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Hôtel Carthagène de Simone Buchholz

Editeur : L’Atalante – Fusion

Traductrice : Claudine Layre

Chastity Riley, procureure à Hambourg, est un personnage formidable dont je lis toutes les enquêtes depuis sa première parution en France. A chaque fois, on a droit à une enquête coup de poing proposant des sujets sociaux cruciaux et surtout aux descriptions de la vie de cette femme libre de ses actes et en proie à des cicatrices intérieures. La liste des enquêtes de Chastity Riley figure en fin de billet.

Faller, jeune retraité, a décidé d’inviter tous ses collègues amis à son soixante cinquième anniversaire. Plutôt que d’organiser cette fête dans un petit bar, il a choisi le lounge luxueux situé au dernier étage de l’hôtel River Palace. Faller et Chastity se retrouvent donc avec ceux qu’ils considèrent comme leur famille, dont Klatsche et Inceman, les anciens ou actuels amants de la procureure. La soirée doit devenir l’occasion de boire, un peu, beaucoup, passionnément pour laisser de côté l’éventuelle gêne de se retrouver tous face à face dans un même lieu. Seul Ivo Stepanovic manque à l’appel, volontairement en retard. Alors que Chastity se coupe le doigt sur un piquant d’une feuille d’ananas de son piña-colada, douze hommes armés débarquent brusquement et prennent tout le monde en otage.

En parallèle, nous suivons l’histoire de Henning Garbarek. En 1984, Henning arpente les sombres rues du port de Hambourg, n’ayant même pas quelques deutsche marks pour se payer à boire. Il embarque à bord d’un cargo et arrive à Carthagène en Colombie. Il trouve du travail dans un bar et rencontre Esteban, un trafiquant de drogue qui vendre étendre son marché à l’Allemagne. Il charge Henning de trouver des gens fiables pouvant vendre sa cocaïne en Allemagne. En échange, Esteban lui confiera la gestion du bar. Alors que Henning met en contact Esteban avec trois de ses anciennes connaissances, il rencontre l’amour de sa vie en la personne de Mariacarmen, à qui il ne dira rien de ses troublantes relations avec le monde du trafic de drogue.

Simone Buchholz a dû se lancer un défi avant de commencer ce roman : écrire un huis-clos. Forcément, pour y voir participer toute la bande de policiers autour de Chastity Riley, cela devait se passer autour d’une célébration exceptionnelle. Et elle a dû choisir l’anniversaire de Faller, l’ancien chef et mentor de notre procureure. En fait, cela m’amuse d’imaginer la naissance d’un roman, ce qui a poussé l’auteure à écrire cette histoire.

Sauf que Simone Buchholz n’est pas une auteure comme les autres. Imaginer deux intrigues en parallèle qui se rejoignent à la fin, on connait. Mais quand on insère dans cette histoire une femme pas comme les autres, obligée de faire face à ses amants … cela devient une histoire introspective avec le côté cash de Chastity que l’on connait et que l’on adore. Rassurez-vous, ce roman, bien que dédié à Alan Rickman, ne ressemble en rien à Piège de Cristal.

Car cette prise d’otage va obliger Chastity à se voir telle qu’elle est, une femme forte certes, mais qui manipule les hommes pour son plaisir. Ce mal-être va s’accentuer avec sa blessure, sa fièvre qui va s’ensuivre, les effets de ses médicaments antidouleurs qu’elle va prendre et les quantités astronomiques d’alcool qu’elle va ingurgiter. Cela va nous permettre d’assister à des scènes délirantes poignantes.

En parallèle, Simone Buchholz narre l’histoire de Henning et on se retrouve avec un style plus classique, mais redoutablement descriptif et émouvant. Henning n’a rien demandé à personne et se retrouve dans un engrenage violent qui va détruire sa vie. Et l’auteure nous assène sa conclusion en une phrase, un véritable coup de feu en plein cœur. On retrouve là tout le talent de l’écriture de Simone Buchholz.

Avec un genre éculé de prise d’otage, avec un décor unique pour son huis-clos bien connu aussi dans le polar, Simone Buchholz arrive encore à innover, et à nous offrir un opus qui est très différent des précédents mais tout aussi fascinant et dramatique. Certes, je suis fan de Chastity Riley mais je deviens de plus en plus fan de Simone Buchholz. Vivement le prochain … l’année prochaine ?

Les enquêtes de Chastity Riley :

Les fils de Shifty de Chris Offutt

Editeur : Gallmeister

Traducteur : Anatole Pons-Reumaux

Après le formidable premier tome de cette trilogie, Les gens des collines, voici donc la suite qui est tout aussi passionnante.

