Archives pour la catégorie Littérature italienne

Le tueur au caillou d’Alessandro Robecchi

Editeur : Editions de l’Aube

Traducteurs : Paolo Bellomo et Agathe Lauriot dit Prévost

Avec cette troisième enquête (aventure) de Marco Monterossi, après Ceci n’est pas une chanson d’amour et De rage et de vent, on reprend les ingrédients des deux précédentes, les mêmes personnages pour une histoire dramatique et rageante qui pose beaucoup de questions.

Milan voit ses températures augmenter avec le retour du mois de mars. Dans une cité HLM (Habitation pour Locataires Miséreux) que l’on surnomme la caserne, toutes les populations pauvres de différentes nationalités se côtoient. Ces barres d’immeubles comportant plusieurs milliers d’appartements sont vouées à la démolition. Faute d’argent, la municipalité a délaissé cette cité et ferme les yeux sur des mafias qui permettent à des familles pauvres de squatter moyennant un loyer versé en dessous de table.

Francisco habite là-bas et travaille dans sa propre entreprise en tant que décorateur de boutiques, en réalisant leur devanture. En rentrant, il fait part de sa colère envers son dernier client qui ne lui règle pas sa facture alors que le travail a été réalisé depuis six mois. Sa femme Chiara essaie de le calmer, en sachant qu’il a raison. Merde ! il ne peut pas se permettre avec sa petite entreprise de travailler gratuitement pour les riches ! Pour arrondir ses fins de mois, il stocke des équipements « tombés du camion » sur lequel il touche une commission.

Au centre-ville, Fabrizio Gotti, le propriétaire d’une chaîne de boucheries a été retrouvé assassiné au pied de sa maison. On lui a tiré une balle dans la poitrine et une dans la tête, à bout portant. Le brigadier Carella et le sous-brigadier Ghezzi penchent pour un amateur plutôt que la mafia. Chose étonnante : un caillou a été posé sur le corps. Pourvu que ce ne soit pas un tueur en série ! Il va être difficile de trouver une raison à ce meurtre, l’homme semblant honnête, inconnu des services de police.

Quand Cesare Crisanti, un architecte connu est retrouvé assassiné d’une balle dans la tête avec un caillou, la panique gagne la justice et la police. On ne peut décemment pas laisser cette affaire aux mains de la police milanaise. Rome décide d’envoyer sa propre équipe de spécialistes, accompagnée d’un profileur, pour calmer les médias. Ne voulant pas lâcher l’affaire, Carella et Ghezzi se mettent en congés avec l’accord de leur chef pour poursuivre l’enquête. Les deux morts ont été tués par deux armes différentes dont le seul point commun est qu’elles sont mal entretenues.

Encore un mois à tenir avant d’être dégagé de ses obligations envers l’émission qu’il a créée : Crazy Love ! Carlo Monterossi se demande ce qu’il va faire après. Katia Sironi, son attachée de presse l’appelle : sa mère a cédé aux belles paroles d’un vendeur de religiosités et s’est fait voler une bague valant des millions. Elle demande à Carlo et Oscar, un détective secret de la récupérer en dehors de tout circuit légal.

On retrouve dans ce roman tout le charme que j’avais trouvé dans les deux premiers, avec un meilleur équilibre entre l’humour et la colère de Carlo (et donc de l’auteur ?). On y retrouve de l’humour froid, du cynisme mais aussi un aspect humain et social que l’auteur endosse pour dénoncer les conditions de vie des pauvres travailleurs. Il faut voir comment ils se retrouvent essorés par la mafia calabraise et vivent dans des conditions lamentables alors que la police et les politiques ferment les yeux.

Déjà dans De rage et de vent, Carella et Ghezzi prenaient de l’importance dans l’intrigue. Ici on les retrouve au même niveau que Carlo et Oscar et les deux fils de l’histoire sont menés en parallèle pour se retrouver à la fin de façon totalement inattendue. Alessandro Robecchi nous construit ici une intrigue que l’on aura du mal à oublier, de celles qui nous placent face à un dilemme, à des choix impossibles à prendre, à des questions impossibles à répondre.

Alessandro Robecchi arrive à nous faire vivre dans les familles italiennes, arrive à nous plonger dans des discussions typiques, où les italiens parlent vite, nous enrobent dans des circonvolutions, des phrases sans fin. Et puis, il donne une importance de plus en plus importante aux femmes, Katrina la moldave cuisinière pour Carlo mais aussi Madame Rosa, la femme de Ghezzi qui occupe un rôle central, et pas seulement pour les plats délicieux qu’elle concocte pour Carella et son mari.

