans 😆 je descend à Lafayette si je me souviens bien… la sortie c’est « le havre » pour aller à la FNAC. Si mes souvenirs sont bons… ce n’est pas la fnac de ton pote, celle-là ??

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