Mick Hardin, membre du Criminal Investigation Division de l’armée, est toujours en permission dans sa ville natale de Rocksalt dans le Kentucky. Il se remet d’un attentat à l’explosif qui l’a blessé à la jambe. Sa sœur Linda le loge alors qu’elle doit préparer sa réélection au poste de shérif. Il reste une semaine à Hardin avant son retour et il continue à consommer des médicaments antidouleurs. Il doit aussi faire face à la demande de divorce de sa femme qui vient d’avoir un bébé avec un autre homme.

Un chauffeur de taxi découvre sur un parking de supermarché abandonné le cadavre d’un homme criblé de balles. Mick et Linda se rendent sur place et s’aperçoivent que le corps a été déplacé, vue la faible quantité de sang sur place. Linda identifie rapidement le mort, Barney « Fucking » Shifty, un dealer d’héroïne du coin. Pour la police, il s’agit sans aucun doute d’un règlement de comptes entre trafiquants, donc il est inutile d’enquêter.

Alors que Linda doit assurer sa campagne pour sa réélection au poste de shérif, visiter les gens, distribuer des tracts, planter des pancartes, elle demande à Mick d’aller annoncer la nouvelle de la mort de son fils à la veuve Shifty. Celle-ci propose à Mick de l’argent pour qu’il identifie les assassins, ce que Mick refuse. Par contre, il voit dans cette enquête la possibilité d’aider sa sœur et de s’occuper l’esprit pour éviter de prendre ses médicaments addictifs, tels que l’oxycodone. Bientôt, c’est Mason, le deuxième fils Shifty qui est abattu.

Autant vous rassurer tout de suite, il n’est pas nécessaire d’avoir lu le précédent roman de cette trilogie (Les gens des collines) avant d’attaquer celui-ci. Cela vous permettra juste de vous retrouver en terrain connu et de retrouver certains personnages, surtout ceux du bureau du shérif.

Car dans cette enquête, Chris Offutt nous présente d’autres personnages (dits secondaires) comme si on les connaissait depuis toujours. Il possède ce talent de nous immerger dans la vie d’une petite ville où tout le monde se connait, au milieu d’un paysage magnifique et va nous décrire tous les trafics qui s’y déroulent. On a toujours, au détour d’une scène, une phrase magique pour faire le parallèle entre la beauté de la nature (faune ou flore) et la laideur des hommes occupés à gagner leur argent salement.

Par contre, on ressent beaucoup de tendresse envers les habitants honnêtes de cette contrée. Je prendrai comme exemple Jacky Merle, l’inventeur fou qui s’enferme dans son garage pour sortir des innovations qui faciliteront la vie de tout un chacun. Chris Offutt nous parle aussi du rôle de proximité du shérif, sa présence nécessaire pour rassurer les habitants ou même les petits problèmes auxquels Linda doit faire face comme cette fois où elle doit récupérer un chien qui a sauté d’un balcon.

Outre l’intrigue menée de façon remarquablement maitrisée, Chris Offutt met en valeur les zones rurales des Etats-Unis où l’ambiance est plutôt calme, où l’économie est en berne, où les gens survivent dans la précarité et où, sous la surface, apparaissent toutes sortes de trafics (drogues ou autres) en parallèle de ceux légaux (les médicaments addictifs). On y voit aussi des gens du cru, habitués à une vie dure, taiseux, parlant d’un hochement de tête qui remplacent des phrases inutiles.

Jamais misérabiliste ni défaitiste, Chris Offutt reste toujours factuel et nous dépeint une Amérique à deux vitesses, loin de celle des riches des villes. On y sent une fracture évidente en se concentrant sur ceux qui n’ont rien et qui se débrouillent pour survivre, tout en montrant combien la nature peut être si belle devant les saloperies dont sont capables les hommes. On gardera longtemps en mémoire ce voyage dans les paysages magnifiques du Kentucky, avec l’impression d’avoir côtoyé ses habitants, un sacré coup de force.

La sagesse de l’idiot de Marto Pariente

Editeur : Gallimard – Série Noire

Traducteur : Sébastien Rutés

Outre d’être une découverte, ce premier roman (sauf erreur de ma part) est une excellente surprise aussi bien dans sa forme que dans son fond, le genre de polar attachant dont l’on ressort pleinement satisfait, voire plus. Formidable !

Toni Trinidad, c’est pas le genre très malin. Orphelin très jeune, il s’est donné pour mission de protéger sa sœur Vega … et inversement. Heureusement, ils sont tombés dans une famille d’adoption qui leur a permis après un passage traumatisant dans l’orphelinat. Leur père adoptif a négocié avec le maire un poste de policier municipal pour Toni et Vega a obtenu la gestion d’une casse automobile à Ascuasà la suite de la disparition de son mari violent Chimo.

Toni a l’habitude d’aller prendre son café chez son ami Triste, et de commencer sa journée ensuite, avec une visite chez sa sœur. Mais ce matin-là, on lui apprend que Triste s’est pendu à la branche d’un de ses arbres. Quand il arrive, il observe trois traces de pneus de voiture, une de trop. Mais qui est-il, lui, pour donner des leçons à la police judiciaire alors qu’on le connait comme l’idiot du village.

