Editeur : Slatkine& Cie
Traducteur : Elsa Damien
Après son cycle consacré à l’avocat Guido Guerrieri (ne ratez pas Les yeux fermés), Gianrico Carofigio a entamé une autre série concernant le maréchal Pietro Fenoglio. Après l’été froid (pas encore lu) et Une vérité changeante, voici donc le troisième tome mettant en scène Fenoglio qui n’est pas une enquête policière à proprement parler.
Le maréchal Pietro Fenoglio approche de sa retraite, affichant 58 ans au compteur. Malheureusement, son arthrose l’a obligé à subir une opération de la hanche, puis de longues séances de rééducation dans une clinique de physiothérapie. Ses séances de travail vont être dirigées par la belle physiothérapeute Bruna.
Fenoglio apprend qu’il va avoir un malade comme partenaire. Le précédent était une personne âgée et cela ne le rassure pas. A sa grande surprise, Giulio est un jeune de 24 ans qui a été victime d’un accident de voiture. Giulio a subi une opération pour poser une prothèse de hanche et doit lui aussi réaliser sa rééducation.
Giulio est un jeune homme un peu perdu dans sa vie. Il poursuit des études de droit pour faire plaisir à ses parents mais se retrouve à un âge où il se demande ce qu’il va faire. Victime d’un accident de route, il porte aussi une prothèse de hanche et doit faire sa rééducation. Etonnamment, les deux hommes vont engager la conversation et évoquer des sujets à travers certaines affaires traitées par Fenoglio.
Autant vous le dire tout de suite, ce roman n’est pas un roman policier, même si Fenoglio va évoquer trois ou quatre de ses enquêtes. Ce scénario ressemble plutôt à une discussion entre deux personnages sur la vie, sur les choix que l’on fait ou qu’on est obligé de faire, sur les opportunités et sur le métier de policier. Pour certaines affaires qui méritent d’être détaillées d’ailleurs, GianricoCarofiglio utilise dans ces chapitres la narration à la première personne pour laisser Fenoglio prendre en main l’intrigue.
A travers ces dialogues, on retrouve bien vite les qualités d’écoute et d’observation de Fenoglio. En tant que sénior (comme on dit en France), il retrouve un plaisir à transmettre son savoir et montre une certaine nostalgie envers le passé. Il parle avec une grande tendresse et nous montre aussi un manque d’assurance quand il évoque ses réflexions sur ce qu’il s’est passé, sans jamais chercher à s’excuser.
A travers toutes ces journées à pédaler, il va parler de son début dans le métier de policier, puis va aborder les techniques d’interrogatoire, les doutes, le mensonge, la colère, la vérité, le mensonge … Il aborde aussi les techniques de la police pour faire avouer à tout prix un suspect que les policiers pensent coupables (même si dans le cas présenté ils se trompent) ou les qualités nécessaires à un inspecteur comme la déduction.
Il ressort de ces discussion un calme, une sérénité mais aussi beaucoup de tendresse et de besoin d’aider ce jeune homme face à un carrefour de la vie. Fenoglio ne va jamais imposer son point de vue aux questions de Giulio mais s’appuyer sur ces exemples pour au final laisser à l’autre le choix de son opinion. Par cette façon de présenter son intrigue, GianricoCarofiglio écrit un roman intemporel qui s’apparente à une leçon de vie.
D’un ton résolument intimiste et tourné vers l’autre, l’auteur nous présente Fenoglio comme le témoin pour les générations futures, remplissant son rôle d’instructeur, de guide et d’aide. Forcément, pour un vieux comme moi, ce roman me parle. Et j’ai adoré la fin, quand Fenoglio et Giulio se séparent et que le prisme change : tout examinateur et observateur que se présente Fenoglio, c’est bien Giulio qui lui fera remarquer que Bruna éprouve de l’affection pour lui. Ce qui démontre bien que nous tous avons beaucoup à apprendre des autres ; une formidable leçon d’humanité.