L’année 2018 promet d’être une grande année. Je le sais quand en quatre mois, je compte déjà trois coups de cœur. Et quand en un seul mois, je suis emporté par deux coups de cœur, cela me remplit de joie. Une sorte de joie enfantine, une joie de gamin d’avoir lu des livres qui laisseront une empreinte en moi.
De joie de gamins, il est question dans L’homme craie de CJ.Tudor (Pygmalion), un premier roman d’une maîtrise exceptionnelle. S’il fait penser aussi bien à Stephen King qu’à Thomas H.Cook, l’auteure a su s’approprier ses grands prédécesseurs pour créer son univers et son style, et nous offrir une histoire fantastique faite de secrets et de d’émancipation d’un groupe d’adolescents. Coup de cœur obligatoire.
Le deuxième coup de cœur de ce mois n’a rien à voir. Power de Mickael Mention (Stéphane Marsan) retrace la naissance, la grandeur et la décadence du Black Panther Party à travers trois personnages. L’auteur a su s’approprier cette histoire américaine pour creuser ses thèmes de prédilection : l’humanisme. Il n’y a ni bons, ni méchants, juste des gens qui veulent vivre dans une société violente voire inhumaine.
Dans un autre genre, mais dont je suis fan, je vous propose de la lecture jeunesse avec les enquêtes de nos petits détectives Léo et Maya. Les tomes 5, et 6 (PKJ) nommés Le mystère des lingots d’or et Le mystère du salon de thé sont un régal pour les grands comme pour les petits, avec une résolution de l’énigme à chaque fois différente.
Fabrice Pichon n’est pas un auteur connu, pas assez à mon gout, en tous cas. Alors qu’il nous avait habitué à des enquêtes policières fort bien construites et des personnages féminins forts, le voilà dans un style plus noir, avec un suspense à multiples rebondissements dans Protocoles fatals de Fabrice Pichon (Lajouanie). Un roman que ne renieraient pas Boileau et Narcejac. Une lecture jouissive.
Dans ses deux premiers romans, on sentait un talent d’écrivain de comique de situation. Avec Bleu, saignant ou à point ? De James Holin (Ravet-Anceau), l’auteur se lâche avec des situations irrésistibles dignes de Donald Westlake, tout en dénonçant les abattoirs industriels qui nous font avaler n’importe quoi. Indéniablement, c’est un roman à ne pas rater et un auteur à découvrir.
Je ne vous ferai pas l’affront de parler de Fred Vargas. Mais saviez-vous que son auteur favori était américain ? Meurtre à Greenwich Village de Kinky Friedman (Rivages) est le premier roman de la série d’enquêtes de Kinky et on y retrouve cette nonchalance, cet humour subtil et une intrigue faite d’indices parsemés de ci de là. Voilà une belle occasion de revenir aux sources du polar.
Je lis peu de romans allemands, soit parce qu’ils sont peu présents dans les offres des éditeurs, soit parce que je les trouve bavards. Peur de Dirk Kurbjuweit (Delcourt) est un pur roman psychologique qui met clairement mal à l’aise par son sujet : un père de famille se retrouve harcelé sans qu’il ne puisse rien y faire. Dérangeant, sans dialogues et clairement passionnant pour peu que l’on soit fan de psychologie.
Au niveau des découvertes, l’une des plus enthousiasmantes fut Boccanera de Michèle Pedinielli (Editions de l’Aube), un roman conseillé par Patrick Raynal (ce n’est pas rien !). Annoncé comme le premier d’une série, son personnage principal de détective privé au féminin est attachant et l’enquête passionnante. Tout y est bien fait, formidablement maîtrisé et on a hâte de retourner dans les petites rues de Nice pour suivre les prochaines aventures de Giulia.
Jusqu’à la bête de Thimothée Demeillers (Asphalte) fait partie de ces romans inoubliables. Sans esbroufe, l’auteur utilise un langage franc, direct, qui sonne vrai. Si au début cela peut sembler déstabilisant, plus on s’enfonce dans le roman, plus cela devient prenant et même impressionnant. C’est le portrait d’un ouvrier travaillant dans un abattoir, qui sonne comme un symbole du malaise de la société et une dénonciation du travail à la chaîne aliénant.
Le titre du chouchou du mois revient à Le festin de l’aube de Janis Otsiemi (Jigal). Cela fait longtemps que nous sommes quelques uns à défendre Janis Otsiemi pour la description qu’il fait de son pays, pour l’immersion qu’il créé grâce à son langage imagé et fleuri issu du cru. Quand il y ajoute un scénario en béton, cela donne un roman incontournable.
J’espère que ce billet vous aura aidé dans vos choix de lecture. Je vous donne rendez vous le mois prochain pour un nouveau titre de chouchou. En attendant, n’oubliez le principal, lisez !