Vega a un problème avec l’alcool, et un ras-le-bol de sa vie, coincée dans ce village. Comme elle utilise sa casse comme plateforme pour le trafic de drogue de l’Apiculteur, une idée émerge de garder une livraison pour elle. Elle vient justement d’apprendre qu’une voiture pleine d’argent allait transiter chez elle. Mais les hommes de Rocha, de la brigade des stupéfiants, guettent devant sa porte, sans qu’elle le sache. 

A priori, des intrigues mettant en scène un village où les habitants représentent une frange de la population se retrouvent plutôt et aisément chez les auteurs anglo-saxons. Et il est toujours surprenant de trouver des auteurs se lançant dans cette aventure sachant qu’ils se comparent aux maîtres du genre, Jim Thompson en tête. Pourtant, on retrouve dans ce roman une véritable originalité voire une liberté dans le traitement, une certaine folie déjantée et un humour grinçant à souhait typique de la littérature espagnole (dont je ne suis pas un spécialiste, je préfère le préciser).

L’idée de génie est de positionner en plein milieu de ce marasme explosif un « idiot du village » ou du moins veut-il se faire passer pour tel, tout en autodérision, en se dévalorisant à tout moment. D’ailleurs, il précise qu’il réalise une action pour faire avancer son enquête dans le but de bien se faire voir par les gens. On va voir Toni se prendre des coups voire plus jusqu’à ce qu’une étincelle fasse resurgir l’homme qui est en lui.

En termes de liberté d’écriture, Marto Pariente s’autorise tout, donnant voix à chacun des personnages comme les meilleurs romans choraux, mais variant de l’un à l’autre dans la syntaxe, la narration pour Toni, le tutoiement pour Vega, et la troisième personne pour les autres. Cela lui permet d’évoquer la vie de famille, la difficulté de vivre de son travail, la corruption, le pouvoir des politiques, la soif inassouvie d’argent des promoteurs immobiliers, la complicité des banques, la course à la promotion professionnelle …

De toutes ces intrigues mêlées avec brio, Marto Pariente nous présente une situation explosive n’attendant qu’une étincelle pour tout se transforme en catastrophe et cela ne manque pas de survenir. Et malgré l’amoralité affichée et les attitudes minables de tout un chacun, on se retrouve avec une lecture fortement addictive pleine de célérité grâce à ses chapitres ultra-courts. L’auteur se permet même de nous surprendre jusqu’à la dernière ligne, avec un événement totalement inattendu, signe d’un grand, ou futur grand du polar. A découvrir d’urgence.

Un grand merci à Coco mon dealer de livres pour ce prêt. Il a comparé ce roman à un film des frères Coen totalement déjanté.

La valse des McKinley de Richard Canal

Editeur : Editions du Caïman

Je ne connaissais pas Richard Canal avant de lire ce roman, fortement conseillé par son éditeur et son boss Jean-Louis Nogaro. Effectivement, c’est une sacrée histoire que l’auteur nous propose, deux jours en enfer.

Il pleut sans discontinuer sur la ville d’Ulysses aux Etats-Unis ; les journées ressemblent à des nuits et les rues sont inondées. Ce temps pourri ne donne pas envie d’aller au travail. Cela tombe bien, les usines ont fermé depuis un bout de temps et les gens, pour la majorité, pauvres, vivent de trafics plus ou moins gros.

Dans ce paysage de fin du monde, Wallace Ackerman le shérif et son adjoint Phil Sanders arpentent les rues désertées au volant de leur voiture de fonction. Ils aperçoivent bientôt une voiture qui s’est échouée dans le fossé aux abords de la ville. Quand ils s’en approchent, ils découvrent un homme gravement blessé et une pelle ensanglantée. Wallace est sûr qu’il s’agit encore d’un coup de Kurt.

Kurt Gosling justement a rendez-vous avec Ricardo Ramirez. Depuis qu’il a perdu une cargaison de drogue pour les mexicains, il doit en échange jouer au recouvreur de dettes, pour le compte de Martin Flores, un chef de gang.

Leo Spiletti est à l’affut avec les deux molosses de Don Matteo, Lil et Sal. Ils attendent le passage d’une voiture qui ne vient pas. Il n’y a pas dix mille routes pour sortir d’Ulysses, ils vont suivre leur chemin. Ils s‘aperçoivent que la police est garée sur le bas-côté. Les affaires de Leo ne s’améliorent pas, ce qu’il cherche est probablement dans la voiture, qui va être emmenée par un garagiste, et son conducteur conduit à l’hôpital.

