Le chouchou du mois de novembre 2022

Pour ce mois de novembre, les billets publiés vont vous donner des idées de lecture mais aussi des idées de cadeau de Noël, puisque j’aurais abordé beaucoup de genres différents, de la littérature blanche au thriller. Faites votre marché !

Je tiens à vous faire remarquer que l’ordre d’apparition est par genre puis par ordre alphabétique de nom d’auteur. Je vous souhaite de bonnes lectures.

Commençons par un premier roman, dans le genre Polar noir avec Le fric ou l’éternité de Paul Chazen (Jigal). Le narrateur nous décrit sa vie de tueur à gages, profession qu’il a adopté par hasard, par manque de débouchés ou d’envie. Si le roman est court, il impressionne par sa maitrise et par ce qu’il sous-entend de notre société.

Cela ne doit pas vous surprendre, j’adore les comédies et je vous en propose deux ce mois-ci. Aimez-vous les uns les autres de James Holin (Editions du Caïman) propose une négociation autour d’un héritage dans une famille qui représente une bonne partie des strates sociales actuelles. Les situations hilarantes, les nombreux rebondissements et les dialogues savoureux font de ce roman un pur plaisir de lecture.

La dernière aventure en date de Requiem, Sur des Breizh ardentes de Stanislas Petrosky (Eaux troubles) nous emmène dans un EHPAD et Stanislas Petrosky utilise tout son talent pour déployer une intrigue hilarante (et de mauvais goût pour les âmes sensibles), ce qui nous (me) garantit un éclat de rire par page.

Je n’avais pas trouvé le temps de le chroniquer quand il est sorti en grand format, et je profite de sa sortie en format poche pour parler de L’âme du fusil d’Elsa Marpeau (Gallimard Folio), un Polar rural très immersif, au rythme lent mais avec une fin remarquablement bien trouvée. C’est une nouvelle réussite à mettre au crédit de cette auteure.

Le « Oldies » de ce mois se trouvera au rayon Littérature. La douleur de Manfred de Robert McLiam Wilson (10/18) aura réussi à me choquer par son sujet, mais aussi et surtout par cette façon de présenter ce vieillard aux portes de la fin de sa vie, que l’on va plaindre dans un premier temps avec d’éprouver une féroce haine contre ce salaud. Très fort.

Après son premier roman policier original et plein d’humour, l’auteur nous propose un Polar social avec Je crois que j’ai tué ma femme de Frasse Mikardsson (Editions de l’Aube). Partant d’une affaire criminelle réelle où un homme a tué sa femme, il aborde les sujets actuels de meurtres familiaux et de l’égalité des sexes, dans un roman engagé tout en insistant sur la difficulté de régler ces problèmes sociétaux.

Comme à son habitude, Muriel Mourgue nous offre avec La loi des vents tournants de Muriel Mourgue (Encre Rouge éditions) un roman policier classique, positionné dans un futur proche. Il s’agira ici de découvrir l’assassin de la femme du premier ministre et on n’y trouvera aucune effusion de sang, juste un scénario mené de façon fluide avec un personnage récurrent que l’on a plaisir à retrouver, Angie Werther.

Si les thrillers ne sont pas ma tasse de thé, je dois dire que deux d’entre eux m’ont emballé. L’illusion du mal de Pierluigi Pulixi (Gallmeister), la deuxième enquête de Mara et Eva, respecte les codes du genre, impose un rythme haletant et pose la question des moyens insuffisants de la justice et le risque que le peuple veuille se faire juge. L’aigle noir de Jacques Saussey (Fleuve Noir) nous envoie à la réunion dans une aventure prenante et détaille les différents trafics, de la part d’un auteur dont on ne parle pas assez.

Avec le dernier Sycomore, j’avais découvert un auteur et un personnage auprès duquel on prend un grand plaisir à suivre ses enquêtes. C’est ton nom de Laurent Rivière (Toucan) confirme tout le bien que j’en pensais ; une nouvelle fois, j’ai aimé les balades dans le Morvan, cette histoire d’orphelins placés pour contrer l’exode dans les années 80 et les atermoiements du personnage principal Franck Bostik à prendre contact avec son fils, âgé de 12 ans, dont il n’avait pas connaissance.

Avec du retard cette année, je vous ai concocté quelques Nouvelles de chez Ska. Vous aurez l’occasion de découvrir des auteurs tels que Régine Paquet, Alain Emery, Claude Picq, Aline Tosca, Sébastien Gehan, Jean-Hugues Oppel, Pierrisnard et Gaëtan Brixtel.

Le titre du Chouchou du mois revient donc à L’or vert du Sangha de Pierre Pouchairet (Alibi), parce que ce roman qui mélange roman policier et politique, écrit comme un thriller nous permet de découvrir l’Afrique, même si le pays du roman se veut fictif. Autant par les personnages, les situations, les rebondissements et la vision d’une Afrique pillée, esclave moderne, ce roman me parait indispensable et le meilleur de l’auteur prolifique qu’est Pierre Pouchairet à ce jour.