Avec ce roman, Alessandro Robecchi s’impose comme un auteur de premier plan dans le polar milanais. Il apporte un fort aspect social et a décidé de montrer comment la majorité des gens vivent, ceux qui travaillent et n’ont pas assez d’argent pour se loger et manger décemment. Ajouté à cela, on trouve une intrigue qui pose clairement la question de la justice et on se retrouve face à un dilemme qui nous fait réfléchir. Je peux vous garantir que vous n’êtes pas prêt d’oublier cette histoire immensément dramatique et tristement réaliste.

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De rage et de vent d’Alessandro Robecchi

Editeur : Editions de l’Aube

Traducteurs : Paolo Bellomo et Agathe Lauriot dit Prévost

Deuxième tome des enquêtes de Carlo Monterossi, après Ceci n’est pas une chanson d’amour, ce roman change totalement le ton, car on passe d’un humour cynique agressif à de la rage pure et froide. Tout aussi excellent !

Andrea Serini, en tant que propriétaire de l’agence de vente de véhicules de luxe, tient absolument à fermer sa boutique et éteindre les lumières. Ce soir-là, un bruit de mouvement l’attire, quelqu’un est entré. Il se retrouve face à un vieux camarade qui veut retrouver son argent. Sous la menace, Andrea lui donne un nom, Anna Galinda, avant de prendre un balle en pleine tête. En sortant, un moine l’aperçoit et lui intime de s’arrêter. Il s’agit du sous-brigadier Tarcisio Ghezzi, qui n’a pas le temps de sortir son arme devant la rapidité de l’homme. En deux coups, il se retrouve assommé et son arme dérobée.

Carlo Monterossi, créateur de l’émission Crazy Love pour la grande usine à merde (la télévision) où il s’agit d’étaler au grand jour les histoires d’amour du grand public, veut depuis un certain temps stopper sa collaboration. Pour lui, ce concept est devenu indécent. Mais son agente Katia Sironi insiste : il ne peut pas partir comme ça, Ils sont prêts à lui offrir un pont d’or (sur lequel un touchera un copieux pourcentage). Elle veut qu’il rencontre le Boss en personne, Luca Calleri. Et contre toute attente, Carlo accepte.

Dans le restaurant de luxe, Carlo arrive en avance et assiste à l’arrivée du « Ponte », devant qui tout le monde plie. Son temps est compté, il n’accorde pas dix minutes à quiconque, et d’ailleurs, il ne mange pas et confirme qu’il compte sur Carlo. Dépité par cette attitude, Carlo finit au bar et est accosté par une femme. Tous deux boivent et Carlo raccompagne la jeune femme chez elle, la couche sur canapé et la couvre. En sortant, il claque la porte, avec un bruit sec, un CLAC qui résonnera longtemps dans la tête de Carlo. Le lendemain, il apprend qu’elle a été torturée et tuée avec le même revolver qu’Andréa Serini.

Par rapport au premier roman, qui étalait un humour cynique que j’avais adoré, cette deuxième enquête se révèle bien plus sérieuse. On y trouve bien quelques traits d’humour dans les dialogues ou quand il s’agit de se moquer des policiers. Mais le ton est irrémédiablement noir, à l’image de cette ville de Milan, balayée par un vent glacial, qui correspond bien au titre et à l’humeur de Carlo Monterossi.

Le décor hivernal anormal, ce vent infernal, fait ressurgir une rage froide, que Carlo va ressentir, ajouté à un sentiment de culpabilité envers la mort d’Anna Galinda. Il ne cessera de se rappeler cette porte se fermant dans un CLAC fatal, croyant qu’il est à l’origine de sa mort. Il va donc se lancer dans cette croisade pour dénicher les coupables et comprendre cet engrenage mortel.

Car derrière Carlo et son humeur noire, l’auteur nous montre combien les richards se servent des pauvres et rien de plus efficace que de mettre sur le devant de la scène les prostituées. Il nous montre une caste sans aucune pitié ni humanité, une frange d’ultra-riches fiers de leur impunité, usant et abusant de gens qui, finalement, ne peuvent qu’être définitivement les perdants de cette société.

A nouveau, on trouve dans ce roman colérique un scénario remarquable, complexe à souhait où les intrigues sont menées en parallèle entre Carlo, Ghezzi et Carella, où l’auteur nous imprègne de cette ville glacée par ce vent inhabituel. Cette deuxième enquête, très différente de la première, confirme que cette série est à suivre avec impatience, avec une mention spéciale pour Katrina, la cuisinière moldave de Carlo, une vraie mama qui prend soin de son protégé. 

Ceci n’est pas une chanson d’amour d’Alessandro Robecchi

Editeur : Editions de l’Aube

Traducteurs : Paolo Bellomo & Agathe Lauriot Dit Prévost

Suite au billet de Jean-Marc Lahérrère, j’avais acquis ce roman et l’ai mis de côté. Maintenant que les trois tomes sont sortis, nous commençons donc une semaine complète dédiée à Alessandro Robecchi et son personnage récurrent Carlo Monterossi.