Alice Newbury regarde la pluie tomber par la fenêtre de sa chambre, comme si cela pouvait laver les péchés de sa vie. Elle vient de quitter l’université et supporte mal la mort de Norman son frère. Elle est arrivée sans bagage la veille au soir, les cheveux en bataille et n’a rien dit à ses parents. Depuis, la pluie ne cesse d’inonder les rues comme un mauvais présage.

Richard Canal nous convie à un voyage aux Etats-Unis dans une petite ville sidérurgique minée par le chômage où chacun vit et survit de ses petits trafics. On ressent bien à travers la petite dizaine de personnages que l’on n’aime pas les étrangers au cas où ils voudraient mettre le nez dans les affaires de la ville. Au programme, prostitution, trafic de drogue, corruption, chantages et meurtres.

Le fait de s’appuyer sur quatre personnages principaux permet, en passant de l’un à l’autre de faire avancer l’intrigue qui, petit à petit, va se concentrer sur la recherche d’un « trésor ». et parfois, certains des participants courent sans savoir après quoi ils courent. Les événements vont devenir des rebondissements et les détenteurs de pouvoir (chef de gang, banquier, maire, shérif) vont côtoyer les bas du front qui de toute façon font ce qu’on leur dit de faire. Ce roman possède la force de faire vivre une petite ville peuplée de personnages secondaires qui ne le sont pas.

La lecture de ce roman se révèle très agréable, très facile, pour peu que l’on avale les quatre ou cinq premiers chapitres qui nous présentent les protagonistes. Après, cela devient du pur plaisir (sadique parfois, cyniquement drôle aussi). Bien que l’action soit située aux Etats-Unis, l’auteur aurait bien pu situer le roman en France ou n’importe où ailleurs, pourvu qu’il y pleuve beaucoup. Et j’ai pris autant de plaisir que quand j’avais lu les romans d’Alexis Aubenque, pour vous situer le niveau de jouissance littéraire.

Les affreux de Jedidiah Ayres

Editeur : Les Arènes – Equinox

Traducteur : Antoine Chainas

Je ne vous cache pas que le titre m’a tout de suite interpelé et que les conseils de Bruno le Mulot et de Clete ont fait beaucoup dans le choix de cette lecture. Ce roman propose une belle (ce n’est peut-être pas le bon terme) description des campagnes américaines. Direction le Missouri !

Terry Hickerson traine toujours avec Cal Dotson. Leur discussion du jour porte sur le Spring Break où de jeunes filles décompressent de leurs études et jouent les délurées. Ils prennent la direction de Joplin et finissent dans une boite de nuit, aveuglés par les stroboscopes. Alors que Cal va faire son truc avec une fille, Terry aborde une jeune fille trop belle pour le coin, qui se balade avec un 9 mm.

Chowder tient un magasin d’appâts pour la pêche. Ça, c’est pour la galerie. Il possède aussi un bordel miteux, appelé le Chéri-Chéri, situé à quinze kilomètres. Accessoirement, il trafique toutes sortes de drogues et héberge une salle de jeux clandestins. Ce matin-là, il reçoit deux hommes venus lui proposer un marché de la part de la mafia de Memphis.

Le shérif Mondale a reçu un tuyau de Chowder, l’adresse du laboratoire clandestin d’Earl Sutter. Même si Mondale sait que la méthamphétamine ne sert qu’à sa consommation personnelle, cela peut éviter à Chowder une concurrence déloyale et permettre d’inscrire un fait d’armes sur le CV du shérif. Après l’arrestation, son ex-femme Shirley lui annonce que leur fille cadette Eileen a encore fugué.

Le procureur adjoint Dennis Jordan a assez perdu de temps. Il bâtit son rêve, sénateur, puis gouverneur puis procureur général. Pour cela, il a besoin d’un coup d’éclat : faire tomber le shérif Jimmy Mondale.

Les auteurs américains sont décidément trop forts quand il s’agit de créer une intrigue située dans un village perdu en pleine campagne. On a lu beaucoup de romans noirs ruraux, comportant des trafiquants de tous genres, des paumés, un shérif corrompu. La vie s’écoule tranquillement jusqu’à ce que soit lâché un chien dans le jeu de quilles qui va créer la zizanie.

On va suivre ces quatre personnages dans leur quotidien, avec des personnalités bien marquées, Terry dans le rôle du perdant, Chowder dans le rôle de « l’entrepreneur » et Mondale dans celui du flic pourri. Jedidiah Ayres va les imbriquer dans un scénario d’une drôlerie irrésistible (la façon dont Terry et Cal vont trouver une bonne façon de se faire du fric vaut le détour) avec toujours des phrases qui font mouche et des dialogues fantastiques. Jusqu’à une conclusion inoubliable.

On lit trop rarement des auteurs qui sont capables d’une telle créativité dans leur intrigue, et qui nous proposent un style direct et efficace comme Jedidiah Ayres. Par ses qualités d’auteur, on trouve une filiation avec Jake Hinkson et même le Grand Jim Thompson. Et ce roman-là est une vraie pépite noire. C’est crade, c’est sale, c’est brutal et j’adore ça. Il ne me reste qu’à dénicher son précédent roman !