J’espère que ces avis vous auront été utiles dans vos choix de lectures et de cadeaux. Je vous donne rendez-vous le mois prochain pour le bilan de fin d’année. En attendant, n’oubliez pas le principal, protégez-vous, protégez les autres et surtout lisez !

C’est ton nom de Laurent Rivière

Editeur : Toucan

J’avais découvert Laurent Rivière et son personnage récurrent Franck Bostik avec Le dernier Sycomore, et j’avais été agréablement surpris par sa plume simple mais évocatrice qui fournissait un réel plaisir à suivre la vie de cet ex-flic.

Dans ce nouveau roman, après la précédente et douloureuse affaire où Bostik devait enquêter sur la mort de Mathieu Groseiller (Le couz’), il a décidé de prendre le large, pour se ressourcer. Il laisse derrière lui sa femme adorée Lyly et prend la direction du Morvan, ses terres natales où l’attendent une vieille maison familiale. La proximité des bois lui permettra de devenir bucheron amateur, de faire des efforts physiques et se vider l’esprit.

En arrivant, une ancienne petite amie lui apprend qu’il est en réalité le père d’un adolescent. En apprenant qu’elle était enceinte, elle avait décidé de garder l’enfant sans en informer Bostik. Mais aujourd’hui, le bébé est devenu un adolescent difficile, qui sèche les cours, qui cache de l’argent dans sa chambre. Elle a peur qu’il soit impliqué dans des rackets ou pire, dans un trafic de drogue et pense qu’il a besoin d’être recadré par son père.

Bostik hésite, n’a pas encore pris sa décision mais la rencontre avec Livia, une amie archéologue va changer ses priorités. Lors de fouilles dans une cave des maisons noyées par le lac artificiel de Pannecière, elle a trouvé des ossements humains. Il semblerait qu’il s’agisse du squelette d’un enfant et les os attestent qu’il a été maltraité, ou du moins qu’il a reçu de nombreux coups. Bostik retrouve sa passion des enquêtes dans une affaire qui va lui en apprendre beaucoup sur sa région et sur lui-même.

Laurent Rivière va donc prendre comme argument la mise au vert de son personnage Franck Bostik pour nous parler de la dureté de la vie campagnarde mais aussi de la maltraitance des enfants. Il va aborder aussi la politique de repeuplement des campagnes dans les années 80 où l’on plaçait des orphelins dans des familles du Morvan (et probablement ailleurs) sans qu’aucun contrôle sérieux ne soit réalisé.

L’auteur aborde cet aspect en parallèle de la psychologie de Bostik, que l’on découvre hésitant, presque timide, en tous cas face à un problème qu’il ne sait pas gérer : comment prendre contact avec un adolescent de 12 ans alors que l’on est son père naturel ? Il fait cela sans esbroufe, de façon tout à fait naturel et je retrouve cette qualité que je cherche dans un roman : ce talent de dérouler une intrigue sans que l’on s’aperçoive de petits artifices.

Laurent Rivière confirme tout le bien que je pensais de sa plume et de sa faculté à dérouler une intrigue en mettant au premier plan la psychologie de son personnage. Il arrive à créer une intimité avec Bostik ce qui le rend attachant. Il ajoute dans ce roman un petit je-ne-sais-quoi qui rend son livre passionnant, intéressant, et on prend un grand plaisir à suivre Bostik dans ses problèmes personnels (qui vont se compliquer à la fin du roman et peut donner une idée pour la suite) et dans son enquête. Bostik devient un personnage que l’on a plaisir de fréquenter, de suivre ; en un mot, comme en cent, vivement le prochain !

Ska cru 2022 

Comme tous les ans, je vous propose une petite revue des derniers titres parus chez Ska, ou du moins certains d’entre eux. Voici donc quelques lectures électroniques noires, pour notre plus grand bien. L’ordre des billets ne respecte pas mon avis mais l’ordre de mes lectures. Tous ces titres et plus encore sont à retrouver sur le site de Ska : https://skaediteur.net/

Je voudrais juste vous signaler deux choses : La saison 2 d’Itinéraire d’un flic de Luis Alfredo sera traitée dans un billet à part, ainsi que la nouvelle série écrite par plusieurs auteurs à la manière d’un Poulpe et qui s’appelle : Il était N.

Le jour des morts de Régine Paquet 

Deux nouvelles nous sont proposées : Dans l’odeur des lavandes (Accompagnée par l’odeur de la lavande, la narratrice, âgée de 66 ans) annonce à sa fille qu’elle va se marier et veut choisir sa robe blanche immaculée) et Un 15 janvier 1950 (Les femmes se réunissent pour la mort de Chrétien, le géant simplet du village)

Derrière une simplicité et un naturel si difficile à atteindre, Régine Paquet a réussi à me faire pleurer dans Dans l’odeur des lavandes, avec sa chute terrible et si sereine. La deuxième, écrite comme un conte, narre une histoire de village qui deviendra sans nul doute une légende.