A voir les célébrités (que l’on appelle « stars ») squatter les émissions de télévision et étaler leurs problèmes de cœur, Carlo Monterossi a l’idée de transposer le concept auprès des gens du public et créé l’émission « Crazy Love ». Grâce à des scenarii concoctés aux petits oignons, l’émission rencontre un succès immédiat dès lors qu’il s’agit de regarder les malheurs de la ménagère, aidé en cela par la présentatrice vedette que tout le monde s’arrache Flora de Pisis.

Sauf que Carlo Monterossi ressent de la lassitude et veut arrêter de produire son émission pour « l’Usine à merde ». Quand un homme frappe à sa porte en voulant lui coller une balle entre les deux yeux, Carlo va faire appel à des deux amis Nadia et Oscar pour résoudre ce mystère plus tôt que la police ne serait capable de le faire.

Un homme riche monsieur Finzi fait appel à deux tueurs à gages pour résoudre un petit problème. Afin de pouvoir réaliser son centre commercial, il fait appel à un intermédiaire pour déloger des gitans du terrain. Mais l’affaire tourne mal, avec tirs de coups de feu et lancers de cocktail Molotov. Le bilan est lourd, deux morts côté gitans dont un enfant, et des policiers blessés. Il veut donc se débarrasser de l’intermédiaire incompétent.

En parallèle, les gitans ne peuvent pas laisser impuni cet acte meurtrier envers les leurs. N’ayant aucune confiance envers la police, et ils ont raison, ils vont mandater Hego et Clinton pour retrouver les assassins et les faire disparaitre de la surface de la Terre, ce qui ne serait pas une lourde perte.

Si vous ne le savez pas, je nourris une véritable aversion envers la télévision. Je ne peux donc que louer Alessandro Robecchi quand il l’évoque sous le terme « Usine à merde ». Et je m’attendais à détester Carlo Monterossi avant même de tourner la première page. Par son métier, scénariste et producteur d’émission de bas-étage (c’est mon opinion), Carlo pourrait ressembler à un chasseur de primes sans âme, courant après le profit en créant des émissions voyeuristes sans limites pourvu que cela lui ramène du fric.

Sauf que Carlo Monterossi, après avoir rencontré un succès incommensurable, songe à changer d’orientation devant son « bébé » qui devient de plus en plus obscène. Vous l’aurez compris, loin d’être un personnage exempt de tout reproche, nous avons affaire à quelqu’un en quête de rédemption, d’autant plus qu’on va vouloir attenter à sa vie. En comparaison, ses acolytes Nadia et Oscar sont plus effacés … mais attendons la suite de la série.

Par contre, les deux autres groupes permettent de profiter pleinement de l’humour de l’auteur, très cynique et bien noir comme je l’aime. Autant Carlo nous montre un humour noir et désabusé sur le Système, autant les tueurs à gages nous offrent des répliques d’une drôlerie irrésistible. Même certaines scènes prêtent à rire surtout dans la dernière émission de Crazy Love, flirtant avec du burlesque.

Enfin, Alessandro Robecchi a construit une intrigue retorse à souhait. Au-delà de faire avancer trois groupes indépendants n’ayant aucun lien, il va bâtir son édifice petit à petit et faire se rencontrer tout le monde, d’une façon totalement naturelle. On ne peut qu’être ébahi par cette maitrise mais aussi par le rythme global, même si on peut regretter quelques passages inutilement bavards et la présence d’un groupe néonazi qui aurait mérité à lui seul une enquête supplémentaire.

En conclusion, j’ai envie de dire : « Chouette, un nouveau personnage récurrent à suivre. » Mais il faut aussi souligner la remarquable acuité du monde de la télévision, la description de groupes néonazis, le ton personnel parsemé d’humour caustique et des personnages attachants. Ceci n’est pas une chanson d’amour, qui rappelle un titre de Public Image Limited, est une très bonne entrée en matière dans les affaires de Carlo Monterossi.

L’illusion du mal de Piergiorgio Pulixi

Editeur : Gallmeister

Traducteur : Anatole Pons-Reumaux

Dans L’île des âmes, nous faisions la connaissance de Mara Rais et Eva Croce, la première sarde et mutée aux affaires non élucidées et la deuxième milanaise ayant demandé sa mutation suite à la mort de sa petite fille. Autant L’île aux âmes faisait la part belle aux paysages et aux légendes de la Sardaigne, autant nous nous retrouvons dans un pur thriller qui respecte à la lettre les codes du genre. Un thriller de haut vol, 600 pages avalées en trois jours seulement.