Le bon camp d’Eric Guillon

Editeur : La Manufacture de livres (Grand Format) ; Nouveau Monde – Sang Froid (Format Poche)

Pioché au hasard dans ma PAL qui déborde, je me rends compte qu’il va falloir que je lise plus de romans de cette nouvelle collection des éditions Nouveau Monde qui s’appelle Sang Froid. Car ce roman m’a passionné de bout en bout, un sacré roman qui comporte tous les ingrédients qui me plaisent.

Dans sa geôle algérienne, en 1961, Jo sait que, celle fois-ci, il ne va pas s’en sortir. Même sous la torture, il ne parlera pas. Alors, pour supporter la douleur, il se rappelle Lily, l’amour de sa vie, qui l’appelait Loulou. Et tous les noms qu’il a pu porter au cours de ces trente années, Joseph Mat, Marcel Gonthier, Maurice Charpin, ou Joseph Chapuis. Peu importe ! Sa vie aura été mouvementée !

Il se rappelle 1936, quand il a pris le train de Sostès pour Barcelone, pour combattre les franquistes. Orphelin très jeune quand il a perdu son père pendant la guerre de 14-18, il a dû travailler tôt et est devenu typographe. Il a sa carte du parti communiste et s’est engagé naturellement dans la guerre d’Espagne, pour lutter contre le fascisme. Là-bas, il y perdra deux doigts sur une mine.

De retour en France, il reprit son travail et la déclaration de la guerre lui permit de fabriquer des faux papiers, de fausses cartes d’alimentation. L’accord de non-agression entre Hitler et Staline lui fit prendre ses distances avec le parti communiste, plutôt violemment puisque sa tête fut mise à prix. A partir de ce moment-là, il commença son périple de Toulouse à Marseille en passant par Lyon et Paris, en grande partie grâce à Robert Blémant.

Grenouillant parmi les adeptes du marché noir, il se retrouva pris à partie dans les règlements de comptes, entre collaborateurs et résistants, entre communistes et fascistes. Alors que les morts tombèrent autour de lui, il rencontra de nombreuses femmes parmi lesquelles Françoise et surtout Lily, l’amour de sa vie, une vie pleine de périls et de péripéties.

A la manière des grands auteurs français André Héléna à Albert Simonin, Eric Guillon créé un personnage de communiste résistant, prêt à tout pour sauver sa vie, rentre-dedans, assassin à ses heures et regrettant d’être entouré de tant de morts, amoureux des belles femmes mais ne montrant jamais ses sentiments. Bref, Joseph Mat est un beau personnage complexe comme je les aime, pétri de contradictions.

Eric Guillon choisit de placer Joseph Mat en tant que narrateur, chose difficile a priori mais formidablement réussie ici tant on a l’impression de l’écouter nous raconter sa vie. En utilisant un langage parlé, mâtiné de quelques mots d’argot parfaitement compréhensibles, on se retrouve prêt à le suivre n’importe où, tant l’enchainement, ses allers-retours dans le passé se font aisément comme si un lieu, un objet lui rappelait soudain l’anecdote suivante ou une rencontre fortuite.

Fort intelligemment, il utilise ces rencontres pour introduire des personnages célèbres, rendant ainsi son intrigue plus réaliste. On verra donc passer la bande à Bonnot, Pierrot le fou, Abel Danos, Ange Salicetti, le docteur Petiot et surtout le commissaire Robert Blémant. Avec pléthore de détails, de descriptions de lieux, d’ambiances des bas-fonds pendant l’occupation, ce roman est un extraordinaire voyage pour les yeux et les oreilles.

Eric Guillon arrive à lier tout cela grâce à la gouaille de sa langue, grâce à sa capacité à nous faire croire à son personnage et aussi à ne pas utiliser une intrigue linéaire, temporellement parlant. On a l’impression de suivre les mémoires d’un bourlingueur, qui nous montre les liens entre la pègre, les vrais-faux résistants et les vrais-faux collaborateurs. Et quand on a vécu dans l’illégalité, il est difficile d’en sortir.

Ce roman balaie la période 1936 à 1947. Il laisse entendre un passage de Joseph Mat à Saigon, et passe sous silence ce qu’il a pu réaliser dans les années 50 ou pourquoi il se trouve réellement dans les geôles algériennes. Je me dis qu’il y a la place pour une suite qui nous évoquerait les années 50. J’espère sincèrement avoir le droit à un deuxième roman tant celui-ci m’a bluffé. De même, ne vous étonnez pas de voir dans les semaines à venir d’autres romans de cette collection Sang Froid qui en dit tant sur notre passé récent. Exemplaire, Génial !

