Petiote de Benoit Philippon

Editeur : Les Arènes – Equinox

Aussi étrange que cela puisse paraitre, j’ai acheté tous les romans de benoit Philippon en grand format et n’en ait lu qu’un (Cabossé) … et je n’ai aucune excuse. Il aura fallu l’insistance de mon ami du Sud pour me plonger dans cette prise d’otage formidable.

A le voir dans la rue, on sent bien que Gustave Sanson dit Gus porte la poisse comme un sac à dos. Sa ressemblance avec Droopy lui a permis de draguer Charlotte, devenue sa femme. Mais de mauvaises décisions aux simples conneries, Gus s’enfonce irrémédiablement en se trouvant toujours des excuses. Sa seule réussite se nomme Emilie, sa fille, l’étoile de sa vie pour qui il voue un amour sans borne.

Quand Charlotte demande le divorce sans droit de garde, Gus décide de se lancer pour défendre sa cause et exprimer l’amour pour sa fille à la Juge des Affaires Familiales. La larme à l’œil de la juge lui fait croire qu’il a enfin gagné une partie … mais il ne s’agit que d’une allergie au pollen et la sanction est immédiate : faute d’un logement décent, Gus perd la garde d’Emilie.

Gus loge dans un hôtel miteux, le « Love Hôtel », dont le V de l’enseigne au néon est en panne et pourrait être remplacé par un S. Gus n’accepte pas cette décision et décide de faire une prise d’otage pour que l’état lui fournisse 500 000 euros et un avion à destination du Venezuela pour sa fille et lui. Il profite d’ailleurs qu’elle vienne récupérer la pension alimentaire à l’hôtel pour mettre en branle son plan foireux.

Après avoir volé des armes à Sergueï, qui loge au 3ème étage, et l’avoir menotté, Gus se retrouve avec Cerise une jeune prostituée, Gwen et Dany deux amants de passage, George le patron de l’hôtel, Boudu un SDF qui fait me ménage, Fatou une immigrée clandestine enceinte. A cette petite troupe va s’ajouter Hubert, livreur de pizza Über (ça ne s’invente pas !). Le grand bordel peut commencer.

Il faut de sacrées couilles (excusez moi l’expression !) pour se lancer dans une histoire pareille, choisir de tels personnages et de tenir le rythme pendant 376 pages. Et pourtant, Benoit Philippon a ce talent rare de nous faire croire à ces êtres cassés et de nous faire rire en trouvant la petite remarque acide ou juste cynique qui va nous les faire adopter. De cette intrigue irréaliste, il va en tirer une grande fresque humoristique mais pas que …

Comme tout huis-clos, tout tient dans les personnages. Benoit Philippon va prendre consciencieusement son temps pour nous expliquer leur passé, et leur itinéraire jusqu’à cet hôtel miteux. Il va nous les peindre tous misérables dans leur vie, toujours burlesque dans leurs déconvenues mais toujours attachants sans jamais se montrer larmoyant, ce qui est un vrai tour de force.

Bons ou méchants, ils ont tous une bonne raison de se retrouver au Lose Hôtel (pardon, au Love Hôtel) ou dehors comme la capitaine Mia Balcerzak, chargée de la négociation ; celle-ci va d’ailleurs s’avérer remarquablement psychologue et se retrouver débordée devant la bordel qui va aller en s’amplifiant. Car ce roman déborde d’événements, de rebondissement et nous montre même une évolution des personnages qui fait penser à un roman réaliste tout en gardant ce coté décalé.

A la fois roman délirant et roman humoristique, Petiote s’ancre dans une réalité qui elle est inéluctable. Pour ridicules qu’ils soient, chacun de ces personnages a subi des événements qui l’ont amené là. Benoit Philippon, derrière ses atours de clown en chef, a construit une fresque sociale, qui charrie une énorme vague d’émotions quand à la fin, on verse sa petite (grosse en ce qui me concerne) larme. Vous croyez que ce roman n’est qu’une gigantesque et excellente blague ? Pas sûr …

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