Le verdict vient de tomber dans le procès d’un pédophile avéré et stupéfie l’assistance. Le beau-père ayant abusé de la jeune fille est acquitté parce qu’à force de faire trainer en longueur les délais d’enquête, les faits qui lui sont reprochés sont devenus prescrits. La présidence du tribunal ne peut que commencer son annonce par des excuses : « Je vous demande pardon au nom du peuple italien pour cette grave injustice dont nous avons tous conscience… »

Après avoir remercié son avocat, Daniele Truzzu rentre chez lui. A son domicile, un homme l’attend et l’endort. Plus tard, ce jour-là, une vidéo est postée sur Whatsapp. On y voit Truzzu attaché sur une chaise, les dents arrachées, la bouche ensanglantée. Puisque la justice ne peut faire son travail, le peuple devra voter sur le sort du violeur. Le ravisseur donne trois heures aux gens pour entre la vie et la mort.

Eva, en pèlerinage sur ses terres natales à Belfast, reçoit un appel de Mara. Elle doit vite revenir pour retrouver le violeur, dont les dents ont été offertes dans un sac en plastique à la victime de Truzzu, sa belle-fille. Quand la vidéo déferle sur les réseaux sociaux, tout le monde ne parle que de cela. En haut lieu, à Milan, tout le système judiciaire est sur les dents (désolé, je n’ai pas pu m’empêcher de la faire !). On dépêche sur place un excellent policier habitué aux cas difficiles, Vito Strega.

« En Italie, le meurtre vend plus que le cul. » Luana Rubicondi a commencé comme simple journaliste avant d’arriver devant les écrans pour les informations télévisées. Approchant de la cinquantaine, après un passage au télé-achat, elle a profité du regain d’intérêt pour les faits divers et créé son émission Verdict. Quand elle apprend l’existence de la video du Dentiste, elle change son programme et improvise une émission spéciale qui va mettre le feu aux poudres.

Les qualités qu’attendent les fanas du thriller peuvent se résumer en quelques mots : des personnages forts, une histoire prenante et du rythme. Ce que j’attends des thrillers, c’est une belle écriture et un thème qui permet d’élever le débat au dessus d’une simple course poursuite après un serial killer. Avec ce roman là, les fanas du genre vont être comblés et j’ai été happé, ébloui par ses qualités et les différences avec le premier roman.

On retrouve avec une joie non dissimulée nos deux inspectrices dont tous les traits de caractère sont aussi opposés que l’eau et le feu. Malgré cela, elles forment un duo imparable, implacable et redoutablement efficace. A la limite, on n’avait pas besoin de Vito Strega sauf pour les scènes finales. S’il n’est pas nécessaire d’avoir lu L’île des âmes auparavant, je vous conseille tout de même de la faire, pour deux raisons : vous appréhenderez mieux les personnalités de Mara et Eva ainsi que la Sardaigne ; et il vient de sortir au format poche.

L’histoire est implacablement menée, avec ses morts toutes les deux cent pages, le passage d’un personnage à l’autre, les dialogues qui claquent, des phrases courtes, les chapitres qui ne dépassent que rarement les quatre pages. Toutes ces qualités font que cela nous pousse à aller toujours plus loin, à vouloir connaitre la suite et ne pas le lâcher. De ce point de vue là aussi, ce roman est une grande réussite.

Enfin le sujet qui se rapproche de 7 milliards de jurés ? de Frédéric Bertin-Denis, fera forcément réagir beaucoup de gens. L’état étant le garant du progrès de la société, il est inadmissible que les budgets de la justice soient sabrés, que les procès trainent en longueur et que des coupables évidents s’en sortent avec des dessous de table ou juste un avocat doué. Piergiorgio Pulixi s’en sort remarquablement bien en abordant tous les points de vue et en cela, ce roman s’avère bigrement passionnant aussi.

Allez, je vais chipoter un peu, alors que ce thriller est réellement un excellent roman. Tout d’abord, comme je l’ai dit, le personnage de Vito Strenga n’était pas nécessaire, sauf pour la fin. Ensuite, il a tendance à insister sur le mal-être de Mara, sur la dureté d’Eva, et cela se voit, même si j’apprécie Eva. Enfin, les événements, c’est à dire chaque kidnapping, interviennent de façon un peu trop rythmé (toutes les 150 pages environ) et j’aurais aimé un peu plus de surprise. Mais au regard du plaisir que j’ai eu à le lire, je chipote.

Ne ratez pas cet excellent thriller, il en vaut largement le coup.

Le tailleur gris d’Andrea Camilleri

Editeur : Métailié (Grand Format) ; Points (Format poche)

Traducteur : Serge Quadruppani

A coté des enquêtes du célèbre commissaire Montalbano, le regretté Andrea Camilleri nous offre par moments des romans orphelins. Celui-ci se présente comme un roman intimiste sur le doute et la confiance.