Heroïna de Marc Fernandez

Editeur : Harper & Collins

Depuis l’abandon des enquêtes de Diego Martin, on attendait la direction qu’allait prendre Marc Fernandez par la suite. Nous prenons donc la direction d’Acapulco, la célèbre station balnéaire mexicaine, minée par les guerres entre cartels de drogue.

Luis Mariano nous enchantait avec Acapulco :

« Sous le soleil couchant

C’est un ravissement

C’est l’heure des amants

Les fleurs ont des couleurs

Les femmes une fraîcheur

Qu’elles n’ont pas ailleurs »

Le paysage d’Acapulco dépeint par Marc Fernandez n’a plus rien à voir avec celui de Luis Mariano. Aujourd’hui, la station de rêve connait des règlements de compte entre les différents gangs de trafic de drogue. Dans sa monumentale trilogie, Don Winslow nous expliquait comment les cartels s’étaient développés et avaient mis à feu et à sang le Mexique. Et Acapulco n’est plus une exception de nos jours. Des bandes armées peuvent débarquer et tirer dans la foule, faisant des dizaines de victimes. Les plages paradisiaques se retrouvent de plus en plus envahies de drogués à la recherche d’argent pour se payer leur dose.

Olivia a remporté le titre de Miss Acapulco quand ses amis l’avaient inscrite à son insu, quinze ans auparavant. Cela lui a permis d’entrer dans le domaine fermé du mannequinat. Elle rencontre alors Roberto Aguilàr, propriétaire d’une entreprise de BTP et l’épouse. Un enfant va naitre de cette union, Pablo, qui s’apprête à entrer au lycée dans quelques mois.

Olivia est consciente que son mari a élargi petit à petit son entreprise au trafic de drogue, et elle en a bien profité. Roberto est devenu El Bobby, à la tête d’un des cartels les plus impitoyables d’Acapulco. Sa connaissance des mécanismes financiers lui a permis de blanchir son argent sale dans des investissements, en particulier des commerces et des prises de participation dans des entreprises légales.

Pour Olivia, son fils représente tout ce qui compte pour elle dans ce monde. Quand elle surprend son mari en train d’apprendre à couper les doses de cocaïne à son fils, les peser et préparer les petits sachets en plastique, elle sait que cela doit changer mais elle ne sait pas comment. Sa rencontre avec le juge Martin Calderon, ami d’enfance et procureur en charge de la lutte anti-drogue.

Changement d’éditeur, changement de personnage et changement de style pour Marc Fernandez qui continue à nous parler du continent sud-américain. Le défi est de taille, surtout quand on parle du Mexique et que l’on vient après Don Winslow, le maître du genre (Lisez La Griffe du Chien, bon sang !). Dans ce roman d’environ 200 pages, l’auteur place au premier plan la femme d’un chef de cartel de nos jours.

Ceci permet de s’écarter de ses prédécesseurs et de nous proposer une intrigue simple, rapide et efficace. Le roman raconte l’angoisse d’une mère, de sa prise de conscience et de sa recherche d’une solution pour sauver son fils à tout prix. On trouve peu de dialogue, et une psychologie d’Olivia intéressante, ainsi qu’une peinture de la situation actuelle de la région d’Acapulco en évitant les scènes sanguinolentes. Un bon polar, un bon cru et un excellent divertissement.

Free Queens de Marin Ledun

Editeur : Gallimard – Série Noire

Après avoir disséqué l’industrie du tabac dans l’excellent Leur âme au diable, Marin Ledun s’attaque à celle de la fabrication et de la vente de la bière, en se basant sur le scandale Heineken au Nigéria.

Jasmine Dooyun se fait arrêter à la Porte de Pantin à Paris pour prostitution. Etant mineure, elle risque de se faire expulser dans son pays, le Nigeria. Serena Monnier, journaliste au Monde, parvient à obtenir un entretien avec elle et apprend comment on lui a vendu du rêve, avant de la violenter pour qu’elle fasse le trottoir. Mais Jasmine veut continuer à se battre. Serena décide de poursuivre son enquête au Nigeria et est accueillie par une association féministe, les Free Queens.

Oni Goje occupe un poste de policier chargé de la circulation. Bien qu’il accepte des pots de vin, comme la plupart de ses collègues, il garde en lui une volonté d’intégrité et de justice. Il s’approche d’un attroupement géré par un cordon de policiers. En s’approchant, il découvre le corps de deux jeunes femmes assassinées que l’on a dévêtues. Il est persuadé que la police criminelle ne va rien faire et considérer que ce ne sont que des prostituées. Il décide de mener l’enquête.

Master Brewers, la multinationale qui fabrique de la bière, vient de mettre sur le marché la First. Pour son développement, elle a embauché Peter Dirksen qui va rapidement mettre en place un plan marketing. Les bières devront être présentées par des jeunes femmes peu vêtues, que ce soit dans les bars miteux ou luxueux. La stratégie est claire, « le sexe, le fric et une First » et le slogan devra faire mouche auprès de la population : la First permet d’augmenter les performances sexuelles. Peter Dirksen va donc construire un vaste réseau de prostitution en même temps qu’une campagne de corruption à tous niveaux.