Naissance des ogres de Alain Emery

Le corps de Rubens Carat est découvert dans la rivière, la gorge tranchée. Il fabriquait de l’alcool dans ses alambics clandestins et était connu pour être colérique et violent. Le lieutenant Dessouches mène l’enquête et focalise son attention sur Rudy Mayence.

L’auteur nous convie à un voyage temporel au début du vingtième siècle, pour une intrigue située dans un village et où la justice consiste surtout à se débarrasser des gens qui déplaisent. Accompagné d’une plume fort agréable, très classique dans la forme, cette nouvelle se termine dans un rire jaune sarcastique et mystérieux.

L’empathe saute le pas de Claude Picq

Quand on parle du Tréport, on pense à ses falaises. Les petites vieilles qui en sont tombées aussi, probablement, mais pas longtemps. Quand on en dénombre trois en un mois, cela s’appelle une hécatombe. Georges Marchais travaillait à la Poste, jusqu’à ce qu’il se découvre Empathe, capable de ressentir des émotions sur les scènes de crime. Depuis, il est devenu policier et travaille sur des missions particulières, telle celle-ci.

J’avais découvert Claude Picq sous le pseudonyme de Cicéron Angledroit tout récemment. Ce fut une surprise de le retrouver chez Ska pour une nouvelle série maniant l’humour noir et la verve, comme à son habitude. On suit donc l’homonyme de l’ex-premier secrétaire du parti communiste dans sa première affaire qui se délecte pour ses bons mots, malgré des paragraphes trop longs à mon gout.

Carrousel d’Aline Tosca

La brune, grande, masculine, androgyne regarde dans les rayons à la recherche d’une paire de chaussures. La blonde, féminine, aux formes généreuses l’observe avant de se préparer à prendre son poste à la poissonnerie. Le chef du magasin quant à lui se sent bien seul au milieu de ces femmes.

Aline Tosca m’a surpris avec cette esquisse, ce tableau représentant un supermarché et sa galerie. De portraits en mouvements éthérés, elle donne l’impression de tracer des traits sur sa toile, donnant à l’ensemble une impression de douceur et d’impressions, que viennent rehausser les impressions de solitude et de mal-être des personnages. Cette nouvelle est une superbe illustration des gens qui se suivent, se rencontrent, s’entendent, parfois s’écoutent mais jamais ne vivent ensemble.

Les lendemains qui déchantent de Sébastien Géhan

Dimanche matin, enfin, 13h06. Malgré une douche froide, le narrateur est harcelé par un mal de tête lancinant, conséquence de la cuite de la veille. En prenant la direction du Palace, supérette tenue par des asiatiques, Il finit au Vincennes, le bar-PMU, le temps d’avaler une mousse et de faire un pari aux courses de chevaux, puis continue son périple.

Dans une ville peuplée d’âmes en peine, l’auteur raconte une errance de lendemain de cuite, le genre de trajet parsemé de rencontres inédites, pour peu que l’on s’intéresse aux gens. Parsemé d’anecdotes plus vraies que nature, l’auteur arrive à nous faire vivre une ville morte en apparence, et termine avec un optimisme bienvenu.

L’imposition du cireur Touchet de Jean-Hugues Oppel

Le Trésor Public réclamait à Jean-Louis Touchet, artisan cireur de chaussures établi à son compte, une somme astronomique. Ce qui obligea le brave homme à se reconvertir … et pourquoi ne pas envisager d’écrire un polar ?

A la fois hommage à Jean-Patrick Manchette et clin d’œil à des anciens du polar, cette histoire courte est savoureuse et cynique à souhait. On ne peut résister au rire qui nous prend malgré le malheur qui frappe ce pauvre Touchet.

Les fumiers de Pierrisnard

Ah, ça discute dans les bars de ce village de campagne ! Ah, ça rigole de mauvaises blagues, de foutage de gueule devant le Ricard ! Ah, ça énerve de les voir, les piliers de bar, toujours prêts à se plaindre alors qu’ils planquent des lingots dans leur jardin ! Les fumiers !

Je ne peux m’empêcher de faire ma propre accroche sur cette nouvelle qui fleure bon les vieux imbibés qui refont le monde tous les jours. Avec son style parlé, son agressivité qui tourne à la haine, l’auteur se laisse aller à une histoire noire mais jouissive avec un ton original. Un auteur à suivre, pour sûr.

Quand je serai grand, je serai tueur en série de Gaëtan Brixtel

Monsieur G. tel qu’il veut qu’on le nomme reçoit dans sa cellule sa psychologue Claire Frémont, qui doit évaluer son état. Il raconte alors comment il s’est présenté chez les parents de Mélanie Dariel pour leur annoncer comment il l’avait tuée.

On trouve dans cette nouvelle une bonne dose d’humour noir, où le tueur en série explique posément et poliment comment et pourquoi il a tué ces gens, qui sont pour lui extrêmement malpolis et agressifs. Une lecture jouissive.