Un banquier quinquagénaire, veuf depuis dix ans, se retrouve à la retraite et passe d’une vie professionnelle chargée à une activité quasi-nulle. Il a rencontré Adèle, lors de la mort de son mari, habillée de son impeccable tailleur gris et en est tombé amoureux. Puis ils se sont mariés, malgré leurs 25 années de différence. Ajouté à sa beauté renversante, le banquier a pu apprécier l’appétit sexuel d’Adèle.

Puis, avec sa retraite, ils ont commencé à faire chambre à part. Tout juste pouvait-il assister à Adèle en train de s’habiller. Pour lui, cela ne fait aucun doute, Adèle le trompe. Pourtant, Adèle semble débordée par toutes ses activités, faisant partie de nombreux comités. D’ailleurs, grâce à son manque d’activité, il arrive à la suivre et la découvre au bras d’un jeune homme sportif, devant un motel miséreux.

Alors qu’il est contacté par le fils d’une connaissance pour tenir un poste de direction dans une entreprise douteuse, probablement en lien avec la mafia, il se demande si Adèle n’a pas œuvré en douce pour qu’il obtienne cet emploi. Se pose pour lui la question de l’infidélité de sa femme, de l’utilité de continuer son activité professionnelle, et d’un problème de santé qui vient de se déclarer.

Il s’agit ici d’un roman introspectif, dont le personnage central est notre banquier, à l’aube d’une nouvelle vie. Et qui dit nouvelle vie, dit décision à prendre quant à la suite à donner à sa vie. Nous assistons donc aux questionnements de notre retraité confronté à des choix cornéliens difficiles à prendre.

Sachant qu’il ne pourra pas se séparer de sa femme, car il n’envisage pas de vivre seul, il est assailli de doutes qui lui posent plus de questions qu’ils ne lui apportent de réponses. Nous le suivons dans cette narration au rythme lent tout en éprouvant pour lui de l’affection et même de la pitié.

Comme la narration se fait du point de vue du retraité, donc nous ne connaitrons pas le nom, les questions qu’il se pose vont se multiplier sans que nous ayons toutes les réponses. Mais ce roman est une formidable démonstration sur la vieillesse, sur la confiance, la jalousie et la difficulté de prendre des décisions fortes. Et même si ce roman est court, on n’est pas prêt de l’oublier.

Une vérité changeante de Gianrico Carofiglio

Editeur : Slatkine & Cie

Traducteur : Elsa Damien

J’avais découvert Gianrico Carofiglio avec son personnage d’avocat Guido Guerrieri et j’avais adoré Les yeux fermés, un roman court qui se termine par un coup de poignard. Nous avons droit ici à un nouveau personnage, le Maréchal Pietro Feniglio et à un retour dans les années 90.

1989 à Bari. Cardinale Lorenzo, le célèbre braqueur de banque, est signalé à la Polyclinique où il est venu, accompagné son fils pour faire un scanner cérébral. Le Maréchal Pietro Feniglio se rend sur place et voit entrer la famille. Il préfère les rencontrer seul à seul, et laisse le temps à Lorenzo de connaitre le résultat de l’examen avant de l’emmener sans effusion de sang ni violence.

Le Maréchal Pietro Feniglio n’a pas le temps de se reposer. Le corps de Fraddosio Sabino est retrouvé égorgé dans son appartement. En arrivant sur place, il monte à l’appartement et sent un parfum. Puis il interroge Cassano Lattarulo, une voisine qui a vu un jeune homme s’enfuir, après avoir donné comme excuse qu’il s’était trompé d’adresse. Elle l’a vu jeter un sac en papier dans une benne à ordures, et a noté le numéro d’immatriculation de sa voiture.

Cette affaire semble rondement menée, presque trop facile tant il lui suffit de trouver le jeune homme que tout accuse. Dans la benne, les policiers trouvent bien un sac en papier et le couteau. L’identification de la voiture les conduit à un dénommé Michele Fornelli, propriétaire d’un magasin de vêtements de luxe. Mais il est trop âgé pour être la personne aperçue par la voisine. Peut-être s’agit-il de son fils ?

Bizarrerie de l’édition française, l’année dernière sortait L’été froid, la deuxième enquête du Maréchal Pietro Feniglio, et voici donc la première. J’ai donc attendu un an pour ne pas lire cette série à l’envers. Et je me suis retrouvé dans un roman très court, à l’intrigue très simple et aux personnages bien marqués, et bien marquants.

Car oui, le Maréchal occupe toute la place sur la scène, avec ses intuitions, sa curiosité acérée, l’utilisation de ses cinq sens, et son humanité. Bien qu’il promène sa mine que l’on imagine nonchalante, on le suit dans ses interrogatoires ciblés et ses quelques pensées qui sont surtout des questionnements. On ne voit apparaitre que rarement sa femme, par conte j’ai apprécié le clin d’œil avec l’apparition de Guido Guerrieri.