Dans quasiment tous ses livres, Marin Ledun donne à ses œuvres une tonalité sociale qui ne peut qu’attirer l’œil. Son précédent roman sur l’industrie du tabac d’ailleurs a eu un fort écho et celui-ci devrait en avoir tout autant. Il revient sur un scandale qui a éclaboussé Heineken à tel point qu’ils ont dû justifier leur rôle dans le massacre des Tutsis au Rwanda, fait dont l’auteur ne parle pas ici.

Il préfère se concentrer sur le Nigéria et la façon dont les dirigeants hollandais ont décidé de déployer leur commerce en laissant les mains libres à un homme qui a vite compris que la loi et la morale devait être mise de coté. Bien que je n’aie pas été au courant de cette affaire en lisant le livre, les articles que j’ai lus depuis m’ont effaré. Car Peter Dirksen a vite choisi son camp pour remplir ses objectifs.

Marin Ledun choisit plusieurs points de vue, plusieurs personnages et le paysage qui en ressort fait froid dans le dos. Il faut se rappeler que tout se passe de nos jours, que l’on permet par l’intermédiaire de pots-de-vin d’exercer des commerces de prostitution pour améliorer les ventes de bière. Marin Ledun démontre très bien l’implication de la police, et on pouvait s’y attendre, mais aussi les hommes politiques jusqu’au plus haut niveau de l’état en passant par de grandes entreprises continentales comme Total mais aussi le PSG.

Contrairement à Leur âme au diable, Marin Ledun préfère dérouler un aspect narratif proche du polar, avec comme fil rouge la résolution du meurtre des deux jeunes filles, et s’attarde moins sur les aspects marketing. Et c’est probablement parce que cette affaire nous touche de moins près que le tabac et les cigarettes que des millions de personnes fument tous les jours.

Il n’empêche que devant toutes les horreurs décrites, ce que l’on pourrait trouver « normal, parce que ça se passe en Afrique » nous touche en plein cœur quand on a ne serait-ce qu’une once d’humanité dans le sang. Les combats des ONG pour le respect des droits des femmes ressemblent à la lutte du pot de terre contre le pot de fer. Alors, que faire ? En parler, c’est ce que fait de grande façon cet excellent polar riche et documenté.

Shit ! de Jacky Schwartzmann

Editeur : Seuil – Cadre Noir

Chaque roman de Jacky Schwartzmann est un pur plaisir de jouissance, par sa faculté à regarder un pan de notre société par le petit bout de la lorgnette, et toujours avec un humour légèrement cynique. J’adore !

Thibault Morel occupe un poste de CPE dans le collège du quartier de Planoise, dans la banlieue de Besançon. Il loge dans une cité et sa cage d’escalier sert de four au trafic de drogue au clan albanais Mehmeti. Cela ne le gêne pas plus que ça, si ce n’est qu’il doit montrer à Reda une quittance de loyer de moins de trois mois pour rentrer chez luitous les soirs. Et dès qu’il dit un mot, il a droit à une baffe sur l’oreille.

Une nuit, il entend un échange de coups de feu digne des meilleurs westerns. Le lendemain, il apprend que les frères Mehmeti se sont fait rectifier. Poussé par sa curiosité naturelle, il coupe les scellés sur l’appartement d’en face et découvre la réserve de pains de shit cachés derrière la baignoire montée sur vérins, ainsi que des jolis paquets de fric.

Sa voisine Madame Ramla le surprend en pleine visite et ils empruntent quelques liasses de billets. Thibault pourra aider quelques familles à payer un voyage scolaire en Espagne. Mais les deux compères savent bien qu’ils ne peuvent laisser cette fortune dormir sinon un autre clan va venir s’installer. A l’aide d’une connaissance de Madame Ramla, ils vont réembaucher Reda et remettre en route le four, ce qui leur permettra d’aider des familles dans le besoin ; une sorte de deuxième activité à hauts risques.

Comme à son habitude, Jacky Schwartzmann nous décrit des gens dont on n’entend jamais parler, et il déploie tout son talent pour rendre son intrigue bigrement réaliste et transformer un simple CPE en Robin des bois moderne. Il fait montre de son habituel humour cynique qui nous tire au minimum un sourire, et souvent des éclats de rire, dans une situation qui, il faut bien le dire, s’avère dramatique, quand on prend un peu de recul.

Basé sur un début d’intrigue proche de La Daronne de Hannelore Cayre, Jacky Schwartzmann va nous concocter une intrigue bigrement réaliste et farfelue dont le but est bien de montrer comment les gens vivent. Et avec son regard lucide, il ne se gêne pas pour envoyer des piques à tous les corps de métier et tout le monde en prend pour son grade, de l’éducation nationale aux révoltés, en passant par la police ou les racistes de tous poils… et j’en passe.