Je crois que j’ai tué ma femme de Frasse Mikardsson

Editeur : Editions de l’Aube

J’avais beaucoup aimé Autopsie pastorale, le premier roman de Frasse Mikardsson, pour son coté humoristique et l’originalité du sujet, traité par un médecin légiste. Ce deuxième roman traite d’un sujet bien plus grave.

En février 2017, une femme a été tuée de multiples coups de couteau par son mari. Présenté comme cela, cela ressemble à un fait divers tristement actuel (et j’y reviendrai plus tard). Cette affaire a été mise en avant de façon involontaire, dans un discours de Donald Trump d’une part, qui va évoquer un attentat terroriste en Suède, puis dans un questionnement dans la société suédoise sur l’immigration.

Au-delà de cela, il faut savoir que six mois plus tôt, Fatiha avait porté plainte contre son mari Orhan pour violences conjugales, avait porté plainte, avait demandé le divorce, et obtenu l’incarcération de son mari pour un mois et une injonction d’éloignement. Malgré un harcèlement par SMS, personne n’a réagi et cette affaire se termine dramatiquement par le meurtre d’une femme.

Orhan et Fatiha se sont mariés en Turquie, un mariage arrangé selon la tradition kurde, avant qu’ils ne s’établissent en Suède. On se retrouve donc face à une affaire qui, si elle parait simple de prime abord, se heurte en réalité à un choc de cultures différentes et à un courant raciste en Suède qui trouve un écho terrible dans l’actualité récente lors des dernières élections suédoises.

Je ne suis pas adepte de True Crime books, que l’on peut traduire de romans fortement basés sur des histoires vraies, et donc j’en lis pas ou peu. Pourtant, j’ai apprécié celui-ci par les thèmes abordés et la passion qu’anime l’auteur envers la violence faite aux femmes, l’acceptation des différentes cultures et l’égalité des sexes. Par de nombreux côtés, ce polar s’avère bien passionnant.

En tant que True Crime, le roman repose sur de nombreux documents, tels que des extraits d’interrogatoires, des compte-rendu officiels ou des SMS envoyés par les différents protagonistes. L’auteur ayant participé à cette affaire, il bénéficie d’une source d’information de première main, même s’il nous assure ne nous partager que des extraits de textes disponibles auprès du public.

Il aborde un sujet difficile, les violences faites aux femmes, qui me tient à cœur et qui touche tous les pays. Imaginez qu’en France, plus de deux femmes meurent sous les coups de leur conjoint par semaine ; je ne comprends toujours pas comment on peut laisser cette situation alors que tout le monde le sait. Mais l’auteur y ajoute un aspect peu connu, l’aspect culturel, ce qui n’excuse absolument pas ces actes odieux et criminels. Le parallèle avec les discours officiels des grands dirigeants mondiaux montre bien la tendance populiste qui se généralise et qui devient inquiétant.

Frasse Mikardsson aborde aussi avec un certain humour l’égalité homme femme, en particulier quand ses personnages discutent de la position des corps dans les réfrigérateurs de la morgue : doivent-ils être séparés par sexe ou doit-on respecter l’égalité ? Au-delà de cette scène, il montre la difficulté de faire évoluer les mentalités et la nécessité de mettre des priorités devant cette injustice.

S’il n’y a pas de doute quant à la culpabilité d’Orhan, la question à résoudre devient : sommes-nous en présence d’un crime d’honneur ? Orhan était-il en pleine possession de ses moyens ? Frasse Mikardsson nous apprend beaucoup de choses sur ce sujet, en même temps qu’il nous montre une inspectrice très impliquée dans cette enquête, cherchant à trouver les arguments pour qu’Orhan ait une peine lourde, surtout dans un pays qui connait très peu d’actes violents. S’il est totalement différent du premier roman, Je crois que j’ai tué ma femme démontre que Frasse Mikardsson a beaucoup de choses à nous dire et à nous apprendre.

Sur des Breizh ardentes de Stanislas Petrosky

Editeur : Eaux troubles

Pour les lecteurs peu avides d’humour en dessous de la ceinture, Stanislas met en introduction de son roman un avertissement :

« Dans cette époque où dès que l’un cause, l’autre se sent fortement offensé …

Dans cette époque où dès que tu poses un mot sur le papier, tu dois bien faire gaffe à ne blesser personne …

Dans cette époque où pour un vocable mal employé, tu peux être menacé de procès …

J’arrête ici cette liste, juste pour te dire que j’emmerde la bienséance, le politiquement correct et encore plus la censure !

De même, il me semble normal de te prévenir, à part mes amis, tous les personnages de ce roman sont fictifs. Si quelquefois il y avait un individu assez prétentieux et bas du front pour se prendre pour un des héros de cette aventure, qu’il se dégonfle l’ego et ferme sa gueule, ça lui évitera d’être ridicule.