Malgré un scénario simple, ce roman qui se contente de nous présenter ce nouveau personnage récurrent comporte une intrigue terrible et un style rapide et bigrement efficace. On n’y trouve pas un mot de trop, Gianrico Carofiglio va à l’essentiel, même dans les dialogues remarquablement directs. Il ne me reste plus maintenant qu’à lire L’été froid, qu’on se le dise.

L’eau du lac n’est jamais douce de Giulia Caminito

Editeur : Gallmeister

Traductrice : Laura Brignon

Après Un jour viendra, le premier roman traduit de cette jeune auteure, on sentait une puissance de son écriture capable d’emporter tout le monde. GiuliaCaminito nous propose de suivre la vie d’une enfant devenant adulte, à travers ses réactions et les événements qu’elle va vivre.

Gaïa est née dans une famille pauvre. Sa mère Antonia fait des ménages et son père est handicapé suite à un accident de travail sur un chantier, où il travaillait au noir. Cloué sur son fauteuil roulant, il ressemble plutôt à une plante verte qu’on a abandonnée au salon. Son grand frère, né d’une précédente liaison, est laissé à part et tous les espoirs d’Antonia résident dans la réussite de Gaïa.

Toute la famille vit dans une cave et Antonia a demandé un appartement aux services sociaux. L’inertie de ceux-ci fait que le dossier n’avance pas. Mais Antonia ne se laisse jamais abattre, ne baisse jamais les bras et fait le siège des bureaux pour avoir le dernier mot. Il faudra l’arrivée d’un nouveau chef de service pour qu’ils aient l’autorisation de déménager dans un grand appartement situé juste à côté d’un lac.

Pour Gaïa, sa vie est à refaire. Elle va entrer à l’école et côtoyer des enfants tous plus riches qu’elle. Sa mère lui répète, lui serine qu’elle n’a pas d’autre choix que de travailler dur pour réussir à l’école. Alors elle se bat tous les jours avec les faibles moyens dont elle dispose, considérant ses camarades comme des ennemis, ou au moins des concurrents. Antonia, avec sa volonté de se battre pour ses enfants afin qu’ils obtiennent une meilleure vie, ne se rend pas compte de la pression qu’elle leur met au-dessus de leur tête.

La première partie du roman m’a réellement impressionné, par son style imagé et poétique, par le ton sec, par la psychologie de Gaïa la narratrice et par le sujet, l’éducation d’une enfant et son passage à l’âge adulte, avec les déboires que cela entraine et la pression que l’on reçoit de ses parents. Et j’ai plongé, j’ai aimé suivre Gaïa, son esprit de battante, sa volonté de ne rien lâcher, malgré sa rigueur, sa méchanceté.

Et comme l’immersion dans cette vie d’une famille pauvre italienne me parle, comme ce roman fait écho à mon propre passé, j’ai poursuivi Gaïa comme une sœur imaginaire, l’aidant dans les moments difficiles, subissant les moqueries des camarades et ne trouvant comme réplique que la méchanceté (dans son cas) ou l’autodérision (dans le mien), comme un rempart devant ce qui nous a manqué.

Quand on ne nait pas dans une famille aisée, on va le dire comme ça, il s’avère bien compliqué de ne pas éprouver de complexe d’infériorité devant des habits de marque, ou même de ne pas changer d’habits tous les jours. Il y a 40 ans, quand on était boursier, on n’avait pas le droit de redoubler en classe; je vous laisse imaginer la pression. Tous ces aspects là m’ont touché, forcément.

Comme nos choix de vie entre Gaïa et moi furent différents, sa fin de l’adolescence m’a moins touché, voire j’y ai trouvé des longueurs tout en reconnaissant la justesse des événements et des réactions. Et puis, n’oublions pas que c’est un roman dramatiquement, follement beau et qu’il faudra à Gaïa des morts parmi ses proches pour se rendre compte de ses erreurs. Un roman à part pour moi.

Ombres et poussières d’Antonio Manzini

Editeur : Denoël

Traducteur : Samuel Sfez

Quand on tient un personnage de la trempe de Rocco Schiavone, sous-préfet d’Aoste, on ne le lâche plus et on se jette sur ses dernières enquêtes dès qu’elles sortent en librairie. Dans ce nouveau tome, Rocco poursuit sa descente aux enfers.

Marco attend devant le 12 via Brean, et hésite à monter la prostituée qu’on lui a conseillée. Avec cinquante-deux ans au compteur, il a du mal à accepter l’abstinence imposée par Barbara sa femme. Enfin, il se décide et profite de la sortie d’un livreur pour entrer dans l’immeuble sans être obligé de sonner à l’interphone. C’est malin ! Le livreur pourrait reconnaitre son visage, la honte !

Quand Rocco se réveille ce matin-là, il n’est pas harcelé par la musique abrutissante de son jeune voisin Gabriele. Il le rencontre dans l’escalier, ce qui est étonnant à cette heure matinale, partir pour son examen de latin. Comme sa mère est absente, comme souvent, Gabriel demande à Rocco de le faire réviser. Il accepte mais cela se fera au commissariat, où l’attend une surprise de taille.