Et cela aboutit à une lecture jouissive, car il nous montre des facettes et des gens qu’on n’a pas l’habitude de côtoyer ou qu’on n’a pas envie de voir. Evidemment, le roman est amoral et cela reste un roman noir, mais pas uniquement. Il y a derrière cette intrigue tout un aspect social et politique que tout le monde devrait lire car, avec son humour, il pose des questions, et se poser des questions, c’est devenir plus intelligent. Remarquable ! Le pied intégral !

D’ailleurs, ce roman me fait penser à une réflexion de haut vol signée par les Shadocks : « A tout problème, il y a une solution. S’il n’y a pas de solution, c’est qu’il n’y a pas de problème. ». Encore faut-il vouloir trouver une solution …

Shit ! c’est le pied !

Rétiaire (s) de DOA

Editeur : Gallimard – Série Noire

Sorti en tout début d’année, ce roman que j’attendais avec grande impatience a enfin vu le jour. Initialement prévu pour être une série télévisée (pour France Télévisions pour ne pas les nommer), il en reprend les personnages et la trame mais il s’agit bien d’un roman, en forme de déflagration, tant ça décoiffe !

Alors que sa femme et sa fille ont été tuées par des trafiquants de drogue, Théo Lasbleiz de la brigade des stupéfiants se rend armé au sous-sol du 36 du rue du Bastion. Il se précipite sur Nourredine Hadjaj, l’interpelle, dégaine son arme et lui tire une balle dans la tête. Amélie Vasseur, bras droit de Théo n’a pas récupéré sa place, mais elle va leur montrer ce qu’une femme peut faire.

Lors de son élection à la tête de la Bolivie, Juan Evo Morales Ayma a supprimé le titre de république avant de faciliter la production et le commerce de la coca dont il est un cultivateur. Augmentant les surfaces cultivables, il autorise aussi le Pérou à transiter sa marchandise par son pays. La communauté croate a vite profité de cette plateforme et Ibro Kuzmic, petit fils des premiers immigrants veut élargir son panel de clients en Europe via l’Argentine, en envoyant fin 2020 plusieurs tonnes de cocaïne.

Léonard Serdachuk a commencé à franciser son nom quand il a immigré d’Ukraine, avant de monter une affaire de ferrailleur. Momo son petit fils a hérité du courage et de l’intelligence de son grand-père et développé son empire dans des domaines moins légaux, en particulier de shit. Pour avoir été surpris en revenant de la Costa Del Sol alors qu’il avait interdiction de quitter le territoire, il s’est fait arrêter. Il se retrouve voisin de Théo.

Ce maigre résumé peut paraitre bien pauvre par rapport à tout ce que nous raconte DOA dans les cinquante premières pages de son roman. Dès le départ, on se retrouve dans une histoire complexe avec de nombreux personnages, divers itinéraires et tout l’historique des différentes parties qui vont prendre part à ces intrigues.

Contrairement à beaucoup de ses confrères, DOA commence son roman comme un feu d’artifice, nous détaillant le contexte comme on le ferait d’un reportage. Il n’est pas étonnant d’ailleurs de lire en fin de roman la genèse de ce livre, d’abord conçu comme une série pour finir par 420 pages jubilatoires. Jamais je n’aurais lu un roman aussi proche de la réalité, avec une volonté de dire les choses comme elles sont, aussi proche qu’un The Wire.

Jamais DOA ne se montre pédant, il applique son style, parfaitement clair et descriptif, passant à des phrases hachées pour mieux rendre l’ambiance, le stress ; jamais démonstratif quand il aborde la psychologie des personnages. La lecture en devient passionnante mais surtout jouissive avec des scènes extraordinaires, impressionnantes, inoubliables.

Contrairement à ce que l’on pourrait penser, il ne s’agit pas de course-poursuite, ni d’un jeu d’échecs, mais plutôt d’un jeu de cache-cache où chacun avance ses pions sans se montrer vis-à-vis des autres. La construction basée sur des spirales entrelacées et la force des personnages féminins apportent un intérêt supplémentaire, surtout quand il détaille sans vraiment les dévoiler les stratégies pour la conquête du pouvoir et de l’argent.

C’est grand, c’est fort, c’est violent, et c’est inlâchable. De la trajectoire (inattendue pour certains, il faut bien le dire) des protagonistes, DOA nous montre aussi le gigantisme de la pieuvre, de ces organisations du trafic de drogue qui sont tellement implantées partout et à tous niveaux qu’elles sont impossibles à combattre. Avec Rétiaire (s) (et quel titre !), DOA nous offre ici un des meilleurs livres de 2023 ; et l’année ne fait que commencer !