Ton Requiem. »

Requiem, prêtre exorciseur des cons et malfaisants, membre du service secret du Vatican, doit résoudre une affaire de vol. L’héritage de Laurent Gérard, vieillard logé à l’EHPAD des Joyeux Macareux à Névez en Bretagne qui devait revenir à l’Eglise a été détourné au profit d’une sombre association. Le chanoine Pichon a alerté le Sodalitium Pianum et voici donc notre Requiem sur la terre des menhirs.

Faisant appel à son acolyte Falvo, il se présente à l’EHPAD avec un CV qui ferait rougir des fraises : maquilleur sur des films pornographiques gays, assistant d’un vétérinaire pour les inséminations artificielles puis garçon d’amphithéâtre. Son nouveau nom est du même ressort : Nikos Lebelle. Et c’est Rozenn, une superbe créature, aide-soignante qui le découvre. Devant le peu de candidatures, M. Guenanten l’embauche et Requiem peut commencer son enquête.

Mon Dieu, pardon Patron, comme dirait Requiem, que j’ai eu du mal à trouver ce roman. Et c’est bien dommage, tant je suis amateur des aventures de Requiem, pour son coté anticonformiste, anti-pourris. L’air de rien, derrière son coté « je défouraille les personnes bien-pensantes », il y a une intrigue, une vraie construites à base de scènes toutes plus drôles les unes que les autres, un mystère et un hommage au travail difficile des aide soignants.

Que vous dire de plus ? Sans même exagérer, ce roman comporte un éclat de rire garanti à chaque page … et encore je ne me suis pas forcé. J’ai trouvé aussi que Stanislas Petrosky, s’il rend hommage à Frédéric Dard, s’en démarque pour trouver son propre style, avec des expressions ou même des descriptions irrésistibles.

Evidemment, tout cela n’est pas sérieux, mais ce roman donne une vraie bouffée de bonne humeur, et garde le rythme du début à la fin, avec sa dose de clins d’œil à quelques auteurs, de réparties, de femmes belles à tomber, et de chansons issues du répertoire français et mentionnées en titres de chapitre. Requiem, c’est du dépoussiérage pour nous rappeler qu’il faut arrêter de se prendre au sérieux.

La loi des vents tournants de Muriel Mourgue

Editeur : Editions Encre Rouge

Parmi les romans de Muriel Mourgue, on y trouve deux cycles différents. Angie Werther qui est une agent secret française dans un monde futuriste proche et Thelma Vermont qui est une détective privée new-yorkaise dans les années 60.

Nous sommes en 2028. Angie Werther, qui a connu une enquête traumatisante pendant laquelle elle a failli se faire violer, voudrait voir son père plus souvent, lui qui habite Buenos Aires. Alors qu’elle est retranchée dans sa propriété en Normandie, Luc Malherbe, son ancien chef et actuel conseiller personnel de la première dame du pays, dont elle se méfie, fait appel à elle pour une affaire délicate.

La présidente française Rose Leprince déplore la mort de la femme du premier ministre, Rodrigue Sirkho. Eva Sirkho paraissait tout le temps gaie, sur les photographies qui démontraient son aura naturelle. Elle était d’ailleurs chroniqueuse pour une émission de télévision. Du coté personnel, les deux époux connaissaient des aventures extraconjugales, pourvu qu’elles soient discrètes.

En théorie, la mort d’Eva apparait comme une sortie de route, un bête accident de la route de quelqu’un qui roule trop vite. Mais le simulateur de trajectoire démontre sans conteste qu’on aurait poussé la voiture de course hors du chemin, engendrant un accident mortel. Angie, aidée d’Alex Darkness, spécialiste hacker du Net, vont faire la liste des potentiels suspects. Jalousie professionnelle, politique, attentat ?

Ceux qui connaissent l’univers d’Angie Werther et son histoire vont trouver le début du roman un peu long. Muriel Mourgue revient en effet sur sa vie et les personnages qui l’entourent. Certes, il s’agit d’un prologue, mais on peut aisément le passer pour arriver dans le cœur du sujet, l’enquête.

A nouveau, je retrouve le style limpide et calme de Muriel Mourgue. Il ne faut pas chercher ici de scènes sanguinolentes, ou même d’action à outrance. Cette nouvelle enquête respecte à la lettre les codes du genre, et l’on voit Angie et Alex rencontrer les suspects les uns après les autres pour les éliminer (ou pas ?) de leur liste.

Passant de l’enquête aux hautes fonctions de l’ »’Etat, il règne dans ce roman une ambiance de menace, car depuis le grand cataclysme, l’organisation terroriste L’Etoile Noire menace de perpétrer de nouveaux crimes. Cela constituera la deuxième intrigue de ce roman fort sympathique, qui sans apporter de nouveautés au cycle Angie Werther, se lit avec une certaine délectation.