Quand il ouvre la porte de son bureau, tout le mobilier a disparu. Tout a été déménagé dans un placard pour laisser la place au cabinet provincial de la police scientifique. Avant d’aller pousser sa gueulante chez son chef, Rocco se rend compte que Gabriele ne connait pas son cours de latin. Le cas est désespéré. Soudain, on les appelle pour signaler la présence d’un corps découvert par un jogger. La victime serait un transsexuel. Les emmerdements Niveau 10 s’accumulent.

Depuis quelques tomes, Rocco Schiavone est confronté à des enquêtes complexes et embringué dans son passé qui ressurgit et l’oblige à en assumer ses conséquences. Les romans d’Antonio Manzini fonctionnent donc à deux niveaux sur deux lieux différents (Aoste et Rome) et permettent d’insuffler un rythme élevé aux romans. Il est inutile de vous préciser donc de lire cette série urgemment en commençant bien entendu par le premier.

Sans surprise, on retrouve Rocco obsédé par sa femme, qu’il entend encore dans ses songes (voire éveillé) mais qui se fait ici de plus en plus absente. Il va retrouver ses amis romains dans le cadre de la recherche de l’un des leurs et de la chasse de Baiocchi, le meurtrier d’une jeune fille … et je ne vous en dis pas plus pour l’intrigue récurrente qui devient de plus en plus dramatique et triste. Quant à l’enquête principale, elle est d’une complexité grandissante et confronte notre enquêteur aux services secrets qui s’octroient tous les droits.

Enfin, on est bigrement surpris par la réaction de Rocco face à son voisin, laissé à l’abandon en plein dans ses études. Gabriele se montre fainéant et ne veut pas changer pour autant. Rocco va le prendre sous son aile, lui octroyer du temps dans son agenda surchargé, comme son fils qu’il n’a jamais eu. Enfin, la fin est d’une tristesse infinie et cela m’inspire une réflexion à ce propos : quand on écrit une série avec un personnage récurrent, faut-il forcément le malmener, le maltraiter, le torturer et lui faire connaitre une descente aux enfers ? Celle de Rocco est loin d’être terminée, mais elle ressemble beaucoup à celle de Jack Taylor (en moins autodestructeur pour le moment).

L’île des âmes de Piergiorgio Pulixi

Editeur : Gallmeister

Traducteur : Anatole Pons-Reumaux

Je vous en avais parlé il y a quelque temps : les éditions Gallmeister, après avoir arpenté les routes étasuniennes, se tournent vers l’Italie d’abord, et probablement d’autres lieux dans le monde à venir. Ce roman s’annonce comme le début d’une série. Prenons donc la direction de la Sardaigne.

« Quand on arrive en fin de carrière, les affaires non résolues continuent de vous hanter jusqu’à votre mort ». Cette pensée lamine l’esprit de Moreno Barrali, inspecteur en chef proche de la retraite. Depuis que son docteur lui a annoncé qu’il ne lui restait que quelques mois à vivre, il rumine deux affaires qui pour lui furent intimement liées, les meurtres de deux jeunes femmes, orchestrés comme un sacrifice.

Les autorités de Cagliari ont décidé de créer un service « Cold case », principalement pour des raisons d’amélioration des statistiques de résolutions d’affaires. Mara Rais qui vient d’être déboutée dans le cas d’un harcèlement sexuel est décriée dans le département de police, malgré ses grandes qualités d’inspectrice. Le commissaire Farci, son chef lui propose de rejoindre ce nouveau service.

La mauvaise nouvelle concerne l’organisation du service. Mara devra faire équipe avec Eva Croce, qui vient de débarquer de Milan avec une réputation sulfureuse. Quand Mara rencontre Eva pour la première fois, elle se retrouve face à une jeune femme au look punk, très éloigné de ce qu’elle a l’habitude de voir. Barrali est heureux de partager les informations qu’il a collecté pendant plusieurs dizaines d’années, alors qu’une jeune fille vient de disparaitre.

L’auteur n’est pas connu chez nous, mais il n’en est pas à son coup d’essai. Ceci explique la grande maitrise dans l’intrigue, construite avec beaucoup d’application. Le roman commence par présenter dans le détail le contexte et les personnages, ce qui fait que l’enquête met un peu de temps à démarrer. Et l’auteur se permet d’introduire des notions de fantastique liées aux croyances de cette région de Sardaigne.

La lecture est grandement facilitée par une fluidité du style et par la volonté de l’auteur d’être explicite sur le contexte. Dans ce cadre, les paysages sont magnifiquement décrits, incluant des zones mystérieuses ; les pratiques ancestrales sont bien expliquées. On a vraiment l’impression d’être plongé dans la vie de ces petits villages, émerveillés dans ces paysages inconnus pour nous. On apprend beaucoup de choses sans forcément avoir l’impression de subir un cours universitaire.