L’or vert du Sangha de Pierre Pouchairet

Editeur : Alibi (Ex-Filatures)

Et si avec L’or vert du Sangha, Pierre Pouchairet avait été son grand roman. Je ne lui souhaite pas car j’espère lire encore beaucoup de romans de cet auteur prolifique de ce niveau là. Pour ce faire, il a créé un pays africain de toutes pièces et nous dresse un état actuel des pays de l’Afrique noire.

Le Sangha est un pays d’Afrique centrale bordé par l’Océan atlantique. Il est richement doté de ressources naturelles, telles que le pétrole, le gaz, les minerais ou les bois précieux. Bien qu’il soit considéré comme une démocratie, le pays se prépare aux élections qui vont opposer le président sortant Honoré-Martin Atangana, qui en est déjà à son sixième mandat à une ancienne star du football Luc Otsiemi.

Luc Otsiemi s’est fait prendre la main dans le sac de cocaïne par la Police Judiciaire. Alors qu’il s’attendait à faire de la prison, on lui propose de jouer le rôle du challenger dans les élections du Sangha. On lui octroie pour l’occasion un chef de campagne, Jacques Lavergne, rompu à ce genre d’événements. Depuis, avec son slogan promettant le pouvoir au peuple et l’arrêt de la corruption, sa côte monte en flèche.

Claire Dorval se voit proposer un reportage pour suivre les élections présidentielles par son patron Jean-Michel Mebareck. Arrivée à l’aéroport de Bénoué, elle est « fraichement » accueillie par les officiers des douanes avant de retrouver son chauffeur Abou. Après sa rencontre avec Otsiemi, elle décide de revenir an France pour enquêter sur sa jeunesse. Mais elle doit bien vite retourner au Sangha quand on retrouve le corps dévoré par des crocodiles de Jean-Pierre Mounier, un collègue journaliste.

Il ne faut pas avoir peur devant les 440 pages de ce pavé, surtout quand on y voit la police de caractère de petite taille. Car dès les premières pages, on sait que l’on a devant les yeux un polar costaud, un polar d’aventure, un polar politique, un polar engagé. Et nous retrouvons après une centaine de pages les deux personnages principaux de ce roman, Claire Dorval et le commissaire Kuate, en charge du meurtre de Jean-Pierre Mounier.

Evidemment, les deux enquêtes vont se dérouler en parallèle, et les deux personnages se rencontrer pour mettre en commun leurs informations. Et si les chapitres ne sont pas courts (comme dans un thriller), on sent bien que Pierre Pouchairet a pris son sujet à bars le corps et y a insufflé sa passion pour des pays qui se font exploiter par toutes les grandes puissances du monde.

D’ailleurs, on ne s’y trompe pas, on y verra la présence des chinois, des russes, des turcs sans compter les corses et les italiens, tout cela pour y exercer des trafics en tous genres tels que la drogue ou le bois, du bois rare de plusieurs centaines d’années, dont la coupe et le commerce est soi-disant réglementé. Et on peut passer d’un personnage à l’autre, d’un pays à l’autre, que l’on se rassure : Pierre Pouchairet est un conteur hors-pair, capable de nous emmener au bout du monde.

Plus que costaud, je qualifierai ce roman de génial tant j’y ai trouvé tout ce que j’attends d’un polar politique. Les situations sont réalistes, les personnages plus vrais que nature dans leurs réactions, les dialogues formidables, et la tension croissante jusqu’à une scène (presque finale) dans le port décoiffante. Et ne croyez pas que ce roman se terminera à l’eau de rose, le Sangha, comme tous les pays d’Afrique, est sans pitié où chacun essaie de rattraper un peu de la manne financière qui lui passe sous le nez.

Forcément, on prend énormément de plaisir à parcourir ces pages, on espère, on a peur, on est enchanté par la façon dont les scènes s’enchainent, et surtout, on a la rage au ventre de voir ces populations exploitées, spoliées, décimées. On a envie de hurler devant le massacre des forêts africaines dont on ne parle jamais (la forêt amazonienne est plus à la mode), de dire STOP !

Aimez-vous les uns les autres ! de James Holin

Editeur : Editions du Caïman

James Holin nous a habitués à des romans humoristiques cyniques, avant de nous proposer Pleine balle l’année dernière qui penchait plutôt vers une course poursuite haletante. Il nous revient dans le registre de la comédie, et quelle comédie !

On ne peut pas dire que cela ressemble à un réveil idéal quand des flics fous furieux défoncent votre porte d’entrée à coups de bélier, le matin à 6 heures. Et pourtant, Nolan Dardanus, jeune homme de Bobigny, doit en faire l’expérience. Chimio, le chef de la BAC, demande après Fabrice, le frère de Nolan, pour une suspicion de trafic de drogue. Au grand dam de sa mère, Fabrice a découché, et Nolan refuse de dire où Fabrice cache ses produits.