Les deux personnages principaux, Eva et Mara, sont des femmes fortes, sans concession, pour lesquels j’ai craqué. Ayant des caractères forts, leur relation est plus que houleuse, et elles devront faire avec, pour faire avancer leur enquête. A ce titre, les dialogues, « rentre-dedans », francs, directs, à la limite de l’agressivité, sont remarquablement bien faits. Ces parties de ping-pong ajoutent à notre plaisir de lecture une touche de réalisme. Et l’évolution de leur relation est remarquablement construite.

L’air de rien, ce roman dépasse les 500 pages, et on ne s’ennuie jamais, même si certains passages ont tendance à être bavards. Surtout, ce roman fait naitre une attente quant à une future enquête, surtout avec une fin telle qu’elle est présentée, ouverte aussi bien sur ses conséquences que sur les relations entre Mara et Eva. Alors, dites-moi, quand est prévue la prochaine enquête ?

Un jour viendra de Giulia Caminito

Editeur Gallmeister

Traductrice : Laura Brignon

Les éditions Gallmeister quittent le continent américain pour publier des romans issus d’autres endroits du monde. Ils débutent cette nouvelle aventure par l’Italie avec deux romans, Un jour viendra de Giulia Caminito à classer plutôt en littérature et L’Île des âmes de Piergiorgio Pulixi dont nous parlerons bientôt.

Le roman commence par un prologue terrible et donne le ton pour le reste de cette histoire. Nicola est présenté comme un garçon fragile, cherchant à se faire oublier des autres, préférant rester dans les ombres plutôt que d’affronter la lumière du jour. Lupo est tout son contraire, fort, imposant ; par sa stature, il se considère comme responsable de son petit frère, si frêle, et s’est donné comme mission de le protéger. Sur les bords du Misa, Nicola fait face à Lupo, armé d’un fusil et lui tire dessus.

Il faut dire que la famille Ceresa traine une mauvaise réputation, comme si elle attirait le mauvais sort. Luigi est le boulanger du village, sa femme Violante est aveugle, et sa famille a vu plusieurs de ses enfants mourir. Leur vie est rude, et laisse peu de place à l’amour familial. Les troubles qui secouent l’Italie en ce début du vingtième siècle vont être exacerbés par l’arrivée de la première guerre mondiale.

Par chapitres alternés, l’auteure nous plonge dans la vie d’un couvent dirigé par Sœur Adélaïde qui vient de se suicider par pendaison. Par tirage au sort, Sœur Clara va être désignée pour prendre sa place et dévoiler aux autres sœurs son caractère dur, lié à ses origines. Ce monde de silence et de foi cache en réalité un terrible secret qui va toucher le village et la famille Ceresa.

Il est surprenant de lire que ce roman n’est que le deuxième de cette jeune auteure italienne, tant l’intrigue est complexe et maitrisée. Situé dans un pays que je connais peu, parlant d’une période trouble de l’histoire italienne, il vaut mieux lire les notes de l’auteur et de l’éditeur situées à la fin du roman. Cela permet de nous éclairer sur le contexte et les positions prises par tous les personnages.

Car Un jour viendra est un roman qui nécessite des efforts pour se resituer dans le temps et dans l’espace. Ne précisant jamais quand les chapitres si situent dans le temps, il est parfois difficile de se raccrocher à l’intrigue. La façon de mener cette histoire est aussi originale puisque les secrets se dévoilent au hasard des scènes, sans qu’il n’y ait de logique dans la construction. Les lecteurs cartésiens, comme moi, se retrouveront désarçonnés.

Reste que la plume de Giulia Caminito se révèle à la fois originale et magnifique. L’écriture se montre descriptive et poétique, noire quand il le faut, quand il s’agit de décrire un décor ou la nature environnante. Elle se met en retrait et devient factuelle quand elle montre les actions des personnages, ne donnant aucune information sur les émotions. Enfin, les dialogues sont insérés dans la narration sans indication, et peut surprendre.

Malgré la beauté du texte, la noirceur du contexte, mon impression est tout de même en dents de scie. J’ai été ébahi par certains passages et regretté que le roman se révèle si difficile à suivre, par manque de visibilité. Il aurait été intéressant d’indiquer quand les scènes se déroulent et donner un peu plus de détail sur le contexte historique. Le roman creuse tout de même beaucoup de thèmes, de la loyauté fraternelle à la destinée, la religion, l’anarchie, les décisions politiques et on en ressort avec l’impression que cette période du début du vingtième siècle a été déterminante pour l’histoire de l’Italie et que le peuple, qui avait les cartes de son avenir entre les mains, s’est trompé.