Avant de partir au lycée, sa mère lui signale qu’il a reçu une lettre envoyée par un notaire : il s’agit d’une convocation pour un héritage. Sa mère lui apprend alors qu’il est le fils naturel de Marcel Bezouard, le propriétaire des verreries du même nom. La crémation est prévue à 10h30, suivie de la réunion familiale dans le bureau du notaire, à 12h30 à Laon. Nolan n’y a jamais mis les pieds et n’a pas l’intention d’y aller.

Sur le chemin du Lycée, Nolan se fait intercepter par Nacer, le caïd du quartier. Il détient Fabrice et le renverra en petits morceaux s’il ne trouve pas 10 000 euros, la somme que Fabrice lui doit. Nolan n’a pas d’autre choix que d’aller à Laon. Il rentre donc chez lui, ouvre la cachette secrète de son frère et prend les sachets de poudre et le liquide. En se dépêchant, il arrivera à temps pour le train de Laon.

A la gare du Nord, il tombe sur une patrouille de trois flics, pour un contrôle de faciès, pardon, de papiers. Heureusement, une jeune fille qui le défend contre de futures peut-être potentielles violences policières. Ils arrivent à s’en sortir et montent tous les deux dans le train. Elle se présente, Soizic Bézouard, journaliste.

A Laon, Nolan fait la connaissance des enfants du défunt : Arnaud liquidateur judiciaire qui dépense plus vite que son ombre dans son SUV, François dit Glinoc le curé directeur du séminaire Notre-Dame de la Recouvrance, Florine maître de conférences à l’université de Picardie, divorcée d’un chirurgien passionné de silicone et enfin la Michto la veuve qui veut spolier ses enfants pour son propre compte. Le notaire annonce que les héritiers devront se mettre d’accord pour le partage sinon l’intégralité reviendra à l’un d’eux dont le nom reste secret.

On ne peut pas franchement parler d’un roman policier, ni d’un polar. On n’y trouvera pas un seul meurtre, pas de goutte de sang ni de serial killer, juste un mort et une lutte entre les héritiers. Le ton est donné dès les premières pages, on se retrouve en plein dans une comédie, qui va à un rythme d’enfer et nous fait vivre une journée de folie avec de nombreux soubresauts et des dialogues tous plus drôles les uns que les autres.

La force de James Holin réside dans cette capacité de poser son contexte et de nous faire vivre cinq personnages, tous attirés par l’odeur de l’argent, qui n’ont aucun chagrin envers la perte de leur père. A travers les situations, on découvre ainsi le ton cynique, acerbe, envers les truands officialisés par l’état, les membres de l’église prêts à tout pour rénover le plafond de leur église, les femmes obsédées par leur physique, les extrémistes féministes, les prêtes à tout pour récupérer le fric, et le pauvre Nolan au milieu de ces tornades.

Je me rappelle Demain j’arrête de Gilles Legradinier, cette excellente comédie qui partait d’un personnage et nous emmenait dans sa folie hilarante à un rythme d’enfer. Aimez-vous les uns les autres n’a rien à envier à ce genre comique, par le talent que montre James Holin pour faire vivre ces six personnages et surtout par sa science des dialogues auxquels on ne peut pas résister. D’ailleurs, je verrais bien ce roman adapté en film, tant tout s’enchaine à la perfection pour nous faire rire du début à la fin. Excellentissime.

Le fric ou l’éternité de Paul Chazen

Editeur : Jigal

Jimmy Gallier, propriétaire des éditions Jigal, a pour habitude de nous dégotter de nouveaux auteurs du Noir. C’est toujours très intéressant de rester à l’affut de ces nouveautés, pleines de verve. Le roman de Paul Chazen est porteur de promesses à venir.

Quand un nait dans une cité, son avenir est tout tracé, devenir chômeur ou trimer toute sa vie dans des postes mal rémunérés. Socrate passe donc d’un petit boulot à l’autre et il vient de se faire virer, ce qui lui arrive pour la première fois. Quand il voit son père se tuer au travail, cela ne lui fait pas envie. Mais il n’a aucune idée de ce qu’il pourrait faire, sans pour autant subir sa vie.

Dans un bar, il rencontre Nino, un membre de la Famille. A force de discussions, ce dernier lui propose un travail très facile, éliminer quelqu’un mais il devra faire en sorte que cela ait l’air d’un accident. Après quelques journées de surveillance, quelques heures de réflexion, quelques minutes de réalisation, la mission est parfaitement réalisée. Socrate coupe le circuit de freinage, mais pas complètement, et le conducteur s’écrase dans un virage ; l’accident parfait.

A partir de ce moment là, Socrate devient l’exécuteur attitré de la Famille. Il ne ressent aucune émotion, n’a aucun remords, il débarrasse la surface de la Terre de quelques personnes comme d’autres vont au travail le matin. Quand la morale s’efface au profit de l’individualisme, le personnage présenté par Paul Chazen en devient le meilleur exemple.

Car derrière cette intrigue noire, se cache une vraie question. A partir du moment où on baisse le niveau de l’éducation au ras des pâquerettes, à partir du moment où on laisse trainer un brouillard sur les débouchés potentiels des jeunes, où on donne des titres pompeux à des postes que personne ne comprend, il devient impossible d’intéresser les jeunes au monde du travail.

Le contexte posé, Paul Chazen déroule son intrigue à partir de ce postulat, grossit un peu le trait, mais reste toujours juste dans son expression, extrêmement précis. Paul Chazen a voulu son roman comme un coup de poing, c’est un uppercut ; mais pas un uppercut dans le gras du bide, un direct au menton. Son style évite toute phrase superflue, pour n’en garder que la viande nécessaire autour de l’os.

Il est à noter que les têtes de chapitres sont extraites des 36 stratégies qui est un traité chinois qui décrit les ruses et les méthodes qui peuvent être utilisées pour l’emporter sur un adversaire. Le traité a probablement été écrit au cours de la dynastie Ming (de 1366 À 1610). Les stratagèmes sont applicables à une action militaire ou à un conflit de la vie quotidienne.

http://www.taopratique.fr/wp-content/uploads/Les_trente-six_strategies.pdf

Derrière ses atours de roman noir, ce petit roman laisse augurer de promesses intéressantes mais pose aussi de vraies questions quant à l’avenir sociétal, un sujet qui me passionne autant que la démographie ou la géopolitique, vous vous en doutez bien. Alors, Le fric ou l’éternité ? A vous de choisir, mais après avoir acheté ce roman !

L’aigle noir de Jacques Saussey

Editeur : Fleuve Noir

Il ne doit me rester qu’un ou deux romans de Jacques Saussey, dont les plus célèbres sont le cycle consacré à Daniel Magne et Lisa Heslin. Il s’agit d’un changement d’éditeur pour cet auteur aux intrigues foisonnantes avec ce roman orphelin, qui nous convie à un voyage à la Réunion.

2016, Ghana. La jeune femme s’est endormie en bord de plage alors qu’un homme l’observe. Irrésistiblement attiré par elle, il s’approche. Quand elle se réveille, il est au dessus d’elle et prend peur. Sans hésiter, avec sa machette, il lui tranche la tête et s’enfuit dans la forêt en entrainant sa fille qui jouait à coté.

2020, Toulon. Hubert Bourdenais, directeur de la société chargée du traitement des déchets ménagers, accueille chez lui Paul Kessler, qu’il utilise pour régler de menus trafics orchestrés par ses ouvriers. Bourdenais sait que Paul a perdu son fils et que cette perte l’a fait démissionner de la police. Il lui propose une enquête en sous-main, inofficielle, celle de connaitre les causes de la mort en hélicoptère de son propre fils, Pierre Bourdenais. Le rapport légiste a conclu à un accident alors qu’il était un as du pilotage.

2020, Ecole Jacques Brel, La Réunion. Jean-Denis Pavadé, nouvellement nommé professeur des écoles, surveille les enfants dans la cour de récréation. Il voit la petite Louna dans un coin, en train de dessiner. Quand il lui demande de regarder ses œuvres, elle s’enfuit. Il est surpris de voir des croquis de monstres sur chaque page. Chloé la psychologue scolaire essaie de faire dire à l’enfant la raison de ces dessins, mais elle reste mutique. Chloé et Jean-Denis font part de leurs soupçons à la directrice de l’école.

Dès le départ de ce roman, l’auteur nous présente une multitude de personnages, pas loin d’une dizaine, dans des lieux et des contextes différents. Et chaque personnage va amener son lot de mystères, d’énigmes à résoudre, ce qui va forcément aiguiser l’esprit du lecteur de roman policier ou de thriller. Heureusement, Paul Kessler va faire le lien en progressant petit à petit dans sa propre enquête.

On louera donc la construction qui, si elle peut s’avérer complexe de prime abord, va ressembler à une toile d’araignée que nous allons parcourir en commençant par les fils extérieurs. Et Jacques Saussey sait comment nous tenir en haleine, comment mener une intrigue, nous passionner par dialogues remarquablement efficace, et utiliser les codes du thriller quand il le faut avec des chapitres courts.

Contrairement à beaucoup de ses confrères, Jacques Saussey ne prend pas son lectorat pour des imbéciles : j’en prends pour exemple les mentions des dates et des lieux en tête de chapitre qui ne sont présents que quand on en a besoin. De même, il a conçu son intrigue avec beaucoup de pistes à suivre, des trafics en tout genre, et l’itinéraire de Sobgwe sur quatre années sans jamais perdre l’intérêt du lecteur.

Enfin, on y trouve une description des deux facettes de la Réunion (sans que l’auteur n’y ait mis les pieds, il l’avoue en fin de roman), l’une faite de belles maisons pour les riches, l’autre plus misérable avec tout ce que cela comporte comme horreurs (même s’il reste très évasif et non démonstratif dans le glauque). L’aigle Noir est donc un thriller de très bonne facture de la part d’un auteur au savoir-faire incontestable, trop injustement méconnu à mon goût.